Des affrontements ont éclaté dans la nuit de lundi à mardi à Tunis entre les forces de l'ordre et plusieurs centaines de musulmans salafistes qui manifestaient contre une exposition artistique, ont rapporté des témoins. Les protestataires dénonçaient ce qu'ils ont qualifié d'humiliation des musulmans. Les incidents se sont produits dans les quartiers d'Ettadamen et de Sidi Hussein. Des rues ont été bloquées et des pneus incendiés. Les forces de sécurité qui sont intervenues à coup de grenades lacrymogènes et en tirant en l'air ont essuyé des jets de bouteilles incendiaires. Aucun blessé n'était signalé. Des témoins ont précisé que des émeutiers s'en étaient pris à un tribunal du quartier de Sidi Hussein et qu'ils avaient tenté d'incendier un commissariat d'Ettadamen. La veille déjà, des salafistes, tenants d'une application rigoriste de l'islam et de la charia, la loi coranique, avaient fait irruption dans une galerie de La Marsa, un quartier huppé de Tunis, et vandalisé des oeuvres d'art qu'ils jugeaient insultantes. Même si les islamistes tunisiens n'ont pas joué un rôle déterminant dans le renversement du régime de Zine ben Ali, à l'hiver 2010-2011, le débat sur la place à donner à la religion dans le gouvernement et la société fait rage en Tunisie. Dimanche, l'Egyptien Ayman al Zaouahiri, qui a succédé à Oussama ben Laden à la tête d'Al Qaïda, a appelé les Tunisiens à défendre la charia et accusé les islamistes modérés d'Ennahda, le premier parti politique tunisien, de s'être renié et d'avoir trahi l'islam. Ennahda, qui dirige la coalition au pouvoir avec deux partis laïques, est «en train d'inventer un islam acceptable aux yeux du département d'Etat américain, de l'Union européenne ou (...) des pays du Golfe», dénonce-t-il dans un enregistrement sonore.