Le quotidien britannique, "The Independent", a dénoncé lundi la propension du pouvoir algérien à se dédouaner des crimes et atrocités commis par ses services sécuritaires, lors de la décennie noire", une véritable guerre civile qui a déchiré ce pays durant les années 1990, faisant des centaines de milliers de morts et de disparus. Dans un article, intitulé "la tragédie des disparus de l'Algérie" consacré à la conférence internationale à Alger sur la célébration de l'anniversaire de la résolution 1514 de l'ONU, Robert Fisk, spécialiste des questions arabes, note que le gouvernement algérien "a célébré la révolution qui a mis fin à l'occupation française il y a un demi siècle", mais s'offusque lorsqu'on parle des milliers de morts imputés à ses services durant les événements qui ont suivi et qui, pourtant, "ont laissé des cicatrices profondes". De nombreuses personnes, de tout âge et de différentes obédiences, ont été victimes de l'effusion de sang qui a eu en Algérie durant les années 1990, souligne l'auteur. "Personne n'a cependant évoqué lors de la conférence d'Alger les 6.000 hommes et femmes, décédés durant les années 1990 sous la torture des services de sécurité, des soldats et des agents de sécurité cagoulés", déplore Fisk. Loin de la célébration de l'anniversaire de la résolution onusienne, le pouvoir" algérien cherchait en réalité, à travers la conférence d'Alger, à mettre en place de nouvelles fondations sur "les fosses communes de 250.000 martyrs d'un autre conflit", à savoir "la guerre civile barbare de 1990-98", indique Fisk, qui souligne qu'il n'était pas sûr que cette guerre ait réellement pris fin. "Le Pouvoir" a inventé la nouvelle expression "tragédie nationale" pour décrire cette effusion de sang comme si la suspension des élections par le gouvernement et la guerre brutale contre les islamistes n'était qu'une simple pièce de théâtre. The Independent cite, dans ce contexte, l'action menée par l'organisation non-gouvernementale "SOS Disparus" pour faire la lumière sur le sort de plusieurs "victimes des forces de sécurité" dont les familles ont perdu tout espoir de les retrouver vivants. Les locaux de cette ONG sont de temps en temps investis par les policiers, poursuit Fisk, qui rappelle le cas d'Amina Beuslimane, une jeune fonctionnaire de 28 ans, arrêtée le 13 décembre 1994 par les forces de sécurité pour avoir filmé des cimetières et des édifices bombardés, "preuves des crimes commis par le gouvernement". Les autorités avaient alors informé sa famille qu'elle ne pourra jamais la revoir, indique le quotidien, notant que la fonctionnaire aurait pu passer ses derniers jours dans "le centre spécial d'interrogatoire et de viol de Chateauneuf" à Alger. "Les bouchers de Chateauneuf peuvent se détendre", car le référendum qui a accordé une amnistie aux islamistes ayant pris les armes, "a également blanchi les forces de sécurité de leurs crimes", souligne The Independent.