20 semaines de vacances par année… des revenus qui oscillent entre 500 000 $ et $1 million. Vous croyez qu'il s'agit des conditions d'un professeur renommé dans la plus prestigieuse université américaine ? Ou de celle d'un animateur vedette d'une émission de télévision ? Pas du tout. Je vous parle de serviteurs de luxe chargés de transporter les effets d'un maître richissime dans un sport très populaire. Je vous parle des plus célèbres porteurs de valises de la planète.
Je vous parle des caddies du golf professionnel.
Pourtant, la plupart de ces hommes sont virtuellement inconnus du public et même de la plupart des amateurs de golf. Et ce malgré la grande visibilité que leur offre la télédiffusion des tournois. Peu d'entre nous pourraient les identifier, mis à part le fer de lance de leur profession, Steve Williams. Et pour cause. Williams côtoie un autre fer de lance… celui du golf en particulier et du sport en général. L'unique Eldrick «Tiger» Woods.
Au cours de la dernière décennie, le total annuel des bourses du golf professionnel est passé de $ 96 millions à tout près de $ 300 millions, principalement en raison d'une augmentation par les télédiffuseurs, du temps d'antenne accordé aux golfeurs. Les caddies devaient forcément passer à la caisse.
Williams : le « Fer de Lance »
Avant toute chose, il faut expliquer que ce métier de caddie est assez particulier en soi. Il n'a son égal dans aucun autre sport. En fait, il combine une parcelle des nombreux emplois de ceux qui gravitent dans l'entourage d'un athlète de pointe. Un caddie est un peu le responsable d'équipement, un peu l'entraîneur et un peu le psychologue. Ah oui… il est aussi un « peu beaucoup » un confident et, souvent, un ami sincère. Ce n'est pas pour rien que certains de ces « partenariats » durent très longtemps.
De nos jours, un caddie reçoit normalement entre 1 000 $ et 1 500 $ par mois pour ses dépenses personnelles. Puis, en général, il se voit attribuer entre cinq et dix pour cent des bourses de son «employeur». Sachant que Williams se voit attribuer 15 % des bourses de son surdoué de patron, on peut facilement déduire qu'il engrange des revenus évalués à plus d'un million de dollars.
Selon une étude publiée par Forbes Magazine, entre les mois de juin 2006 et 2007, Williams avait empoché $ 1,27 millions. S'il eut été un golfeur régulier du Tour, il se serait situé au 75ème rang des boursiers. Parmi les autres «avantages sociaux» rattaché à son emploi, rappelons qu'après sa victoire au Doral, en 2005, Woods lui a fait cadeau d'un autre prix qu'on lui avait décerné. Un véhicule Ford GT d'une valeur de 140 000 $. Mais comme il n'y a qu'un Tiger Woods, il n'y a qu'un caddie capable d'accumuler de tels revenus. Ce qui laisse les autres caddies à des niveaux se situant entre 400 000 $ et 750 000 $. Ce qui n'est tout de même pas mal non plus…
Riches et (un peu) célèbres ?
Toujours en 2007, les plus hauts salariés, hormis Williams, étaient Chad Reynolds (Vijay Singh) avec plus de 510 000 $ et Tony Navarro (Adam Scott) 446 000
Qui plus est, certains d'entre eux ont même signé des ententes publicitaires. Normal, compte tenu de l'énorme visibilité que leur procure le fait de côtoyer celui qui est la cible des télédiffuseurs et des photographes. Ce privilège, toutefois, doit s'accompagner d'une certaine humilité et d'un bon jugement.
Steve Williams est associé à Valvoline depuis quelques années mais il sait rester dans l'ombre du maître. Il ne montre le logo de son commanditaire qu'en certaines occasions. Sa visibilité, il la doit à son emploi auprès de Tiger Woods. C'est donc ce dernier que les gens sont venus voir et ce sont donc les commanditaires de Woods qui doivent paraître le plus. Williams récupère les grenailles. Son prédécesseur, Mike « Fluff » Cowan, a été moins discret et il l'a appris à ses dépens. L'homme à la grosse moustache, premier caddie de Woods chez les pros, est notamment apparu dans une publicité d'hôtel et de banques. Peu de temps après, Woods le congédiait pour choisir Willliams. Leur partenariat dure depuis 10 ans.
Fait plutôt cocasse, Steve Williams risque de connaître sa plus grosse année de revenus cette saison, même si son Tigre de golfeur est sur le carreau depuis la fin de juin. J'entends ici… «au pro rata des efforts fournis…» Car, si on tient compte des quelques $ 5,7 millions que Woods a accumulé en seulement six tournois, on peut donc conclure que Williams aura tout de même accumulé des revenus de près de 600 000 $ en plus de six mois de congé.
Et Au Québec ?
Vous pourriez vous demander quelle est la situation, chez nous, au Québec ? La réponse est venue de Jean Trudeau, patron de l'organisme qu'il fait croître sur le plan structural et boursier, l'Association des Golfeurs Professionnels du Québec (AGPQ). Monsieur Trudeau a pris soin de préciser que les caddies étaient une race en voie de disparition, au Québec. Et que ceux qui le font sont soit les enfants, les conjointes ou les amis des pros. Rien à voir avec la situation dans la PGA. Les données qui suivent ne visent pas à discréditer nos professionnels, mais bien à satisfaire la curiosité de ceux et celles qui se poseraient la question.
Situons d'abord les revenus des golfeurs. Malgré une augmentation substantielle des montants d'argent et du nombre de tournois, dites vous que le meilleur boursier dispute entre 8 et 12 tournois pour des gains saisonniers entre 75 000 $ et 85 000 $ (En 2003, Rémi Bouchard avait connu une année exceptionnelle avec 100 000 $). Ici, point de montants forfaitaires aux caddies ou de pourcentage des revenus. D'ailleurs, chez les deux tiers des participants, point de caddie non plus ! En fait, outre les dépenses de repas et le partage de la chambre d'hôtel lorsque le tournoi est disputé loin de la maison, c'est un montant approximatif de 50 $ par ronde qui est donné au caddie par le pro. Si vous calculez un maximum de 12 tournois de deux rondes, vous avez des revenus globaux de 1 200 $ par saison (car notre saison est pas mal plus courte que celle des caddies américains, vous en conviendrez).
Voilà qui, nous l'espérons, vous aura éclairé sur les conditions de travail de ces personnages secondaires du golf. Quand vous les verrez marcher péniblement dans une pente, sous un soleil de plomb, traînant ce sac chargé d'instruments de métal, dites-vous bien qu'ils l'ont choisi, ce métier. Et qu'ils n'arrêtent pas de rire lorsqu'ils marchent ensuite vers leur… succursale bancaire !