Le Festival National du Film, appelé autrefois le F.N.F., est né à Rabat en 1982, à l'initiative du directeur du Centre Cinématographique Marocain (C.C.M.), en l'occurrence Kouider Bennani (1976-1986), en collaboration avec les chambres professionnelles (producteurs, distributeurs, exploitants). Le CCM n'était pas à son premier festival car une expérience d'envergure internationale a déjà été tentée à Tanger en 1968 hélas avortée au bout de deux éditions seulement pour des raisons purement politiques. Ce fut la goutte qui avait débordé le vase puisque, suite à cet échec, et en désaccord avec le directeur de l'époque et président du festival, Omar Ghannam, un certain nombre de cinéastes vont démissionner de cet établissement pour évoluer dans le privé. Le FNF, selon le statut original, devait se tenir une fois tous les deux ans suivant le rythme de production en matière de films de long métrage. En plus, il devait être itinérant pour permettre au plus large public de côtoyer la production nationale. Nous sommes à une époque où le film marocain n'est que très peu distribué dans les salles. Pire, certains longs métrages n'ont jamais été projetés sur grand écran. Les villes qui disposaient de structures adéquates et pouvaient accueillir le festival étaient Rabat, Casablanca, Meknès (qui a connu également l'organisation du premier colloque sur le cinéma au Maroc), Tanger, Casablanca encore, Marrakech et Oujda. L'avantage de cet itinérance était, en plus du contact direct entre le public local et les professionnels du cinéma tous corps confondus, la rénovation d'au moins deux salles de cinéma où l'on projette les récents films marocains. Une fois le festival terminé, ces salles restent des lieux de projection potables pour le public local. Aussi, on garde en mémoire les débats houleux mais constructifs entre ces professionnels et les publics pour un meilleur sort du cinéma marocain. Les meilleures propositions concernant notre cinéma venaient justement de ces divers publics. Depuis 2003, une nouvelle politique a vu le jour. Elle s'est déployée sur plusieurs fronts permettant tout d'abord au CCM de centraliser toutes les activités. Les chambres, dont le nombre s'est multiplié d'une manière irrationnelle, sont conviées à titre individuel. Les débats sur le cinéma national sont remplacés par des «leçons de cinéma» sans lien ni avec la réalité locale, ni avec le thème du festival. En plus, ces leçons sont souvent animées par des individus à la compétence douteuse en matière de cinéma en général. Depuis cette date, Tanger est devenue une sorte de Kaaba du cinéma national, où se tient annuellement le festival. Ce changement de périodicité a été facilité par le support numérique permettant la réalisation de films à moindre frais destinés à toute sorte de public moyennant le procédé peu coûteux qu'est le kinéscopage. Par conséquent, la compétition est inondée de films techniquement très en-deçà des normes professionnelles, réalisés par des cinéastes peu soucieux de leur formation. Quant aux courts métrages, souvent «écrits et réalisés» par des cinéastes en herbe, ils sèment un réel doute sur le devenir du cinéma national car dans leur plupart, dénués de toute création viable. Du moins pour le moment.