Le Festival National du Film (F.N.F.) est né en décembre 1982 à Rabat. C'est dans la capitale qu'a été tenue la première édition du festival présidée par Souheil Benbarka, avec comme lieu de projection unique la salle "7ème Art" et lieu d'hébergement officiel le défunt hôtel Balima. Il fut également le théâtre des débats houleux qui accompagnaient la projection des films. La création de ce festival s'inscrivait dans un contexte bien particulier. Le fonds d'aide venait de se créer permettant d'améliorer sensiblement la production cinématographique nationale. Le cumul quantitatif donnait des ambitions à la direction du C.C.M. qui reprit une vieille idée ancienne d'une dizaine d'années. En effet, le festival méditerranéen de Tanger en 1968 venait couronner le passage du court au long célébré dans la fierté et l'hardiesse nationales. Produire deux longs métrages est un événement qu'il fallait fêter en grandes pompes. Et pourtant la qualité technique des films en compétition à Rabat laissait à désirer. Le complexe (laboratoire) venait d'être créé en vue d'assurer une indépendance technique. Les cinéastes, dont la plupart qualifiés de "chasseurs de primes", n'avaient d'autre alternative que de subir une foudroyante incompétence technique à tous les niveaux. Heureusement depuis, la qualité s'est nettement améliorée et les films marocains et africains traités dans ce même laboratoire aujourd'hui, ne souffrent plus de cette tare. C'est durant cette première édition que le nom de Mohamed Ousfour est enfin révélé au public et à la critique. Lui, pourtant pionnier incontestable dans le domaine, était jusque-là ignoré de tous. Son film "Le trésor infernal", seul long métrage du cinéaste-précurseur, est applaudi non sans gêne. Un autre cinéaste est également révélé, et pas des moindres: il s'agit d'Ahmed Bouanani, dont le film "Le mirage"(Assarab) constituait incontestablement le chef-d'oeuvre du festival. C'est également l'édition des films "Le coiffeur du quartier des pauvres", "Poupées de roseau", "Les beaux jours de Shahrazade" et "Le grand voyage", c'est-à-dire des films qui relèvent aujourd'hui des classiques du cinéma marocain. Deux années après, la médiocrité va s'imposer à la deuxième édition tenue à Casablanca, présidée par Latif Lahlou. Alors que la compétition est en cours, des films sélectionnés sont encore en cours de traitement au laboratoire et les bobines, achevées très tardivement la nuit, arrivaient au fur et à mesure à Casablanca. L'amateurisme se développait à l'œil nu. Les débats qui suivaient furent également l'occasion pour régler les comptes et avec le laboratoire et entre professionnels. Mohamed Reggab, pourtant à l'aise à la R.T.M., tirait à boulets rouges sur tout le monde. C'est le début d'une révolte qui dura plusieurs décennies.