La langue, cet admirable outil d'interaction, de communication et d'appropriation des savoirs, est un monde de culture comme il en existe peu d'autres. Son territoire bouillonne, et par ses propres spécificités se grave au gré de substances qui en dépendent. Univers archéologique, cosmos biologique, monde théologique ou astrologique, tous sont griffés, simultanément, par des touches singulières. La langue est sculptée de même par des sons, lettres, mots, phrases, ainsi que des dispositifs d'ordre typographique, pauses allongée (points) ou de légères pauses (virgules)... condiments nécessaires aux rythmes, musicalisation du discours, ou tout autre accessoire qui s'y rattache. Les repères connectés à un domaine particulier, si multiples, si variés, sont à cultiver, à apprivoiser du point de vue de leur nature et de leur tendance ou mode d'usage, dans la perspective d'une maitrise édifiante. Apprécier le verbe comme ce qui est transcrit, concevoir les mouvements d'une langue, impliquent la connaissance de diverses normes. Il va de soi que pour être à même de bien croustiller un domaine, il convient d'être en phase avec ses exigences. Le domaine de la langue s'affiche désormais préoccupant, problématique, crucial de notre temps. Une situation face à laquelle le public scolaire apparaît ostensiblement déboussolé, faute d'un dispositif apte à s'accommoder logiquement aux rouages de la langue (français). Les espaces d'enseignement abritent un état de langue inquiétant, flagrant, qui laisse à désirer, ce que nos autochtones pédagogues ne démentiraient point. Toujours est-il nécessaire de souligner ici, à titre illustratif, des observations qui interceptent constamment l'attention. Plusieurs actes révèlent des obstacles qui surgissent à répétition dans l'utilisation de la langue. Le phénomène affecte, selon des observations, aussi bien les classes de langue que les autres disciplines. D'ores et déjà, on peut souligner quelques-unes de ces malheureuses réalités qui encombrent, parasitent largement aussi et significativement, la sphère du monde de l'enseignement. A tort ou à raison, les apprenants semblent se heurter à de grandes difficultés dans l'identification et le repérage des segments de langue. Ils ont du mal à sentir vibrer un verbe ; du mal à reconnaître aussi justement la silhouette d'un nom ou comment se colorie, se dessine un adjectif ; comment se dresse ou se case un complément ; comment différencier l'accessible directement sans détour, connu communément comme le COD, de l'accessible indirectement, appelé COI et transitant par un lien d'articulation. Ils peinent aussi lourdement à griffonner leurs idées, avec l'exactitude des règles de la phrase. Laquelle phrase est souvent désertée par le sujet, faiseur d'action, ou le verbe, quand elle n'est pas juste boudée par les deux. On n'hésitera pas non plus à emprunter le chemin le plus long pour étaler des dires qui pourraient être exprimés, sans trop de peine, très brièvement.L'université est pourvue d'un certain public qui aime, à longueurs de phrases, à disserter de mots on ne peut plus compliquer, qui demanderaient généralement plus qu'un Larousse ou qu'un Petit Robert pour comprendre. A y recourir, cela fait bien. « Ça en jette ! ». Les fragments de discours qui pleuvent en abondance, de réalisation hautement décontractée, stylistiquement relâchés, n'aspirent qu'à un seul souci, celui de fanfaronner, d'enflammer les autres, la classe, l'auditoire. Lequel auditoire n'hésite pas à tout mettre en œuvre au profit de l'interception des sens. Faute de mieux, le public reste bouche bée. Le chef d'orchestre devra procéder à l'accordage des sons des instruments. Des mots sont utilisés, au besoin, au prix de l'ignorance du sens. Des mots errants.. Les mots ou les phrases errent, se déplacent sans pilote de ligne. Les énoncés s'inaugurent sans majuscule, s'arrêtent de couler, ni point ni clôture. Les limites, pauses légères, censées rythmer les phrases, absentes sans espoir de retour. Les divorces par consentement ou non, entre espaces vides et paragraphes n'ont guère droit de cité, mais comme intimement liés jusqu'au bout d'un tapis roulant, d'allure sans fin. Dans l'écriture, les lettres sont fidèles à tel point qu'elles se ressemblent, se confondent. Difficile de distinguer le a du o, le b du f, le l du t ...du noir sur blanc ressemble souvent à l'illisible. La question de la langue se pose de jour en jour, d'une ampleur, d'un rythme effrayant. Qu'il s'agisse de l'école primaire, du collège, lycée, ou de la sphère universitaire. La question pourtant est d'un grand enjeu. De nos jours on s'accorde à reconnaitre qu'il existe une indéniable corrélation entre réussite et maitrise de langue. Les temps sont durs. Les interrogations scolaires sont servies, garnies de subtils pièges, appelés consignes. Lesquelles consignes ne peuvent s'exécuter correctement sans maitrise de l'outil langue, avant toutes choses. Indiscutablement, la langue serait la Clef de tous les savoirs. Le mal se manifeste au-delà de nos frontières. Paradoxalement, la France, pourtant berceau de cette culture linguistique, française, en pâtit sérieusement, au vu de l'état de la langue de ses universitaires. Les universités s'alarment. Des problèmes de langue sur différents plans, vocabulaire, syntaxe, orthographe poussent. La raison principale ? Les nouveaux arrivants en facultés ont eu moins de cours de français. Pour y remédier, des cours de rattrapage sont mis en place, des cours en ligne, de cours de soutien, en petit groupe, en ateliers sur place et le nouveau dispositif est obligatoire. Telles sont les principales stratégies auxquelles s'adonnent ces universités de l'hexagone, pour stopper cette si coriace épidémie. A méditer !