Deux grands événements à commémorer : la loi 103-13 sur la violence à l'encontre des femmes et l'accès des femmes à la profession d'« adoul » Le thème de la Journée internationale des femmes du 8 mars 2018, dicté par l'ONU, est « L'heure est venue : les activistes rurales et urbaines transforment la vie des femmes ». Qui dit activistes, dit militantes et société civile au niveau national, régional et local dont le dessein est la promotion des conditions des femmes selon une approche de Droits humains. Dans ce cadre, il faut mentionner que ce sont nos activistes du terrain qui ont pu tirer les femmes marocaines vers le haut, qui ont contribué à la mise en place et à la mise en œuvre des différentes stratégies et plans d'actions ministériels, qui ont permis ces réformes législatives dont on est fières, quoique certains textes soient mieux représentatifs que leur concrétisation sur la réalité. A savoir, le Code de la famille, le Code de la nationalité, les réformes du Code pénal, la Constitution... Si la concertation n'avait pas été faite avec les activistes, les textes n'auraient pu être parfois aussi intégraux (?). Ce thème rend hommage aux acteurs associatifs toujours présentes sur le terrain, surtout au niveau local, mais le chemin est encore long. Tout cet arsenal juridique se trouve « perturbé » sur le terrain, par manque d'homogénéité, de cohérence et de transparence, d'abord entre tous ces articles de loi, mais aussi par rapport aux conventions internationales ratifiées par le Maroc et qui prônent et priorisent les Droits humains. Inégalités et injustice priment dans le partage des chances, dans le recrutement, dans l'accès aux postes de décision, dans l'accès aux terres familiales..., parfois même pour un gagne-pain digne. Surtout au niveau périurbain et rural qui souffrent de marginalisation. C'est pour cela que, quand on parle de militer au niveau rural, c'est surtout pour une vie décente, une certaine libéralisation matérielle des femmes et des filles à travers leur autonomisation. Autrement dit, l'accès à un emploi, à travers les produits de terroir ou autres, à un microcrédit, pour subvenir aux besoins de la famille, relever le niveau de vie, scolariser les enfants, avoir une vie décente...et ne plus se contenter d'essayer de vivre, dans l'ignorance des chances qu'elle peut avoir dans la vie. C'est au niveau rural que les militantes doivent agir. Pour commémorer l'année révolue, le temps est au bilan. Il y a deux grands événements qu'on peut soulever cette année, à savoir : la loi 103-13 sur la violence à l'encontre des femmes, adoptée au mois de février 2018, et la possibilité pour les femmes marocaines d'exercer le métier d' «adoul », autrement dit de rédiger des actes authentiques de mariage ou de divorce et de partage d'héritages, jusqu'à cette date l'apanage des hommes. Une décision Royale, conformément aux dispositions de la Chariâa, s'appuyant sur les constantes religieuses, particulièrement le rite malékite. Pour ce qui est du projet de loi sur la violence à l'égard des femmes, sujet à polémique depuis 2008 dès l'ouverture de ce dossier et pour quatre mandats ministériels (plutôt 5), il a été voté au mois de février mais reste toujours conflictuel puisqu'il n'est nullement intégral, n'a pas tenu des revendications de la société civile et n'assure pas les 4P, conformément aux lois humaines. A savoir : la protection, la prévention, la prise en charge efficace et les peines ou mesures punitives dans toutes les problématiques et situations où se trouvent les femmes, dans notre contexte et société marocains. Approuvé par le Conseil de Gouvernement le 17 mars 2016, le projet de loi n° 103.13 a été adopté en première lecture par la Chambre des Représentants le 20 juillet 2016, puis par la Chambre des Conseillers le 31 janvier 2018. Et enfin, définitivement en seconde lecture par la Chambre des Représentants le 14 février 2018. Tout un processus de 2008 à 2018, soit dix ans. On pouvait au moins trouver des définitions cohérentes pour ne pas tomber dans certains pièges juridiques. C'est une coquille vide, comme affirmé par maintes associations. Parmi les failles relevées par la société civile, le manque de protection optimale, la non incrimination du viol conjugal, certaines infrastructures manquantes ou mécanismes de prise en charge de la violence... mais aussi les définitions internationales à même de lutter contre ce fléau. On peut noter favorablement les sanctions sévères prévues contre le harcèlement dans la rue, à savoir : 6 mois de prison et une amende de 2.000 à 10.000 dirhams, de même pour des propos ou insinuations à caractère sexuel verbaux ou par SMS, messages vocaux, photos... ; le mariage des mineures passible d'une peine de six à douze mois de prison...Et d'autres comme les agressions, l'exploitation sexuelle ou de mauvais traitement. Il est sûr que les femmes vont avoir beaucoup de difficultés avec cette loi qui ne règle pas grand-chose, comme d'ailleurs la mise en œuvre du Code de la famille qui est contesté, 14 ans après. Plusieurs associations ont commencé l'année 2018 avec des revendications sur la réforme de certains articles de la Moudawana, qui ont prouvé leurs défaillances. Bouteina BENNANI