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40ème anniversaire de la disparition de Abdelkhalek Torrès
Le leader de l'Unité, symbole du patriotisme sincère et engagé, fêté à Kénitra
Publié dans L'opinion le 28 - 06 - 2010

M. Abbas El Fassi : Toutes les tentatives visant à semer les germes de la division et de la dissension sont vouées à l'échec
La ville de Kénitra a abrité, vendredi dernier, un événement exceptionnel, en l'occurrence la commémoration du 40ème anniversaire de la disparition du leader de l'Unité, feu Abdelkhaleq Torrès, le combattant, le militant et l'authentique homme d'Etat qui a jeté les ponts d'une réelle unité entre la résistance dans le Nord et le Sud du pays et conduit le militantisme politique après l'Indépendance.
En décidant d'organiser cette manifestation dans la capitale du Gharb-Chrarda, la signification politique donnée par la direction du Parti de l'Istiqlal à l'événement prend une dimension toute particulière.
Il s'agit, en fait, d'un imposant meeting auquel les Istiqlaliens ont participé en nombre impressionnant. Aussi, la salle de la municipalité de Kénitra a été archi-comble, tout comme l'espace mitoyen. Une présence distinguée a été remarquée de personnalités politiques de nombreuses et diverses tendances, tout comme a été remarquée la présence de la famille du leader de l'Unité dont sa respectable fille Kanza Torrès.
Et c'est dans cette ambiance émouvante que le Secrétaire Général du Parti de l'Istiqlal, M. Abbas El Fassi, a présidé l'important meeting qui a été rehaussé par la présence de M. Abdelkrim Ghallab, membre du Conseil de la Présidence du Parti.
La commémoration a été remarquée par le discours, important, global et émouvant, prononcé par M. Abbas El Fassi et dans lequel il a établi le lien entre les vertus qui étaient celles du leader de l'Unité et les significations profondes qui avaient marqué tous les événements dont il était l'initiateur, notamment la proclamation de la décision historique de l'unité.
La commémoration a été également une occasion pour M. Chiba Maâlaïnine, membre du Comité exécutif du Parti de l'Istiqlal, de déclamer un long et émouvant poème qui a exacerbé les sentiments de l'assistance.
Pour sa part, M. Radouane Hdadou a jeté un éclairage sur le militantisme du leader Torrès pour la libération des villes spoliées Sebta et Mellilia et les îles avoisinantes.
Quant à M. Lahcen Bensassi, il a évoqué dans son allocution la valeur du militantisme du leader de l'Unité au sein de l'institution législative.
L'inspecteur du Parti de l'Istiqlal dans la province, M. Mohamed Hammour, a, quant à lui, prononcé un mot de remerciement au nom des militants (tes) du parti.
Au terme du meeting, M. Abbas El Fassi a présidé la cérémonie de remise des Prix aux gagnants des concours sportifs organisés en la circonstance.
Voici, par ailleurs, la traduction intégrale du discours du Secrétaire Général du Parti de l'Istiqlal :
Mesdames, messieurs,
Nous sommes heureux de commémorer, pour la seconde fois dans la ville combattante de Kénitra, l'anniversaire du décès du Leader de l'Unité, le regretté Abdelkhaleq Torrès, en témoignage de notre reconnaissance de ce qu'il incarnait comme valeurs nobles et consentit, avec sincérité et abnégation, pour la libération de la Patrie, ainsi que pour ses positions historiques et ses grands sacrifices pour la défense de l'unité nationale et l'intégrité territoriale du pays.
Le Leader de l'Unité était, en effet, un des jeunes pionniers combattants que Dieu a envoyés à notre pays au début du siècle dernier, à une époque des plus sombres de notre Histoire contemporaine. Ces pionniers ont tracé la voie de la renaissance de la nation et réveillé la dignité et la fierté des individus et de la collectivité face à l'occupant. Ils ont formé ainsi, de par leur comportement et positions, une élite de croyants ayant honoré le serment qu'ils ont fait devant Allah. La commémoration de leur souvenir constitue, pour nous, des moments de réflexion et un rappel des leçons que les générations successives doivent tirer de leur parcours et de leurs positions, afin de s'en inspirer et de se frayer la voie juste et droite comme celle qu'ils empruntèrent, avec foi et détermination et en dépit des courants contraires, jusqu'à ce qu'ils arrachèrent la liberté et l'indépendance de notre pays et ouvrirent la voie du combat pour la démocratie et le progrès.
