Mabrouk à nos frères algériens la candidature de Abdelaziz Bouteflika pour un quatrième mandat présidentiel ! Puisse-t-il l'obtenir à un score de république populaire et prétendre, dans cinq ans, à un cinquième mandat. Avec lui à sa tête, le pays voisin de l'est va pouvoir avancer au même rythme que la démarche de son président, qui ne va pas manquer de lui insuffler son dynamisme, comme il l'a si bien fait jusqu'à présent. Les téléspectateurs marocains ont pu suivre sur leurs écrans les explosions de «joie» de citoyens algériens, sortis samedi dernier dans les rues d'Alger exprimer leur «satisfaction» d'être gouvernés pendant un nouveau quinquennat par le même président, celui là même qui a fait leur «bonheur» au cours des quinze dernières années. Les scènes étaient très «bouleversantes». De simples citoyens et citoyennes du pays voisin traînés par des éléments antiémeutes, casqués et bottés, et embarqués dans des fourgonnettes, coups de bâtons aidant, histoire d'aller terminer la «fête» populaire en l'honneur du candidat Bouteflika dans l'intimité des cellules de commissariats de police. Sous le slogan, façonné à l'américaine par des experts en marketing politique, «No, he can't !» (Non, il ne peut pas !), les algériens sortis manifester ont tenu à signifier, de manière bruyante, à leur président sortant qu'il n'avait pas à sacrifier le peu de santé qu'il lui reste pour continuer à faire «plaisir» à son peuple. Que même s'il était «irremplaçable», ils préféraient être mal gouvernés par un incompétent que de voir leur courbaturé président septuagénaire se faire violence pour rester à leur service. C'est qu'à son âge, le peuple algérien semble préférer le voir désormais dans un musée d'antiquités, à côté de Massinissa et Jugurtha, plutôt qu'au palais d'Al Mouradia. Sauf qu'avec Bouteflika à sa tête, il n'y a pas besoin d'enseigner l'Histoire de la lutte anti-coloniale en Algérie. Les arrières petits-enfants des Moujahids pourront écouter, en direct à la télévision, Tonton Abdelaziz leur raconter les hauts faits d'armes des fellagas dans le maquis. Il pourrait aussi leur raconter comment ce savoir faire insurrectionnel a été têté au biberon par la génération suivante des maquisards takfiristes. D'ailleurs, Tonton Abdelaziz a vu dans ses jeunes maquisards égorgeurs d'innocents un tel aboutissement du processus «post-révolutionnaire» initié par ses copains du clan d'Oujda au cours de l'été 1962, quand l'aile militaire a éliminé physiquement les dirigeants politiques à l'indépendance, qu'il a fait promulguer une loi juste pour les gracier. Ce serait même le Grand œuvre de sa présidence... Cinq autres années pour Bouteflika à gouverner l'Algérie et ce pays va encore se trouver comme situé à côté d'un trou noir, avec le temps qui s'écoulerait plus lentement pour le voisin de l'est que pour le reste de l'univers. Au bout de cinq ans, temps universel, ce serait comme si cinq minutes seulement s'étaient écoulées pour les Algériens, le pays n'ayant pas changé d'un iota pendant que le reste de la planète s'activait à la vitesse grand V. Et puis, Bouteflika est si bien entouré. Il y a son frère, Saïd, qui a la très enviable réputation de ne pas être affairiste pour un sou. Mais la cerise sur le gâteau, la carte maîtresse du président Bouteflika, sa tête chercheuse, faute d'être pensante, c'est son chef du gouvernement, l'unique, l'incomparable, le sublime Abdelmalek Sellal. Il a tellement frappé les esprits en Algérie, qu'un rappeur a fait une chanson sur lui ! Les «fakakir» ont tant plu au principal intéressé que le rappeur algérien Lotfi double kanon a dû quitter son pays... Ce grand commis de l'Etat voisin, qui a, au cours d'un discours, prévenu les Algériens que Dieu les surveillait individuellement, avec des jumelles, en tenant la «comptabiliti», est particulièrement connu pour sa vivacité d'esprit et la finesse de son propos. A une journaliste chinoise qui l'a salué en arabe, le chef du gouvernement algérien a répondu «salamou alikoum a batata !» (Bonjour patate !) Et ce n'est pas une blague. En matière d'éloquence, Abdelmalek Sellal cisèle ses phrases avec un art d'orfèvre consumé. Admirez l'érudition et la verve d'un grand orateur : « Dès aujourd'hui, on avance chaque jour doucement... Un mariage par là, de la chanson par-ci, de la danse à côté, chacun doit mélanger «el marmita» de manière générale... Comme ça, le 9 avril, à 9 heures du matin... Votre rôle les femmes, est de veiller à ce que le réveil sonne ce jour là à 8 heures du matin... A 9 heures du matin, donc, tout le monde doit être debout et les gens doivent aller semer le chaos (al fawda) devant les bureaux de vote... Pour qu'à midi, on renverse le domino...» ! N'est-ce pas très profond ? Si Aristote avait entendu s'exprimer Abdelmalek Sellal avant de rédiger son ouvrage «La rhétorique», il l'aurait sûrement conçu autrement et plutôt intitulé «Les sellaliades». Avec de telles «lumières» à ses côtés, Bouteflika, dit l'ancien, est bien parti pour «réussir» un nouveau quinquennat, pendant que l'Algérie s'enrobe de toiles d'araignées et de poussières, en attendant sa complète fossilisation. Puisse le quatrième mandat de Bouteflika être aussi lisse que les 1.300 Kms de l'autoroute est-ouest et sa stabilité préservée autant que le Jurassic park d'Al Mouradia, terrain de chasse d'une espèce en voie d'extinction, celle des derniers dinosaures du Maghreb. Actuellement en tournage à Alger et prochainement sur vos écrans, «Abdelaziz Bouteflika ou le secret de la momie». Même son pote d'enfance, le pharaon Toutankhamon, n'est pas arrivé à faire aussi fort !