Après le retrait de la disposition litigieuse, au terme de quatre jours de violences meurtrières, et qui a abouti à l'adoption de la nouvelle loi électorale adoptée en RDC, les craintes des partis de l'opposition se font persistantes car ces formations redoutent de voir le président Joseph Kabila s'accrocher au pouvoir au-delà de 2016. Analyse La question lancinante qui taraude les observateurs, sur la scène politique africaine et plus particulièrement en République démocratique du Congo, est de savoir si le Président Joseph Kabila est-il prêt à quitter le pouvoir au terme de ses deux mandats en 2016 ? Car constitutionnellement, il n'est plus habilité à empiler une troisième. D'ailleurs, la dernière sortie par le parti au pouvoir, à travers la proposition du Parlement de lier le recensement général à l'élection présidentielle en dit long sur les embûches qui pavoisent encore le chemin d'une élection apaisée dans ce pays. En effet, cette opération de recensement allait s'étaler sur quatre ans pour un budget d'un demi-milliard de dollars. Mais le peuple s'est opposé farouchement, durant trois jours, à ce tripatouillage déguisé de la Constitution et la réaction de la communauté internationale ne s'est pas fait attendre. Est-ce à dire donc que le gouvernement de Kinshasa ne va pas trouver d'autres tours de manège à 20 mois des élections présidentielles dans ce pays, grand comme quatre fois la France, quatre-vingt fois la Belgique, une fois et demie plus grand que le Québec (Canada), ou encore grand comme la partie des États-Unis située à l'est du Mississippi. Autrement, il s'agit du 11e État du monde par sa taille avec ses 2 345 409 km. Pour ce qui est de sa richesse minière on a le vertige en parcourant la liste : diamant, or, cuivre, étain, colombo, bauxite, fer, manganèse, charbos, pétrole, gaz méthane, shistes bitumeux et cobalt sans compter le bois et les ressources hydriques. C'est dire l'enjeu. D'ailleurs, l'opposition demande désormais que les dates des consultations soient fixées afin d'éviter tout glissement dans l'agenda élection pour ne pas tomber à un éventuel report de la présidentielle de 2016. Faut-il rappeler, à ce sujet, que l'actuel président, qui a hérité des rênes du pays en 2001 à la mort de son père, Laurent-Désiré Kabila, arrivé à la tête de l'État par les armes, a été élu président pour la première fois en 2006 avant d'être réélu en 2011. Des élections qui ont marquées par des fraudes massives selon des observateurs. De facto, faut-il le répéter, la Constitution lui interdit de briguer un troisième quinquennat. Mais une source proche du gouvernement note que « fondamentalement, le clan présidentiel a la même volonté : rester au pouvoir ». Pis, l'article qui concerne l'organisation des législatives conditionne leur tenue aux résultats d'un recensement général. Il dispose en effet que le nombre de députés de chaque circonscription et de chaque province est déterminé par un calcul impliquant de connaître « le nombre total d'habitants » du pays et des provinces. Or la Commission électorale nationale indépendante (Céni), chargée d'organiser les scrutins et présidée par un proche de M. Kabila, indiquait encore récemment que pour des raisons logistiques et financières, la présidentielle et les législatives doivent avoir lieu le même jour. D'où le cafouillage reste encore dans les dispositions actuelles. C'est pour cela l'opposition prône la vigilance et ses craintes sont bien fondées même si elle ne veut pas jeter l'huile sur le feu. En effet, comme le souligne un diplomate en poste à Kinshasa, le retrait de la disposition contestée « a été un beau tour de passe-passe, beaucoup de gens ont été roulés dans la farine ». Et d'ajouter : « on a le sentiment qu'une crise a été réglée par le Parlement mais qu'à la première occasion les durs du régime recommenceront à agir pour permettre à M. Kabila de rester au pouvoir ». Sous cet angle, l'analyse de Thierry Vircoulon, directeur du projet Afrique centrale du cercle de réflexion International Crisis Group (ICG) est plus qu'édifiante quand il dit : « indépendamment même du contenu de la loi, le calendrier commence à être de plus en plus serré. L'expérience des élections précédentes a montré qu'il faut lancer les opérations électorales un an et demi en avance pour avoir une logistique électorale correctement en place dans un pays de 2,3 millions de km2 ». Tout est dit.