Par Mostafa Bouhaidous* La solution d'irrigation localisée souterraine, dont le Groupement associatif FP4S est porteur, outre des propriétés substantielles d'économie de l'eau et de l'énergie présente de multiples avantages déjà évoqués dans ces colonnes : neutralisation de la salinisation – éradication des adventices - protection des sols et de la nappe, prévention des risques, etc. Ladite solution est, non seulement économique à l'installation, mais également dans son fonctionnement et dans sa maintenance et, dans le prolongement des avantages précités préside celui, primordial de la pérennisation assortie d'un retour sur investissement. Pérennisation des installations Les techniques d'irrigation localisée de surface se trouvent rapidement fragilisées par le colmatage des goutteurs, qui génère des coûts de main d'œuvre, de surveillance, de remplacement, de nettoyage à l'acide, etc. Ceci d'une part et, en raison de l'exposition des canalisations aux UV solaires et aux intempéries, autant qu'aux animaux errants, altère significativement leur résistance mécanique, allant jusqu'à la quasi destruction des installations dans des délais qui avoisinent difficilement deux années... d'autre part. La technique d'irrigation localisée souterraine du fait de son recouvrement dans le sol, est assurée d'une pérennisation de l'installation sur le très long terme, puisqu'elle permet d'échapper aux inconvénients cités plus haut. À cela, s'ajoute l'utilisation de matériaux de haute qualité, inaltérables dans le temps. Cette démarche exclut les matériaux et matériels issus de recyclage et retient ceux (ex. PEHD) qui, choisis selon les termes d'une « Charte éthique » expliquent le caractère pérenne de l'installation initiale. Pérennisation des résultats de la production Il est constant que la mise en œuvre et le suivi du Plan Maroc Vert a permis d'enregistrer des résultats positifs en termes de production, tout en déployant une technique d'irrigation qui, en l'état des connaissances a permis une réelle économie de l'eau. Il convient d'admettre que cette technique a atteint ses limites et que de nouvelles techniques doivent intervenir aux fins de compléter et pérenniser les dits résultats... tout en « rationalisant » l'utilisation de l'eau d'irrigation (Cf. Programme régional de lutte contre le déficit de la pluviométrie issu de la Réunion des Présidents des Chambres d'Agriculture le 7 avril 2016). Des expérimentations entreprises in-situ avec le concours de précurseurs éclairés, il résulte que : Une économie de l'eau constatée est de 50 % par rapport aux autres techniques d'irrigation ; Une économie de l'énergie qui se trouve « mécaniquement » diminuée dans les mêmes proportions ; La neutralisation des effets nocifs de la salinisation ; Des économies d'échelle portant sur la réduction, voire la neutralisation des paillages, désherbages, herbicides, fongicides, etc. De la protection des sols et de la nappe ; Une amélioration de l'enracinement ; Une amélioration significative de la production actuelle qui, souffrant notamment du stress hydrique n'atteint pas, ou très difficilement, le seuil idéal. Le recours à la technique d'irrigation localisée souterraine apporte à la plantation arboricole, par exemple, le confort qui permet d'obtenir le rétablissement de la production optimum assorti de résultats hautement satisfaisants en matière de calibrage, de quantité et de qualité organoleptique. Toutes les essences arboricoles sont concernées : rosacées, agrumes, oliviers, palmier-dattier, etc. De même que les cultures maraîchères sous serre et de plein champ, à l'instar des roses ou encore des vignes. Dispositif de l'arrêté conjoint du Ministre de l'Agriculture et de la Pêche Maritime, du Ministre de l'Intérieur et du Ministre de l'Economie et des Finances n° 362-10 du 10 Safar 1431 (26. 01. 2010) Pour mémoire, nous mentionnons les mesures de l'arrêté portant sur l'attribution de l'aide financière pour les aménagements hydro-agricoles (...) des propriétés agricoles, notamment l'article 2 qui énonce les définitions des dispositifs éligibles : - Système d'irrigation localisée. Les aménagements hydro-agricoles permettant l'irrigation par l'application fréquente et à faible débit de l'eau à proximité immédiate de la zone racinaire des plantes ; - Système d'irrigation de complément. Les aménagements hydro-agricoles permettant de combler les déficits pluviométriques durant les phases critiques ; - Projet global permettant l'économie d'eau d'irrigation. Tout projet permettant l'application de l'eau à la parcelle en utilisant les systèmes d'irrigation localisée ou de complément. - Système de collecte des eaux. Les aménagements, à caractère définitif, permettant de retenir et de stocker l'eau des précipitations dans le sol. - Systèmes de retenue et de collecte des eaux. Aménagements de terre à des fins d'amélioration de la productivité agricole sous forme de banquettes ou de murettes. De cette lecture, il apparaît que le système d'irrigation localisée souterraine, et ses différentes fonctionnalités, figure à l'inventaire précité, sans nécessiter une quelconque modification sur le fond. Quel coût ? Quel financement ? Chaque cas doit faire classiquement l'objet d'une étude édapho-pédologique et phytiatrique pour à la fois, adapter cette technique d'irrigation innovante et son dimensionnement à son environnement et à la spéculation concernée, pour en déterminer le coût. Il est à noter qu'en cette occurrence, les raisonnements et les calculs qui s'ensuivent sont totalement différents de ce qui est vigueur actuellement et que tous les protagonistes appelés à en connaître pourront alors bénéficier d'une formation