«Le cinéma en perspective » est le titre d'un ouvrage écrit par le théoricien français du cinéma Jean-Louis Leutrat, celui qui vient de décéder (mort le 29 avril 2011) à l'âge de 70 ans. Celui qui restera comme sur des grands penseurs du cinéma est mort dans le silence, sans le tapage médiatique qui accompagne généralement la mort des stars. Lui, il était d'une toute autre facture. D'abord, agrégé en lettres, Jean-Louis Leutrat s'est ensuite tourné vers l'enseignement et la recherche universitaires. Il a fait de l'analyse filmique son principal objet d'étude. Professeur à l'université Paris 3 à la Sorbonne Nouvelle depuis plus de 20 ans, cet intellectuel érudit a publié de nombreux essais, parmi lesquels : « Le cinéma en perspective : une histoire » (1992), « Splendeur du Western » (2007), « Jean-Luc Godard » : simple comme bonjour » (2004) ou encore « Alain Resnais » (2006). Il a aussi écrit des études monographiques sur des films tels que « Nosferatu » de Friedrich Murnau, « La chienne » de Jean Renoir. « La prisonnière du désert » de Jean Ford, « Ivan le terrible » de Serguel Eisenstein. En outre, il était un collaborateur régulier de « Positif » et « Trafic ». Tel était Jean-Louis Leutrat, honorable intellectuel oeuvrant pour le simple et ultime but d'éclairer les autres sur le cinéma et ses perspectives multiples, sur les films, leurs auteurs et leurs genres, en les analysant avec et pour les autres, étudiants, lecteurs ou critiques. Il partage avec eux la passion du cinéma, celle qui le dévorait depuis sa prime jeunesse, depuis le temps de la cinéphilie pure et parfois dure et payante. Il s'est appliqué à faire du cinéma un véritable cheval de bataille pour conquérir le monde et ses mystères, par le son et par l'image. Son ouvrage : « Le cinéma en perspective » dont le titre est tout un programme, en dit long sur ses préoccupations propres. Elles sont d'ordre idéologiques, philosophiques, politiques, esthétiques et tout à la fois, traduisant de larges connaissances dans divers domaines, avec lesquelles il est capable de percer tous les mystères du cinéma. Avec Jean-Louis Leutrat, on ne cesse d'apprendre dans l'émoi et la fascination. Car à chaque page, Leutrat vous surprend par ses réflexions inédites et originales. Analyste avisé, il décèle les particularités, met en évidence les points forts comme les points forts, face aux films et leurs auteurs. Quand il aborde le western, il ne se limite pas à son histoire et sa géographie comme dans toute approche classique, mais insiste également sur le cadrage et l'allure des personnages, décortique le statut du shériff, du bandit comme celui du juge ou de l'entremetteuse. Rien n'échappe à son regard vigilant et son analyse perspicace au grand émerveillement du lecteur. Sa passion de ce cinéma en perspective, Jean-Louis Leutrat l'a partagée aussi bien avec ses lecteurs pour lesquels il a écrit de nombreux ouvrages, mais aussi avec ses étudiants de la Sorbonne avec qui il savourait la projection des films et leurs analyses. Il y passait le plus clair de son temps entouré d'étudiants aussi passionnés que lui, eux aussi choqués par la signification des images. Plusieurs générations d'étudiants, devenus cinéastes, scénaristes, producteurs ou simples agents d'administration lui doivent une grande partie de leur savoir, lui qui s'est toujours montré généraux et disponible. A l'instar de Georges Sadoul, Christian Metz, Jean Mitry, Christian Bosseno ou même Gilles Deleuze, Jean-Louis Leutrat a laissé une littérature abondante en matière de cinéma susceptible d'éclairer les générations du futur. Grâce à eux, pendant leur vécu ou après leur mort, ils restent présents dans les esprits et s'érigent encore en références incontournables à éclairer les vivants et à les orienter. Pendant des décennies et même plus, les esprits de ces illustres personnes, continuent à subsister parmi nous.