La problématique des délais de paiement constitue toujours un handicap majeur pour l'économie marocaine en général et les PME- TPE en particulier. Le retard de paiement des PME et des TPE est respectivement de 133 et 264 jours, soit des niveaux dépassant de loin le délai réglementaire de 60 jours. Un délai qui est règlementé par la loi 49-15 sur les délais de paiement, publiée au Bulletin officiel n°6501 du 19 septembre 2016. Celle-ci stipule aussi que toute entreprise qui ne respectera pas le délai de paiement sera durement sanctionnée : elle se verra interdire l'accès aux marchés publics et aux subventions de l'État. Depuis sa publication au BO en 2016, ce texte de loi n'a eu aucun effet sur le comportement de leurs entreprises. Sur ce registre, Stéphane Colliac, économiste en charge de la France chez Euler Hermes, estime qu'il est difficile de « constater que les lois ou pressions amicales se succèdent et que les pratiques ne changent pas ». Et d'ajouter que « La loi est une chose, mais sa traduction dans les faits est très imparfaite et l'arsenal reste incomplet. Les exemples existent à l'étranger, et le Maroc doit se saisir des instruments disponibles et qui ont fait leur preuve ailleurs ». Hausse de défaillances de 4% en 2019 A cause notamment des jours de retard de paiement, les entreprises se trouvent alors obligées de déclarer leur faillite. Selon Inforisk, spécialiste du renseignement commercial sur les sociétés marocaines, 7.941 PME-TPE ont fait banqueroute en 2018 à cause notamment des défauts de paiement. Pire encore, Euler Hermes prévoit même une hausse de défaillances de 4% en 2019. A souligner en ce sens, toujours selon l'assureur-crédit, que le délai de paiement clients s'est allongé de 2 jours entre 2017 et 2018 pour atteindre une moyenne de 84 jours, contre 65 à l'échelle mondiale. Pire, une entreprise sur 4 est payée presque 4 mois après livraison. Les secteurs les plus touchés sont la technologie, les transports, l'industrie pharmaceutique et la construction. « Ce type d'évolution est symptomatique d'un élastique qui se tend et qui peut lâcher en cas de retournement de conjoncture. Cette expérience est donc pleinement intégrée à notre analyse du risque, en cela qu'elle fait porter un risque de défaillance supplémentaire sur les entreprises marocaines. En cohérence avec cela, nous anticipons un rebond des défaillances d'entreprises de +3% en 2019, vers un nouveau plus haut historique. Au-delà du caractère informatif de cette analyse, elle nous permet également d'échanger avec nos clients et d'identifier avec eux les bonnes contreparties, qui seront à même de les payer mieux et dans les temps. Il n'y a donc pas de relation mécanique entre l'allongement d'un délai de paiement et les primes d'assurance-crédit », a affirmé M. Colliac. L'analyste français a affirmé, en outre, que « tant que les délais de paiement seront si longs le risque d'impayé ne connaîtra pas de baisse conséquente et les réformes ne seront pas pleinement efficaces. C'est dommage, car cela fait perdre des opportunités d'affaires et à l'arrivée, la croissance marocaine reste insuffisante pour combler le chômage ». D'ailleurs, SM le Roi avait souligné, dans son discours du 20 août 2018, que «Tout retard de paiement peut engendrer la faillite d'une entreprise et une perte d'emploi. Comment peut-on donner l'exemple si les établissements et entreprises publics (EEP) ne respectent pas leurs engagements?». Réduction des délais de paiement des entreprises, une priorité nationale Sur ce sujet des délais de paiement dans la commande publique, soulevé par le Souverain, que le délai global moyen des marchés publics est de 38 jours pour l'Etat, et 44 jours pour les collectivités locales. Le délai d'ordonnancement atteint, de son côté, 35,5 jours en 2018. Ces chiffres ont été soulevés dernièrement à Guelmim, lors d'une rencontre régionale sur «Les solutions pour l'amélioration des délais de paiement de l'Etat et des collectivités territoriales». M. Safir a relevé, à cette occasion, que le retard de paiement constitue une menace au climat des affaires et aux équilibres financiers des entreprises. Il a souligné, à ce sujet, que la réduction des délais de paiement est l'un des facteurs de l'amélioration du climat d'affaires et de la réduction des menaces qui guettent les entreprises. Dans ce sens, le wali directeur général a appelé à la fédération des efforts de toutes les parties prenantes en vue de résoudre les difficultés auxquelles font face les entreprises en ce qui concerne les délais de paiement et des dettes, qui peuvent impacter négativement le développement économique et la poursuite des activités commerciales. Pour le même souci, à savoir améliorer les délais de paiement, le ministère des Finances a émis, en septembre 2018, une circulaire appelant les entreprises et établissements publics être un exemple du respect des délais de paiement notamment pour les PME et les TPE. « Le suivi effectué par les services concernés du ministère démontre que certains EEP ne respectent pas les délais de paiement, alors qu'elles disposent des ressources financières nécessaires », est-il souligné. A. CHANNAJE