pour la mise en œuvre de la nouvelle technique. Ceci posé, à défaut de pouvoir fournir un montant dans le détail, nous raisonnerons ici par comparaison et ordre de grandeur. Actuellement, le coût de l'installation d'un système d'irrigation localisée de surface, autrement appelé « goutte à goutte » qui comprendrait un forage/pompage et un bassin de stockage dont le volume correspondrait à cinq hectares , équipé d'un système de pression additionnelle, une station de tête et le réseau canalisations et de rampes de distribution, assorti des goutteurs peut être estimé à une somme de plus de 70 000 dirhams à l'hectare. En regard de ce qui précède, l'installation de la technique d'irrigation localisée souterraine qui comprend également le forage/pompage, une station de tête, l'édification d'un ou plusieurs châteaux de 120 mètres cube, le réseau de canalisations de faible diamètre et les humecteurs souterrains, peut être estimé à 45 000 Dirhams à l'hectare. Principe de l'attribution de la subvention (100 %) pour les projets d'irrigation localisée réalisés dans le cadre de projets collectifs ou par les petits agriculteurs exploitant cinq hectares ou moins (Article 2 de l'Arrêté). Le bénéfice de l'attribution de l'aide financière de l'Etat est subordonné à l'homologation de la technique d'irrigation considérée. Cette homologation a fait l'objet d'un « bulletin d'essai » favorable, délivré par le Laboratoire du Ministère de l'Agriculture et de la Pêche Maritime, qui rend éligible la technique d'irrigation localisée souterraine soutenue par le Groupement associatif FP4S. Pour l'attribution de la subvention, il convient de préciser que la valeur de 100 % affichée est limitée, pour chaque poste figurant sur une « fiche de calcul », par un plafond dont le montant est le plus souvent très inférieur aux prix du marché. Ainsi, lorsque la subvention est de facto plafonnée à 45 000 dirhams, par hectare, le prix de revient réel est très largement supérieur. L'application en l'état, de la subvention décrite ci-dessus, qui a en son temps fait la démonstration de son efficacité, présente plusieurs inconvénients et le cahier des charges mérite d'être réexaminé, dans le sens d'une adaptation aux nouvelles technologies : En substance, la subvention de 100 % se réduit au plafond de 45 000 dirhams, le différentiel (30 à 35 000 Dirhams) restant à la charge de l'agriculteur ; Dans la pratique, la tendance consiste à procéder à des installations dont le coût se rapproche du plafond (45 000Dh) avec pour conséquence des matériaux de mauvaise qualité, donc non pérenne. La subvention actuelle n'apporte donc au fellah qu'une aide partielle pour une installation d'irrigation localisée de surface, non pérenne sur le plan du matériel, avec pour corollaire une dégradation de la production, malgré une surconsommation de l'eau d'irrigation, qui entraîne de surcroît la sur-salinisation et des travaux pénibles ou toxiques du sol. La demande de subvention est renouvelable cycliquement, les coûts pour l'Etat, sont en conséquence, et pour l'essentiel, renouvelés. Une adaptation de l'arrêté présenterait l'avantage de s'accorder avec le deuxième axe du « Programme régional de lutte contre le déficit de pluviométrie » défini en date du 7 avril 2016, en faveur de la protection des ressources végétales assortie d'un suivi de l'exécution des projets de l'agriculture solidaire : « vu les enjeux qu'elle représente en termes de création de revenus et d'emplois afin de maintenir les équilibres dans le monde rural». L'objectif consiste en un renforcement des acquis régionaux en termes de plantations réalisées dans le cadre Pilier II du Plan Maroc Vert. Cet axe vise à assurer l'irrigation des plantations (âgées de 3 à 4 ans) (sic). Transposition du statut « d'agriculteur assisté» au statut « d'agriculteur investisseur » La notion de subvention définie par l'arrêté se révèle idéale dans la majorité des cas et constitue un soutien indiscutable pour l'agriculteur. En matière d'irrigation toutefois, le Groupement associatif FP4S suggère que l'État cesse de délivrer une subvention pour des installations d'irrigation non pérenne, pour la remplacer par une aide ponctuelle, unique, attribuée pour chaque parcelle arboricole équipée de la technique d'irrigation souterraine localisée dont l'identification pourrait être facilitée par le recensement entrepris dans le cadre du Registre National Agricole (RNA). En effet, en la forme actuelle la subvention est attribuée de manière récurrente pour des installations non pérennes, ce qui représente de nombreux inconvénients tant pour l'agriculteur que pour les deniers de l'Etat. En attribuant une aide réelle, plafonnée à 45 000 Dirhams à l'hectare, non seulement le chiffre de 100 % (cas de l'agriculture solidaire) correspondra enfin à la réalité, mais son caractère unique, liée à la pérennité, l'aide financière deviendrait un soutien totalement efficace et constituerait un véritable investissement pour atteindre, développer et pérenniser tous les objectifs du Plan Maroc Vert. L'amélioration ainsi obtenue, y compris quant à la production, aurait pour effet immédiat de revaloriser, en priorité, les terroirs exposés à l'aridité et à la sécheresse, de conquérir d'immenses superficies, de rendre une certaine dignité au petit agriculteur qui, avec cette aide unique deviendra un investisseur responsable. Enfin, cette solution, adossée à toutes les autres économies d'échelle, encouragera les jeunes générations à poursuivre le travail de leurs pères pour garantir les attentes du Royaume en matière de sécurité alimentaire, dans tous les sens du terme. *Président du Groupement associatif FP4S (www.FP4S.ma)