«C'est la première fois que je vois Paris comme ça et ça fait peur. Tout le monde est en panique, les gens ne se regardent même pas». Au lendemain du noir « Vendredi 13 », la ville lumière était triste, meurtrie, et ses rues sont désertées. Des mots traduisent l'effroi mélé à l'incrédulité de la situation. La nuit du vendredi 13 novembre 2015, restera comme l'une des plus sombres de l'histoire de France. Huit attaques perpétrées par des terroristes liés au groupe Etat islamique ont mis à feu et à sang Paris et Saint-Denis dans six endroits différents. Laissant un bilan effroyable d'autant plus que provisoire: 129 morts et 352 blessés, dont 99 dans un état grave. Le Stade de France, des restaurants et le Bataclan ont été visés par les assaillants. Quatre hommes lourdement armés ont tiré sur la foule dans la salle de concert avant de prendre les spectateurs en otages. C'est ici que l'on compte le plus de victimes. Ce samedi, quelques heures après ces terribles événements, les Parisiens se recueillent. Des premières explosions au Stade de France aux attaques dans Paris, puis à la revendication de Daech, ces quelques heures resteront dans l'histoire. Les fusillades et explosions éclatent vendredi soir quasi simultanément autour du Stade de France, à Saint-Denis, et dans l'est de Paris. 129 personnes sont mortes et 352 sont hospitalisées, dont 99 en «urgence absolue». Entre 21h20 et 21h53: trois explosions retentissent autour du Stade de France, à Saint-Denis, près des portes D et H et rue de la Cokerie, pendant le match amical France-Allemagne, disputé devant 80.000 spectateurs. Une personne est tuée ainsi que trois kamikazes. Une, puis deux détonations se font entendre mais le match continue. Les joueurs et les spectateurs ignorent ce qui se passe au dehors, comme en témoigne Christophe qui l'apprend en sortant, alors que son fils, «inquiet», l'appelle au téléphone. Un chauffeur privé qui attendait la fin du match aux abords du stade est «touché par un éclat de bombe à la cuisse», atteste son employeur. Il est opéré dans la nuit. -21h25:fusillade à Paris à l'angle des rues Bichat et Alibert (Xe arrondissement). Face à face, le bar Le Carillon et le restaurant Le Petit Cambodge sont visés par des tireurs qui sortent d'une Seat type Leon noire. Des lieux très fréquentés par les jeunes Parisiens et les étrangers. Vitrines et terrasses sont criblées de balles, le sang abonde sur le trottoir, il y a quinze morts. Une centaine de douilles sont retrouvées sur la chaussée. Des survivants décrivent des scènes «irréelles», des corps «en pièces détachées». «C'était surréaliste, tout le monde était à terre, personne ne bougeait», relate une femme. Marie-Laurence, une habitante du quartier . - 21h32: rue de la Fontaine-au-Roi (XIe arrondissement), à proximité de la place de la République, cinq personnes sont tuées près d'une pizzeria, La Casa Nostra, et du bar À la bonne bière. Deux jeunes filles qui logeaient à l'auberge de jeunesse voisine, sont abattues devant les yeux de Stéphane, un riverain sexagénaire qui rentrait chez lui. «J'ai vu une voiture s'arrêter et deux ou trois types sortir de chaque côté et tirer de part et d'autre de la chaussée avec des armes automatiques», raconte-t-il, traumatisé. Une Seat Leon noire est également aperçue sur les lieux. Stéphane filme la scène avec son téléphone portable, où l'on voit des policiers entrer dans le restaurant à la poursuite des assaillants. L'un se réfugie au numéro 2 de la rue, selon plusieurs témoins, dont le patron de La Casa Nostra. - 21h36: tirs rue de Charonne (XIe arrondissement) au restaurant «La Belle Équipe». Dix-neuf personnes sont tuées. Toujours la Seat Leon noire. - 21h40: boulevard Voltaire (XIe arrondissement), l'un des kamikazes qui porte une ceinture explosif se fait exploser au Comptoir Voltaire. Une personne est grièvement blessée. -21h40: une Polo noire arrive devant le Bataclan. De nombreux coups de feu sont tirés. Dans la salle de spectacle, où se déroule un concert de rock, plusieurs hommes armés, à visage découvert, ouvrent le feu aux cris de «Allah Akbar», et prennent les 1500 spectateurs en otages. Ces derniers vivent une scène d'horreur pendant plus de deux heures, un témoin parle de l'un des assaillants comme d'une «machine à tuer» qui «abattait méthodiquement les gens à terre». Un autre les décrit: «L'un avait l'air d'un jeune type, une petite barbe de trois jours. L'autre était rasé de près, portait des petites lunettes et une sorte de béret jaune. Il portait aussi ce que j'ai pris pour un gilet pare-balles: c'était en réalité une ceinture explosive». -22h30:François Hollande, qui a été évacué du Stade de France, où il assistait au match, se rend au ministère de l'Intérieur pour faire le point sur la situation. Le parquet antiterroriste se saisit de l'enquête. - 23h43:Les hôpitaux de Paris déclenchent le Plan blanc d'urgence et de crise, un dispositif de «mobilisation maximale». Le bilan humain monte de minute en minute. On parle alors de 35 morts. - 0h01:François Hollande annonce l'instauration de l'état d'urgence sur tout le territoire, une première depuis plus de cinquante ans. - 0h15: un Conseil des ministres exceptionnel se réunit à l'Élysée. Une large part de la classe politique suspend la campagne pour les régionales dans un mouvement d'unité nationale. Dans les rues de l'Est parisien, les Parisiens, hagards, cherchent à rentrer chez eux. Plusieurs stations de métro sont fermées. -0h20: la BRI et le RAID lancent l'assaut au Bataclan. L'opération se termine à 01 h 11. Au moins 89 personnes sont mortes. Les quatre assaillants sont tués, dont trois en actionnant leur ceinture d'explosifs. - François Hollande se rend au Bataclan avec le premier ministre, Manuel Valls, et les ministres Bernard Cazeneuve (Intérieur) et Christiane Taubira (Justice). Un point est fait dans un café proche par le chef des pompiers, avant l'arrivée de la maire de Paris, Anne Hidalgo (PS), et du président de l'Assemblée nationale, Claude Bartolone (PS).