Volontaires, dynamiques, accrocheuses, déterminées, courageuses, c'est en substance le profil des gazelles du Rallye Aicha, une expérience unique en son genre qui "marque à jamais la vie" des concurrentes, a assuré Mme Dominique Serra, fondatrice de cette compétition féminine qui se déroule actuellement dans les somptueux décors du grand sud marocain. Propos recueillis par Amal Tazi "Pour beaucoup d'entre elles, être une gazelle c'est une valeur très forte. C'est de l'estime de soi que ces femmes retrouvent dans ce rallye, ce qui est très important pour elles et leur permet même de changer leur regard sur le monde", a confié à la MAP Mme Serra, convaincue que "lorsqu'on est gazelle un jour, on l'est pour toujours". Ce slogan est repris d'ailleurs par toutes les femmes qui ont fait jusqu'ici l'expérience et dont plusieurs reviennent, a indiqué l'organisatrice du Rallye qui souffle cette année sa 21-ème bougie. Gazelle pour un jour, gazelle pour toujours C'est le cas de Mme Soraya El Alaoui, ambassadrice du Rallye pour le Maroc, mais aussi de milliers d'autres femmes qui ont participé à cet événement, a précisé Mme Serra, fière de l'engouement des femmes pour cette course, parvenue à devenir une référence féminine des rallyes, en associant à la fois "aventure humaine, dépassement de soi, éco-responsabilité, entraide et partage". "Cette année, il y a une fille qui a fait douze fois le rallye", s'est elle félicitée. Pour les centaines de gazelles qui rejoignent l'aventure chaque année, de différentes nationalités, l'épreuve commence bien avant la traversée de la Méditerranée, qui marque le début effectif du concours. C'est "un vrai parcours du combattant" dont les premières difficultés surgissent dès l'instant où l'on exprime la volonté d'y participer. Car il faut d'abord chercher des sponsors, les droits d'inscription étant fixés à 14.000 euros, auxquels s'ajoute la voiture, "ce qui n'est pas donné". "En tout, il faut compter 20.000 euros pour deux personnes", a indiqué Mme Serra qui reconnaît que "ce n'est jamais facile de trouver des sponsors, c'est la première galère du rallye et il faut être vraiment motivé pour pouvoir le faire". Navigation à l'ancienne, sans GPS Mais c'est sur place que les concurrentes découvrent les vraies difficultés du Rallye, avec son concept original: "Pas de vitesse, comme critère de classement, mais une navigation à l'ancienne sans GPS, hors de toutes pistes, dans l'univers merveilleux et fascinant du désert marocain". "On leur apprend à naviguer et à savoir se diriger juste avec la carte et la boussole. Il n'y a pas de GPS, c'est interdit", a souligné Mme Serra qui tient à ce que ses gazelles se conforment strictement au règlement, sous peine de leur exclusion "pure et simple" de l'évènement. "C'est toute l'image du Rallye qui est en jeu et il y va de sa crédibilité. Les gazelles ne sont pas des tricheuses", a-t-elle soutenu. C'est très facile, selon elle, de savoir si les filles utilisent un GPS, en cachette. "Elles vont trop vite, ce qui est suspect. On fait alors des fouilles de temps en temps", a-t-elle expliqué. Mais de toute façon, rassure-t-elle, rares sont les cas de tricherie au Rallye Aicha des Gazelle. Pour gagner le rallye, les concurrentes doivent trouver et pointer tous les contrôles de passage, qui se dressent tout au long du parcours de Tanger à Essaouira, "en faisant le moins de kilomètres possible avec le minimum de problèmes mécaniques et de demandes d'assistance". "C'est trouver le chemin le plus droit possible d'un endroit à l'autre. Ce n'est pas facile, puisqu'elles sont en piste et peuvent se perdre facilement dans le désert. Il y a plein de difficultés sur toute la partie du parcours", a indiqué Mme Serra. Mais, les gazelles n'ont pas à paniquer. "Elles croient qu'elles sont perdues, mais elles ne le sont jamais. On a sur chaque voiture un système de tracking et on sait tout le temps où elles sont", a expliqué l'organisatrice du Rallye. Un équipage masculin se mesure aux gazelles Pour la deuxième année consécutive, Mme Serra a convié un équipage masculin, constitué d'un navigateur et d'un champion de course moto qui a participé à de nombreux rallyes dont le Dakar, pour prendre part à cette aventure et se mesurer aux Gazelles. "Ils croyaient que c'était facile, un truc pour les filles, mais quand ils ont fait l'expérience, ils se sont rendus compte de la difficulté de l'épreuve. Et puisqu'ils n'ont pas fait tout le parcours l'année dernière, ils ont voulu revenir pour aller jusqu'au bout cette fois", a relevé l'organisatrice du Rallye, fervente défenseuse de la cause féminine. C'est justement dans le cadre d'un projet destiné à valoriser les femmes dans l'entreprise, qu'elle avait décidé de créer cet événement en 1990. Constant qu'il n'y a pas de femmes dans le monde automobile, Mme Serra a pensé de les mettre dans une aventure, un raid, en partant de la conviction que "pour valoriser les genres il fallait les mettre en contradiction". Elle s'est dite "assez fière" du chemin parcouru jusqu'ici par le Rallye Aicha des Gazelles. "Je suis partie de rien, personne ne croyait en mon projet au début, et puis tout doucement, +step by step+, j'ai convaincu, les gens ont suivi, et ça c'était extraordinaire", a-t-elle dit. Elle avoue que maintenant, au bout de 21 ans, elle ne n'a plus à se battre comme auparavant sur la partie, désormais acquise, de la reconnaissance de "la qualité des femmes, de leur performance, de la véracité de cet événement et de tout ce qu'il apporte aux femmes, au Maroc et à toute l'équipe du Rallye". "Cela a pris énormément du temps et d'énergie, de pleurs, de découragements, mais l'essentiel c'est d'être arrivée au bout", a-t-elle affirmé pour conclure: "C'est comme les gazelles qui font le rallye, moi j'ai fait le mien".