Le Parlement libyen reconnu par la communauté internationale a décidé, lundi 23 février, de suspendre sa participation au dialogue parrainé par l'ONU, qui devait se dérouler au Maroc, pour tenter de trouver une solution au conflit en Libye. La Chambre des représentants a voté en faveur de la suspension de sa participation au dialogue, a annoncé le député Issa al-Aribi, sur sa page Facebook, sans plus de précisions. Mais il a précisé qu'elle intervenait "après les attentats terroristes de vendredi à Al-Qoba", ville située dans l'est de la Libye, qui ont fait plus de 40 morts et ont été revendiqués par la branche libyenne de Da'ech. Un autre député, s'exprimant sous couvert de l'anonymat, a expliqué cette décision par la crainte de pressions de la part de la communauté internationale pour intégrer des islamistes dans un futur gouvernement d'union. Un nouveau round de discussions était prévu, le jeudi 26 février, au Maroc, à l'invitation de la Mission d'appui des Nations unies en Libye (Manul), entre représentants du Parlement élu et reconnu et ceux de son rival, le Congrès général national (CGN), le Parlement sortant qui a été réactivé par la coalition Fajr Libya (Aube de la Libye). Livrée aux milices et plongée dans le chaos, la Libye est dirigée par deux Parlements et deux gouvernements rivaux, l'un est proche de la coalition de milices Fajr Libya qui contrôle la capitale Tripoli et l'autre est reconnu par la communauté internationale et siège à Tobrouk (est). Des représentants des deux Parlements avaient tenu le 11 février à Ghadamès, dans le sud libyen, des discussions «indirectes» sous l'égide de l'ONU, les premières du genre depuis le lancement du dialogue national fin septembre 2014. Le chef de la Manul, Bernardino Leon, avait consulté séparément les délégations, soulignant que le but était de parvenir à un accord sur la formation d'un gouvernement d'union. D'autre part, deux bombes ont explosé, dimanche 22 février, à trente minutes d'intervalle devant la résidence de l'ambassadeur d'Iran dans le centre de Tripoli. L'aéroport de Labrak a quant à lui été visé par une attaque à la roquette, dans la nuit du vendredi 20 au samedi 21 février. Les attentats perpétrés contre la résidence de l'ambassadeur iranien à Tripoli et contre l'aéroport de Labrak, dans l'est du pays, illustrent l'ampleur de l'insécurité qui prévaut actuellement en Libye et l'emprise des groupes terroristes. Des membres affiliés à l'organisation terroriste Da'ech ont revendiqué ces attentats qui se sont produits à quelques heures d'intervalle. La première attaque a ciblé l'aéroport de Labrak, situé dans l'Est du pays. D'après les sources sécuritaires locales, le terminal aérien aurait été touché par des roquettes. Le second attentat a eu lieu contre la résidence de l'ambassadeur iranien à Tripoli. Deux bombes de faible puissance ont explosé à seulement quelques minutes d'intervalle, ravageant le portail et l'intérieur de la résidence. Le double attentat n'a pas fait de victimes, selon des sources des services de sécurité. Une première bombe a explosé devant le portail de sécurité et la seconde a été jetée dans l'enceinte de la résidence. L'Iran a suspendu ses activités dans la capitale. La porte parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Mardia Afkham, a condamné l'attentat dans un bref communiqué. L'ambassade iranienne a été fermée, à l'instar de la plupart des représentations étrangères depuis l'été dernier, en raison des violents combats ayant conduit à la prise du contrôle, en août 2014, par la coalition de milices Fajr Libya (Aube de la Libye), de la capitale et de son aéroport international. La capitale libyenne est désertée par la majorité des diplomates étrangers. Ces deux attaques terroristes, qui n'ont fait aucune victime, reflètent la situation chaotique dans laquelle est plongée la Libye depuis plusieurs mois. De nombreux experts s'accordent à dire que les combattants de Da'ech exploitent l'instabilité qui règne dans le pays pour ancrer leurs positions. "Les soldats du califat État islamique ont visé l'ambassade iranienne à Tripoli", a déclaré le groupe fondamentaliste dans un communiqué publié sur Twitter accompagné de photos. Les islamistes ont également revendiqué la responsabilité du tir d'une roquette Grad sur l'aéroport de Labrak, principale porte d'entrée pour l'Est libyen et Bayda où siège le gouvernement libyen du premier ministre Abdallah al Thinni, reconnu par la communauté internationale. Son gouvernement, et la Chambre des représentants, élue en juin, travaillent de l'Est, les députés sont à Tobrouk, depuis la prise de la capitale, en août dernier, par Fajr Libya. Le groupe, association de milices originaires de la ville de Misrata, dans l'est de la Libye, a remis en place l'assemblée législative précédente et instauré un gouvernement rival. Le mois dernier, des personnes se revendiquant de Da'ech ont pris d'assaut l'hôtel Corinthia à Tripoli, tuant cinq étrangers et quatre Libyens. Les partisans de l'EI se sont également emparés de bâtiments administratifs et universitaires à Syrte, la ville d'origine de Mouammar Kadhafi, ont annoncé des habitants. Pour marquer leur présence, les groupes jihadistes ayant proclamé leur allégeance à l'organisation dirigée par Abou Bakr Al Baghdadi, ont ainsi commis durant ces dernières semaines de nombreux attentats terroristes. En janvier dernier, une attaque à l'explosif contre l'ambassade d'Algérie à Tripoli a été également revendiquée par Da'ech. Cependant, Da'ech n'est pas le seul fauteur de troubles en Libye. D'autres groupes rebelles présents dans le pays commettent régulièrement des attaques terroristes. Plusieurs attentats ont visé des représentations diplomatiques ces derniers mois, avec notamment l'explosion de deux voitures piégées devant les ambassades d'Égypte et des Émirats arabes unis en novembre. Le dernier incident meurtrier de Da'ech, remonte à seulement quelques jours. L'organisation terroriste a, en effet, revendiqué vendredi la responsabilité d'un double attentat suicide qui a fait plus de 40 morts à Koubbah, dans l'Est libyen. Cet attentat est l'un des plus meurtriers contre des civils depuis le soulèvement de 2011 qui a renversé le dirigeant Mouammar Kadhafi. Il pourrait être une action en représailles aux frappes menées par l'aviation égyptienne, conjointement avec les forces aériennes du gouvernement libyen reconnu par la communauté internationale, contre des cibles de Da'ech à Derna, ville proche de Koubbah. Ces frappes égyptiennes ont été menées après la diffusion dimanche dernier par le groupe fondamentaliste sunnite d'une vidéo montrant l'exécution de 21 coptes égyptiens. Les combattants de Da'ech exploitent l'instabilité qui règne dans le pays qui compte deux gouvernements rivaux.