targuer sur la scène politique intérieure, il ne va pas manquer de célébrer l'accès progressif de son pays à 150 milliards de dollars d'actifs gelés à l'étranger, après la levée des sanctions, ainsi que le retour de son pays sur le marché pétrolier. Même les Russes sont de la fête, car pour donner leur bénédiction à cet accord, qui ne va pas manquer de se traduire, à terme, par l'apparition d'un nouveau concurrent sur le marché international des hydrocarbures, sur lequel les prix sont déjà bas, ils ont dû bénéficier de conséquentes compensations en termes de contrats commerciaux avec l'Iran. Il va sans dire que le premier ministre sioniste, Netanyahu, est fou de rage. Il sait très bien que ces menaces de mobiliser les congressistes américains ne lui seront pas de grande utilité. Il en a trop fait, pendant trop longtemps, et il a fini par perdre la partie. Le nouveau Moyen Orient, né à Vienne, fait une autre victime collatérale, l'Arabie saoudite, alliée stratégique du Maroc. Car les Saoudiens savent pertinemment que les négociations entre les chefs de la diplomatie américain, John Kerry, et iranien, Javad Zarif, n'ont pas porté seulement sur le dossier nucléaire, mais aussi et surtout sur la nouvelle carte du Moyen Orient. La cruelle vérité est que la récente autosatisfaction américaine en hydrocarbures a fait que le Moyen Orient ne représente plus le même intérêt géopolitique qu'auparavant. Le mieux qu'en attendent désormais les Etats-Unis est qu'il ne soit plus pour eux source de soucis. Téhéran fait tapis persan Les supputations médiatiques sur une secrète acquisition par l'Arabie saoudite d'une bombe nucléaire auprès du Pakistan n'a strictement aucune importance. C'est, au mieux, une arme de dissuasion, inutilisable en réalité, en raison des conséquences catastrophiques incalculables qu'entraînerait automatiquement son emploi sur le pays qui aurait la folie de s'y risquer. Or, sur l'échiquier moyen-oriental, l'Iran avance ses pions à visage masqué, elle étend sa zone d'influence par proxy interposés, imposant de la sorte à ses adversaires régionaux les conditions d'affrontement qui lui sont les plus favorables. Les courants sunnites les plus vindicatifs envers les chiites ont, ainsi, inconsciemment servi au mieux les intérêts de l'Iran perse, qui s'est érigée en protecteur régional des communautés chiites arabes du Moyen Orient, devenues, de la sorte, redevables, donc fidélisées. Les Gardiens de la révolution iraniens ont discrètement essaimé dans la région partout ou ils le pouvaient et le Hezbollah libanais crie haut et fort ses relations exceptionnelles avec Téhéran. Pendant ce temps, les organisations radicales sunnites, d'abord Al Qaëda et maintenant Da'ech, ciblent directement le Royaume saoudien... La question palestinienne dans tout ça ? Le Hamas palestinien a fait le jeu du courant dit réformateur iranien en prenant position contre le régime syrien de Bachar Assad, allié inconditionnel de l'Iran. Il n'en fallait pas plus pour que les Iraniens considèrent qu'ils ne sont plus tenus de continuer à se mettre l'Occident à dos en raison de leur soutien à certains groupes armés palestiniens. Si l'application de l'accord entre l'Iran et le groupe des « 5+1 » (Etats-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni et Allemagne) se déroule sans accrocs, il est à prévoir la disparition prochaine de la scène politico-médiatique du Moyen Orient de bien des grands noms du « front de la résistance ». Même si Netanyahu crie au feu, ça ne veut pas dire que les Etats-Unis n'ont pas tenu compte de la sécurité de leur grand allié régional lors de la négociation des clauses de l'accord avec les Iraniens. De Roosevelt à... Poutine ! Rien ne porte à croire, non plus, que les Américains vont laisser tomber leur allié saoudien. Même si ce dernier semble avoir déjà pris la mesure des profonds chamboulements géopolitiques en cours au Moyen Orient, en s'ouvrant sur la Russie. La visite du Prince Mohammed ben Salman, second prince héritier et ministre de la Défense d'Arabie saoudite, en juin dernier à Moscou, la signature d'un accord avec la Russie portant sur la construction de 16 centrales nucléaires en Arabie saoudite, tout semble indiquer que Ryad a décidé de ne plus garder tous ses œufs dans le panier du pacte de Qincy, conclu en 1945 entre le Roi Ibn Saoud et le président Franklin Roosvelt, renouvelé en 2005 pour soixante autres années. En deux jours, donc, le monde a profondément changé d'aspect à travers la signature des deux accords susmentionnés. L'Union européenne a cessé d'exister en tant que rêve des peuples européens pour un avenir plus prospère, pour subsister en tant que contrainte qui fait fi des attentes de ces peuples. Au Moyen Orient remodelé, l'Iran s'apprête à reprendre le rôle géopolitique auparavant joué par le Shah déchu, le régime des Ayatollahs se voyant bien comme nouveau gendarme régional. Aujourd'hui comme hier... En ces temps de profondes incertitudes que subissent les pays arabes alliés du Maroc au Moyen Orient, le raffermissement de la politique africaine du Royaume constitue, de facto, celle de l'aile maghrébine et ouest-africaine du monde musulman, caractérisé par le fait qu'il est à la fois sunnite et majoritairement modéré, même si également victime du takfirime jihadiste, idéologie importée d'Orient. Au crépuscule de l'empire Abbasside, califat sunnite placé sous tutelle par la dynastie perse chiite des Bouyides, le Maroc avait déjà joué le rôle de gardien de l'orthodoxie sunnite dans l'ouest du monde musulman, du temps des Almoravides, qui reconnaissaient l'autorité religieuse du Calife de Baghdad. De nos jours, l'institution de l'Imarat Al Mouminine est détenue par la dynastie chérifienne des Alaouites, un atout majeur car à très forte charge doublement symbolique. Descendant du Prophète (sws), le personnage de SM le Roi, Commandeur des croyants, jouit d'une aura de respectabilité même auprès des chiites. Entre un euro devenu radioactif pour les peuples du sud de l'Europe et la reconnaissance officielle de la radioactivité, déjà ancienne, de l'Iran, il s'agit de se frayer un chemin protégé de toute contamination.