L'artiste peintre Souad Byad (vit et travaille à Casablanca) expose ses œuvres récentes jusqu'au 9 décembre courant à la galerie de Mega Mall de Rabat. Elle a su par sa sensibilité et son genre néo figuratif interpréter magnifiquement ses impressions et ses états d'âme. Ni purement figuratives, ni plutôt abstraites, ses œuvres oniriques sont faites de touches successives, relatant ses vécus et ses rêves, le tout en mouvement et en profondeur, ce qui caractérise son approche picturale qualifiée de « nouvelle figuration expressive ». Le caractère exceptionnel des œuvres expressionnistes de Souad émane d'une recherche plastique consistante basée sur des motifs saisis sur le vif, avec une grande sensibilité chromatique et maîtrise picturale. Vivacité des touches successives, à l'instar de la technique fauve, le mouvement de la composition, les atmosphères dénuées de l'exotisme et dépouillées de tout détail anecdotique, la magie de la lumière et la rhétorique du corps procurant le rêve: telles sont les composantes de l'acte créatif conçu par cette artiste peintre qui n'a cessé d'exercer sa fascination picturale sur le public avisé. Loin de toute tendance occidentalisée, sa peinture extatique et introspective s'inscrit dans une actualité intemporelle .Elle n'est pas à indexer à une quelconque courant de l'art figuratif ou dit à tort « orientaliste ». L'objet devient ainsi prétexte aux jeux innombrables de combinaisons qui s'offrent au regard, telles des partitions musicales au rythme latent. Souad capte et restitue en couleurs magiques la beauté apparente et latente du corps, dans une gestualité débordante et fluidité chromatique surprenante. Après avoir dépassé l'esprit restreint de la figuration et de l'abstraction qui semblent avoir atteint leurs limites à l'étranger, l'artiste remet en question les mouvements picturaux passés et présents, en élaborant avec certitude et maîtrise un langage plastique qui engendre par son contenu esthétique une nouvelle vision du corps loin de toute sensualité séductrice. La dimension absracto-figurative de ses tableaux ne se borne pas à une simple énonciation expressive, mais implique la notion de rêve liée à celle de représentation subjective. L'artiste met en toile les fragments du corps et détourne son sens au pluriel qu'il perçoit et perturbe la lisibilité immédiate de son oeuvre qui connote très souvent la chaleur et les atmosphères humanisées. L'élément référentiel de base est pour Souad les traces de la mémoire, les couleurs du rêve et la polyformité des tâches juxtaposées à travers un traitement stylistique évoquant la technique de l'équidensité et de la transparence. L'artiste nous invite à contempler ses réminiscences dont le point de base est le sens fugace et la métaphore du corps qui ne perd pas son identité pour se muer en impressions vagues, à la limite de la visibilité. On assiste ainsi à une scénographie double dont la démarche plastique repose sur deux unités visuelles: celle de la liberté gestuelle, voire lyrique et celle moins libre et plus conditionnée de l'usage structuré des contours. Avec sa nouvelle aventure plastique, Souad valorise la dimension profonde de « là et maintenant ». Sa peinture néo-figurative nous révèle l'esprit de ses investigations; esprit qui s'adonne avec la passion d'une poétesse à la création plastique où s'exprime en profondeur le registre de sa sensibilité d'artiste chercheur. Elle nous propose un monde semi abstrait inhérent à sa vision des choses et des êtres. Son procédé technique repose sur les contrastes, la vie des silhouettes, les lumières des ombres et les valeurs chromatiques généreuses. Ainsi, ses impressions fugaces émanent d'un état d'âme qui exalte la communication intrinsèque. Métaphore de la vie, la peinture se veut un pacte de sincérité qui étonne et stimule la curiosité visuelle comme un miroir où se reflète la subjectivité au pluriel de toute une sensibilité créatrice dans un monde pavé de toutes sortes de doutes et d'angoisses. Le principe majeur est de donner de l'importance à la texture et à la matière ainsi qu'aux gestes de l'artiste, tout en gérant avec spontanéité et sensibilité l'unification des couleurs et des formes. Bien que matérialité visible, la peinture s'approprie inlassablement la spiritualité du corps et en réinvente la teneur et la dimension. Elle ne cesse de mettre en scène le souffle qui la sous-tend, tendant ainsi à déconstruire la dichotomie si traditionnelle de la couleur et de la trace. Elle-même trace, la peinture de Souad demeure marquée par ce qui fait la communicabilité de l'humain, certes au-delà du message et de l'apriorique du sens, mais au cœur de ce qui érige la trace en image polysémique. Sans aucune prétention théorique, le signe iconique en tant que matrice du langage visuel et support savant du sacré est le corps du sens implicitement et explicitement. C'est un champ pluridimensionnel qui révèle chez Souad une passion pour les traces perceptibles des êtres et des choses. Elle peint une fragmentation vertigineuse du corps, agence son étendue en un mouvement transfuge, volatile et éclaté. Une sorte d'écriture personnelle qui prend forme dans le territoire imaginaire du corps via des ouvertures chromatiques et formelles qui sollicitent l'émergence et la disparition. Cette manière d'interpréter le corps est, à mon sens, révélatrice de la créativité propre à Souad.