Enfin, la sélection marocaine a joué à Tanger. Un monde fou, des supporters déchainés, des billets en vente partout, une ambiance folklorique, quarante mille personnes au Grand Stade Ibn qui a revêtu sa plus belle parure, une organisation parfaite sur tous les plans : à l'unanimité, tous étaient pour une seule formation, le Maroc. Les Tangérois aiment à la folie leur équipe nationale, leur pays. La présentation de l'hymne était une longue émotion qui avait fait pleurer le public. De toutes les gorges, les cris « Allez Maroc ! » sortaient pour se transformer en vraie chorale. Les « olés ! olés ! » se faisaient entendre à l'espagnole au moment des belles phases du jeu. 40.000 spectateurs dans un match amical, c'est du jamais vu dans les stades du pays. Répondant aux encouragements de tout Tanger car même à l'extérieur de Ziaten, aux environs de l'hôtel de concentration, les femmes poussaient des « youyous » au passage de l'autocar marocain, les poulains de Hervé Renard ont vaincu et convaincu. Très prometteuse, cette sélection alignée où trois « moteurs » constituaient le mécanisme d'une « machine» bien rodée : Karim Ahmadi, Nabil Dirar et Achraf Lazaâr a conquis le le public marocain. Le pressisng, le changement constant du schéma tactique, la permutation des joueurs et surtout la combativité sont les caractéristiques de la nouvelle version d'une formation solide en défense, technique en ligne médiane et dangereuse en attaque. Seul le poste d'avant-centre a présenté des carences à corriger dans l'avenir du fait que Youssef Larabi et son remplaçant Boutayeb n'ont pas donné ce que l'entraîneur attendait d'eux. Un match complet surtout dans sa première mi-temps, et des footballeurs qui semblaient à l'aise dans le nouveau système de jeu de Hervé Renard qui parait être bien placé pour faire oublier la « déconfiture » appelée Badou Zaki que les citoyens doivent oublier le plus tôt possible. Le Maroc plaisait surtout par les nombreuses attaques menées par les arrières : Nabil Dirar à la droite et Achraf Lazaâr à la gauche, deux faux ailiers d'un football moderne pratiqué par les meilleurs clubs européens. Comme l'ont déclaré les membres du staff technique, l'équipe nationale pourrait mieux faire si elle n'avait pas inclu d'un seul coup six nouveaux joueurs exigeant la cohésion et l'entente et si elle arrivait à récupérer deux joueurs importants blessés Soufiane Boufal et Oussama Tanane ainsi que les gardiens de but non libérés par Numancia et Zaragoze Mounir Mohamadina et Yacine Bono. De l'optimisme et rien que l'optimisme pour un groupe qui augure d'un bel avenir. « Nous avons un réservoir de jeunes talents qui évoluent dans de grandes équipes européennes », nous disait Hervé Renard. Donc, sur le plan des individualités, il n'y a aucun doute et le choix des footballeurs en forme ne pose aucune indécision. « Les meilleurs sont là » est une constatation qui n'est pas à débattre. Une révélation est à signaler est celle du stoppeur Saiss Ghanem qui forme une paire défensive avec le capitaine Benatia Mehdi du Bayern de Munich. Objectif atteint : la création de nombreuses occasions de but, malheureusement non concrétisées; un travail s'impose dans ce sans car les Larabi, Boutayeb et Boussofa en particulier aux 15ème mn, 20ème mn, 40ème mn, 70ème mn, 80ème mn avec un tir sur le poteau de Amrabet à la 45ème mn ont raté des buts d'apparence facile. Avec les nombreux changements effectués pour un essai de plusieurs tactiques Carcela Mehdi, Boutayeb, Bamou Yacine, Boussofa, Dacosta à la place respectivement de Amrabet, Larabi, Nabil Dirar, Hakim Ziyach et Kadouri, le onze national a baissé de rendement. Ce fut un léger avantage pour les Congolais qui auraient pu marquer le but surtout par Dory Ferebory. Les deux buts de la partie furent des « chefs d'œuvre » sur balle arrêtée signés Hakim Ziyach, une autre révélation. Quelle classe dans les tirs ! A la 4ème mn, coup franc dès les 30 mètres et Ziyach sans aucune hésitation, fit loger le ballon dans les filets de Mafoumbi Henri d'un excellent bolide. Délire dans les tribunes et le nom de Ziyach était longuement répété par le public qui voyait en lui un bon tireur à la manière de Christiano Ronaldo. Le même joueur exécuta un pénalty sifflé à la 53ème mn en grand maître. Cependant, une simple erreur doit être corrigée : les joueurs nationaux tombent le plus souvent dans le piège du hors-jeu, ce qui les a privés de marquer plusieurs buts. Le score de 2-0 est très étroit par rapport à la bonne partie fournie avec une domination du ballon de 53 %. Le spectacle n'était pas seulement sur le terrain. Il était aussi dans les gradins où des milliers de portables étaient allumés, tout le monde avait l'impression de voir des feux d'artifice. Des étincelles vues de loin donnaient un spectacle artistique. Le public a bien répondu, il a gagné son pari. A vrai dire, il mérite mieux qu'une rencontre amicale. Il est inconcevable que durant cinquante ans d'Histoire du football marocain, depuis la création de la FRMF 1956, l'équipe nationale n'a joué que 4 rencontres à Tanger, deux au Stade du Marshane contre le Sénégal et Anderlecht, deux au Grand Stade contre Burkina Faso et CongoBrazzaville. Personne n'en connait les raisons. C'est très peu pour le meilleur public marocain, c'est très peu aussi pour une ville à vocation footballistique, c'est très peu pour un joli stade aux dimensions internationales. Bien qu'évoluant un vendredi jour laborieux, les nationaux étaient bien soutenus par 40.000 spectateurs et ont senti cette chaleur humaine nécessaire aux matches internationaux. En signe de reconnaissance au magnifique public, le capitaine Benatia Mehdi lui a offert son maillot comme souvenir. Un geste des grands joueurs européens.