Un double attentat à la voiture piégée a fait samedi 43 morts et de nombreux blessés à Reyhanli, une ville du sud-est de la Turquie dont le gouvernement a accusé la Syrie voisine d'être impliquée dans cette agression. L'attaque est venue renforcer les craintes existantes de voir la guerre civile entre insurgés et forces loyales à Bachar al Assad déborder du strict cadre syrien et contaminer les Etats voisins. L'attentat s'est produit dans plusieurs rues proches du quartier commerçant de Reyhanli en début d'après-midi, détruisant des voitures et des bâtiments dans cette localité de la province d'Hatay qui abrite de nombreux réfugiés syriens. Des restaurants et des cafés ont été détruits et des dégâts ont été recensés sur trois pâtés de maison à partir du lieu de l'explosion. Le régime de Bachar al Assad fait partie des «suspects», a affirmé le vice-Premier ministre Bulent Arinc. «Nous savons que les gens qui ont trouvé refuge dans la province d'Hatay sont devenus des cibles pour le régime syrien», a dit Arinc à la télévision turque. «Nous pensons à eux (aux Syriens) comme des à suspects évidents lorsqu'il s'agit de fomenter une attaque aussi horrible», a-t-il poursuivi. Un autre vice-Premier ministre, Besir Atalay cité par la chaîne NTV, a expliqué que les premiers éléments de l'enquête suggèrent que les agresseurs venaient de Turquie mais qu'ils avaient des liens avec les services de renseignement syriens. Démenti syrien Le régime syrien a démenti dimanche toute implication dans le double attentat qui a fait 46 morts dans une localité turque frontalière, réfutant ainsi les accusations d'Ankara. «La Syrie n'a pas commis et ne commettra jamais un tel acte car nos valeurs ne nous le permettent pas», a affirmé le ministre syrien de l'Information, Omrane al-Zohbi, dans une conférence de presse retransmise à la télévision publique. «Nous avons été attristés par la mort de martyrs» samedi dans la localité de Reyhanli, dans le sud de la Turquie, près de la frontière avec la Syrie, a ajouté le ministre. «C'est (Reccep Tayyib) Erdogan qui doit être questionné sur cet acte (...). Lui et son parti en assument la responsabilité directe», a poursuivi M. Zohbi, qualifiant le Premier ministre turc d'»assassin». Le double attentat de Reyhanli est l'attaque la plus meurtrière enregistrée en Turquie depuis plusieurs années, et en particulier depuis le début du conflit enSyrie voisine en mars 2011. Le gouvernement turc, ancien allié de Damas, soutient désormais l'opposition et les rebelles contre le président Bachar al-Assad. Le ministre turc de l'Intérieur, Muammer Güler a annoncé samedi que les auteurs du double attentat étaient liés à des organisations proches du régime syrien. «Les personnes et l'organisation qui ont mené (l'attaque) ont été identifiées. Il a été établi qu'elles étaient liées à des organisations soutenant le régime syrien et ses services de renseignement», a-t-il assuré. Condamnations et solidarité La France et les Etats-Unis ont fermement condamné ces attaques et ont assuré le peuple et le gouvernement turcs de leur soutien. Le secrétaire général de l'Otan, Anders Fogh Rasmussen, et le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius ont exprimé une «complète solidarité» avec la Turquie. Ces attaques sont les plus meurtrières intervenues sur le sol turc depuis le début de l'insurrection syrienne il y a plus de deux ans. Pour Ahmet Davutoglu, ministre turc des Affaires étrangères, il n'y a pas de coïncidence entre ces attentats et le fait que les efforts diplomatiques de la part des Etats-Unis mais aussi de la Russie, alliée fidèle de Damas, s'intensifient pour parvenir à une solution au conflit. «Il y a ceux qui voudraient saboter la paix turque mais nous ne laisserons pas faire ça», a dit Davutoglu en visite en Allemagne. «Personne ne devrait essayer de tester la puissance de la Turquie», a-t-il ajouté. Le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan n'a pas non plus été catégorique. Pour lui, ces explosions ont peut-être partie liée avec les événements en Syrie ou bien visent à s'opposer au processus de paix entre l'Etat turc et les séparatistes kurdes. «Nous entrons dans des périodes délicates, nous avons ouvert une nouvelle page, le processus de résolution de la question kurde. Il se pourrait bien que ceux qui ne peuvent pas supporter cette nouvelle ère(...)se livrent à de tels actes», a-t-il dit. «Autre question sensible, la province de Hatay (où ont eu lieu les explosions) est située à la frontière avec la Syrie, et ces actes pourraient avoir été commis pour fragiliser la situation», a-t-il continué. Le ministre de l'Intérieur Muammer Guler avait précisé un peu plus tôt devant la presse que «deux voitures ont explosé, l'une devant l'hôtel de ville et l'autre devant la poste de Reyhanli».