Un rapport réalisé par le syndicat des chevillards affilié à l'Union générale des entreprises et professions (UGEP) ayant trait aux abus et infractions de la société Unluer Maroc chargée de la gestion déléguée des abattoirs, a été adressé aux autorités compétentes. A cette occasion, une conférence de presse a été organisée au siège de l'UGEP à Casablanca le jeudi 9 mars pour décrire cette nouvelle étape de lutte visant à dénoncer la mauvaise gestion des abattoirs et une multitude d'infractions et irrégularités commises à un moment où l'on parle de plus en plus de transparence dans la gestion des biens publics et de bonne gouvernance. Ce rapport accablant qui s'énonce comme un acte d'accusation fait l'historique d'une gestion des abattoirs qui ne cervait pas l'intérêt général des habitants de la ville. Cela depuis 2002 à l'ouverture des nouveaux abattoirs et le lancement d'une gestion déléguée attribuée à l'époque à une société espagnole GVGB, ce qui veut dire que c'est une constante et, du coup, la responsabilité du conseil de la ville et de la tutelle est engagée du moment que le service public n'est pas préservé contre des intérêts particuliers occultes. Les professionnels avaient reproché à la société espagnole le manque de professionnalisme dans l'abattage. Une importante grève avait été déclenchée en 2005 avec un sit-in et la rédaction d'un rapport sur la gestion. La bataille avait duré une année et s'est achevée par l'éclatement du scandale de «perception par la société espagnole de taxes fictives non stipulées dans le cahier des charges et non validées par un arrêté fiscal communal». Les professionnels n'étant pas considérés comme des partenaires à part entière de l'administration comme cela doit être l'esprit de la bonne gouvernance, ils n'avaient pas accès au cahier des charges. Dès qu'ils ont pu avoir accès à ce document, ils ont eu connaissance des dépassements et une multitude d'infractions, ce qui a abouti à la grève de 2007 qui a poussé la tutelle, le ministère de l'Intérieur ainsi que la Cours des comptes à réagir pour dépêcher une commission de contrôle. Le contrat de la société espagnole a été résilié et c'est le 18 mai 2008 que la société turque est entrée en scène. Dans l'actuel rapport du syndicat des professionnels des abattoirs, l'un des plus importants reproches c'est l'absence de professionnalisme du délégataire. A la suite des grèves des professionnels des abattoirs en 2007, la commission de contrôle de la Cours des Comptes, dépêchée aux abattoirs pour constater un certain nombre d'infractions commises par la société délégataire espagnole GVGB, a formulé des recommandations dont l'une des plus importantes est que le professionnalisme doit être le principal critère pour le choix du futur délégataire avec mise en place d'une politique commerciale pour la gestion des abattoirs. C'est justement ce qui n'a pas été pris en ligne de compte par la Commune de Casablanca, souligne le rapport du syndicat. Le contrat de délégation de gestion n'a pas été réalisé avec attention puisque des manquements ont été constatés comme cette aberration qui consiste à octroyer à la société 150 DH par kg de viande incinérée pour ce qui concerne les bêtes mortes dans les étables alors que le kg de viande commercialisé dans le circuit de la consommation est de 70 Dh ! Il s'agit dans ce rapport détaillé de non respect des dispositions du cahier des charges validé par le conseil de la ville et le ministère de l'Intérieur, de l'absence de régulation et de contrôle de la part de la Commune urbaine de Casablanca et de la tutelle, du non respect des délais pour la présentation du programme d'investissement, pour la construction de deux salles de ventes des viandes et abats, de la détérioration du patrimoine des machines et autres infrastructures par manque d'entretien et de maintenance ce qui fait que tout le patrimoine est laissé au vau-l'eau. Le manque de maintenance découle du fait qu'on évite des dépenses au moment où l'entreprise est bénéficiaire. Le plus grave dans la liste des reproches dressés par le syndicat des professionnels des abattoirs, est ce que relève le bureau de contrôle Veritas sur le danger de la négligence et l'incurie relative à l'absence d'entretien et de maintenance de certaines machines dont l'état constitue une menace permanente pour les travailleurs et les habitants des environs des abattoirs surtout l'état dégradé des machines fonctionnant à l'ammoniac avec un stock de 8 tonnes de ce produit dangereux. Le Bureau Veritas conclut à l'interdiction de l'emploi de ces machines à moins de leur faire subir au préalable un test hydraulique ce qui n'est pas effectué ! L'on reproche également le fait que bien que les abattoirs soient dotés d'une station d'épuration les déchets de sangs et autres, ces déchets sont rejetés directement dans les égouts sans tenir compte des graves conséquences sur la pollution et la santé. Par ailleurs, pour les dix ans de contrat de gestion, la société délégataire a présenté un programme d'investissement d'un montant global de 15 millions de dirhams. Dans le rapport du syndicat il est indiqué le caractère dérisoire de ce montant démontrant que compte tenu de la production des seules années 2009 et 2010, soit 51.765 tonnes de viandes rouges, cela donne une recette de bénéfices globale de la société de l'ordre de plus de 50 millions de dirhams, plus exactement 50.212.050 DH. D'autre part, le rapport précise que la Commune a cédé 0,97 Dh par kilogramme au profit de la société Unluer Maroc sachant que la société espagnole prélevait chez les chevillards en contrepartie de ses services seulement 0,72 Dh par kg alors que la société actuelle prélève 1,69 Dh par kg. Le rapport met l'accent sur le manque de régulation, travail de contrôle et de suivi attribué normalement à un service de la commune mais non effectué. Il démontre comment les professionnels ne sont pas écoutés par les responsables. A ce propos, le rapport rappelle comment le président de la commune de Casablanca avait retiré à des syndicalistes leur carte professionnelle afin de les empêcher de travailler. Ceux-ci avaient eu recours à la justice pour avoir gain de cause et lever cette sanction totalement arbitraire.