Il y a 34 ans, le 22 juin 1978, Haj Ahmed Cherkaoui, un des pionniers du Mouvement national au Maroc, a été rappelé au Dieu. Le combattant Haj Ahmed Cherkaoui, natif de Rabat en 1897, s'était, dès son âge, engagé dans la lutte contre le colonialisme pour s'illustrer, à l'âge adulte, comme l'exemple par excellence du patriotique qui se voue corps et âme à la cause sacrée et consent d'énormes sacrifices pour la Patrie, l'Islam et le Trône. L'indépendance acquise, c'est avec la même détermination et la même abnégation qu'il poursuivit son œuvre de militant dans les différents domaines de la vie politique et sociale. Ayant rejoint la Fonction publique en 1914, il dispensait parallèlement des cours théologiques et faisait le prêche du vendredi. Son choix précoce de contribuer à l'action pour la libération du pays du joug du colonialisme l'avait amené très tôt à cerner la réalité du monde arabo-musulman de son époque et à s'inscrire dans la Commission nationale qui s'était chargée en 1929 de la collecte des aides et subventions au profit de la cause palestinienne. Prodigue en efforts et inlassable, il étendait son action associative à tous les domaines requérant la bienfaisance, de l'émancipation de la femme à la lutte contre l'analphabétisme en passant par l'apprentissage du Saint Coran et le redressement des mœurs. Son apport indéniable dans le domaine de l'enseignement privé, un des outils majeurs de la lutte contre le colonialisme, s'était illustré par la fondation de l'école, portant son nom, érigée dans un premier temps au quartier Akkari avant d'être transférée dans l'ancienne médina de Rabat. Conjointement, il avait contribué effectivement à la fondation de tout un groupe d'établissements d'enseignement privé et l'Histoire inscrit à son actif le développement que ce type d'enseignement a connu du temps où il était membre fondateur à la Commission Royale chargée de l'édification du Groupe des Ecoles Mohammed V, dont il avait occupé le poste de directeur jusqu'après l'indépendance. Il devait ensuite vaquer à la mission de membre à la première Chambre des Représentants en 1963. Mais, le rôle de Haj Ahmed Cherkaoui dans l'épanouissement de l'enseignement ne se limitait pas à la gestion. Le combattant défunt qui s'était occupé dans les années 40, au sein de la Haute Commission du Parti de l'Istiqlal, de la réforme de l'enseignement avait, grâce à ses louables efforts, notamment pour encourager la scolarisation des jeunes filles marocaines, accédé au Conseil Supérieur de l'Enseignement avec l'avènement de l'indépendance. Dans le chapitre de la Résistance, ce combattant hors pair qui avait formé la cellule à laquelle avait appartenu le Héros national Allal Ben Abdallah, avait, dès 1930, connu la prison et l'exil à Marrakech pour avoir joué un rôle majeur dans les événements provoqués en réaction au Dahir berbère. De retour à Rabat en 1933, il avait pris la tête d'une manifestation qu'il avait lui-même lancée lors d'un prêche qu'il avait prononcé à la Grande mosquée contre la censure de la presse par le colonisateur. Arrêté, il purgea une peine de six mois dans la prison de Laâlou. Ses retours en prison seront fréquents, car il était de la trempe de ceux qui ne craignaient pas le sacrifice une fois habités par une grande cause. Le 25 octobre 1934, c'est chez-lui que sera fondé le Comité de l'Action Nationale qui ne tarda pas à élaborer et présenter, au Sultan Mohammed V et aux autorités coloniales, les revendications du peuple marocain. En octobre 1937, c'est encore chez-lui que se constituera le Parti National. Dans la même année, il fera partie de la délégation qui portera à l'Administration coloniale les réclamations nationales urgentes. Des évènements qui s'en suivirent il découlera son emprisonnement qui dura une année. Il fut ensuite l'un des premiers signataires du Manifeste du 11 janvier 1944, dit également Manifeste de l'Indépendance. A la suite des événements que le Maroc a connus après l'assassinat du syndicaliste tunisien Farhat Hachad, Haj Ahmed Cherkaoui renoua avec la prison suivie de l'exil, cette fois au Sahara où il fréquenta plusieurs lieux de détention. Il ne recouvrira sa liberté qu'avec l'avènement de l'indépendance. Il poursuivra son militantisme éclairé au sein du Parti de l'Istiqlal jusqu'à sa mort, à Rabat, le 22 juin 1978, Dieu ait son âme en Sa Sainte Miséricorde.