Le dépôt des candidatures pour l'élection présidentielle en Egypte, dont le premier tour est prévu les 23 et 24 mai, prenait fin hier dimanche dans un climat de confusion autour de plusieurs candidatures invalidées ou en passe de l'être. La Candidature à la présidence d'Egypte d'Ayman Nour a été invalidé par justice administrative égyptienne et la crainte d'une éventuelle invalidation de la candidature de Khairat al-Chater a poussé les Frères musulmans à présenter une second candidat en roue de secours. Enfin le général Omar Souleimane, pendant vingt ans à la tête des services de renseignement sous Moubarak, a décidé lui aussi de se lancer dans la course présidentielle pour répondre à la demande de ses concitoyens. La justice administrative égyptienne a interdit samedi à l'opposant Ayman Nour de se présenter à l'élection présidentielle prévue en mai, bien que le pouvoir militaire ait décidé de lui rendre ses droits politiques, a rapporté l'agence officielle Mena. Le tribunal a jugé que M. Nour ne pouvait être candidat en raison de la loi stipulant que toute personne ayant été condamnée à de la prison doit attendre six ans à partir de la fin de sa peine ou de la date de sa grâce avant de pouvoir retrouver ses droits politiques, selon l'agence. L'avocat de M. Nour, a indiqué qu'il allait faire appel. Le pouvoir militaire avait annoncé fin mars qu'il restituait ses droits politiques à Ayman Nour. Ce dernier a rapidement annoncé son intention de se présenter à l'élection présidentielle prévue les 23 et 24 mai. En 2005, Ayman Nour avait obtenu 7,6% des voix à la première élection présidentielle pluraliste du pays, arrivant ainsi en seconde position après Hosni Moubarak, élu avec 88% des suffrages. Alors chef du parti Al-Ghad, formation d'opposition laïque et libérale, il avait été dans la foulée condamné à cinq ans de prison pour fraude et falsification des documents fournis pour former son parti, des accusations qu'il a toujours récusées. Deux candidats pour les " Frères musulmans" Cette décision pourrait aussi mettre en cause la candidature de l'islamiste Khairat al-Chater, que les Frères musulmans ont choisi pour les représenter dans la course à la présidence. M. al-Chater a été libéré en mars 2011. Il avait été condamné par un tribunal militaire à sept années de réclusion pour des accusations de terrorisme et de blanchiment d'argent. Les Frères musulmans, première force politique d'Egypte, ont annoncé samedi soir avoir décidé de présenter un second candidat à la présidentielle prévue en mai, pour garantir leur présence dans la course au cas où leur premier choix serait invalidé. La candidature de Khairat al-Chater, le numéro deux de la confrérie islamiste, pourrait en effet être menacée. «Nous veillons à la réussite de la révolution (...). C'est pourquoi nous avons décidé, confrérie et parti ensemble, de présenter Mohammed Morsi, le président du Parti de la liberté et de la justice, en tant que candidat alternatif», a indiqué la confrérie sur son site internet, en précisant qu'il s'agit d'»une mesure de précaution». Les Frères musulmans affirment s'être assurés que «la situation légale» de M. al-Chater lui permet de se présenter, notamment après l'avoir faite examiner par une commission d'experts. «Mais celui qui observe le paysage politique voit de nombreux changements rapides, ce qui montre qu'il y a des tentatives de créer des obstacles pour empêcher certains candidats de compléter leur chemin», a estimé la confrérie. Samedi, la commission électorale égyptienne a indiqué avoir reçu la confirmation officielle de la nationalité de la mère de Hazem Salah Abou Ismaïl, qui est devenue citoyenne américaine le 25 octobre 2006, critère qui pourrait rendre le salafiste inéligible. La décision de la commission était attendue pour hier, dimanche. Omar souleimane refait surface Le général Omar Souleimane, chef des services de renseignement d'Hosni Moubarak pendant deux décennies, a entamé samedi les démarches en vue d'une éventuelle candidature pour la présidentielle égyptienne, qui pourrait rebattre les cartes du scrutin. Ephémère vice-président pendant la «révolution du Nil», Omar Souleimane, 74 ans, est celui qui a annoncé le 11 février 2011, dans une brève déclaration télévisée, la démission d'Hosni Moubarak. Il a expliqué son intention de se lancer dans la course en raison de la demande de ses concitoyens s'il obtient les signatures nécessaires de 30.000 supporters dès samedi. L'enregistrement des candidatures s'achève dimanche. Cet homme aussi puissant que discret, qui n'a pratiquement jamais accordé d'interview à la presse, a été pendant vingt ans l'homme de confiance de l'ancien «raïs» pour les négociations délicates, notamment avec Israël et les Palestiniens, et la lutte contre l'islamisme armé. Homme de dossiers, Omar Souleimane est une des rares personnalités de l'ancien régime à ne pas avoir été inquiétée par la justice après la révolution, pendant laquelle il a réchappé à une mystérieuse tentative d'assassinat. Vendredi, des centaines d'Egyptiens ont participé à une manifestation au Caire avec des banderoles l'appelant à «sauver l'Egypte» des islamistes. Mais pour certains défenseurs de la «Révolution du Nil», cette candidature sent la contre-révolution. «La jeunesse ne va pas laisser Oumar Souleimane devenir président. La révolution est encore vivante et nous retournerons place Tahrir s'il le faut», a dit Mohamed Fahmy, un révolutionnaire socialiste, en évoquant la place symbole de la révolte égyptienne au Caire. «Il (Souleimane) devrait être en prison», juge un autre militant pro-démocratie Naouara Negm. Selon un membre du parti de la Liberté et de la Justice (FJP) lié à la confrérie des Frères musulmans, l'armée et des pro-Moubarak auraient affrété des cars pour acheminer des milliers d'employés au Caire afin que Souleimane dispose des 30.000 signatures nécessaires. «Il fait partie de l'ancien régime et il ne dirigerait le pays que sous l'angle sécuritaire», explique Medhat Hadad, du FJP. «Quel type de vision révolutionnaire peut avoir quelqu'un comme lui», s'interroge-t-il.