Mesdames, messieurs
Le défunt était connu parmi ses compagnons d'armes, pour sa haute moralité tant il était tolérant, affectueux, généreux, modeste, joyeux et clément tant envers ses amis qu'envers ses adversaires, à l'image des grands hommes qui ne connaissent point la rancune et le dépit et dont le cœur, comme il aimait à le répéter, est trop étroit pour contenir de la rancœur et assez vaste pour la clémence…
Il a d'ailleurs incarné ces valeurs tout au long de son combat, sans jamais se départir de ces nobles qualités quelles que soient les circonstances, favorables ou défavorables, ce qui le fit aimer et apprécier de tous ses contemporains depuis qu'il fut étudiant et président de l'Association des étudiants marocains, puis leader du Parti de la Réforme, directeur de l'Institut libre, directeur des Habous et encadrant essentiel du Mouvement national dans le Nord. Ses qualités morales et intellectuelles lui ont permis de nouer des relations avec les tenants de la pensée libératrice à l'intérieur du pays comme à l'étranger. Particulièrement ceux du monde arabo-musulman et à leur tête l'Emir Chakib Arsalane. Conscient, il l'était de la nécessité de mobiliser tous les efforts et toutes les énergies afin de raviver la flamme patriotique et de faire prendre conscience de l'impératif de contrecarrer les plans de l'occupant sur plus d'un front. C'est ainsi qu'il se préoccupa, non seulement de la défense de sa Patrie, le Maroc, mais également des causes des pays maghrébins et de la Oumma arabo-musulmane à travers sa contribution à la constitution de l'Association de défense de la cause marocaine au Caire et celle des étudiants musulmans d'Afrique du Nord à Paris.
Il était persuadé que le combat pour la liberté était indissociable de la défense des droits de l'Homme. Il fut ainsi l'un des premiers défenseurs des droits humains dans notre pays. Tant il croyait fermement en la nécessité d'accorder au citoyen ses pleins droits au sens large et global du terme, et que cela requiert des mécanismes d'encadrement, de sensibilisation et de défense, ainsi que de prise de conscience tant des individus que de la collectivité, ce qui l'amena à contribuer efficacement à la création, en 1933, de la première Ligue de défense des droits de l'Homme au Maroc et à l'échelle du monde arabe. Organisation dont la présidence échut au patriote sincère et grand combattant que fut le regretté Haj Abdesslam Bennouna.
Conscient aussi du fait que l'enseignement constituait l'un des piliers de la mission de libération pour laquelle il luttait, il accorda une attention toute particulière à l'incitation des jeunes à rejoindre les écoles, à l'intérieur comme à l'étranger. Il oeuvra à encourager l'enseignement libre qui fut l'un des principaux piliers sur lesquels reposa le Mouvement national à travers tout le pays et créa ainsi l'Institut libre en 1935.
Il accorda, de même, un grand intérêt à la presse, considérée comme un aspect de la lutte à même de mobiliser l'opinion publique et publia le journal «Al hayat» en 1934 qui fut une tribune nationaliste de grande valeur et portée.
Les efforts qu'il déploya, avec ses compagnons de route dans le Nord, s'harmonisaient parfaitement avec ceux des leaders nationalistes dans les autres régions du pays, particulièrement ceux du Leader Allal El Fassi et des autres membres de la Koutla de l'action nationale dont il fut élu président de la zone califale en 1936.
L'évolution des événements l'ayant amené à fonder le Parti de la Réforme, il en fit une école de l'action politique nationaliste au Nord et un nouvel outil de raffermissement des liens entre patriotes au Nord et au Sud du pays. Imbu qu'il était des valeurs unionistes, il était réellement l'un des pionniers de l'unté nationale et territoriale qui ont incarné par leur comportement, par la parole et par l'action, l'option unioniste dont ils firent la ligne directrice de leur credo et une boussole qui leur indiquait la voie politique. Ils ne devaient guère en dévier ensuite que ce soit au sein de la Koutla nationale, du Parti national ou du Parti de l'Istiqlal, à travers la coordination rigoureuse des positions et la consultation avant de prendre des initiatives tant à l'intérieur qu'à l'étranger, au Moyen Orient arabe comme en Europe. Et ce, afin que l'occupant et l'opinion publique internationale sachent bien que le Mouvement national était uni et soudé au Nord et au Sud. Ce qui a été prouvé en diverses occasions, dont nous retiendrons le soutien (d'A. Torrès) aux revendications urgentes de la Koutla de l'action nationale dans la zone sous domination française en 1936. Il avait présenté au calife du Sultan et au gouverneur espagnol dans la zone califienne, le mémorandum des revendications de la Nation marocaine en mars 1938 puis, le 14 février 1943, le Manifeste de l'indépendance du Maroc Nord et Sud inclus.
Le Leader Allal El Fassi note à ce sujet dans «Les mouvements de libération»: «En 1946, le Parti de la Réforme a envoyé une délégation conduite par son secrétaire général, M. Tayeb Bennouna, à Rabat où il fut reçu par SM le Roi et tint une réunion avec le Conseil supérieur du Parti de l'Istiqlal au cours de laquelle il fut décidé de poursuivre l'action des deux partis et de synchroniser leurs plans en vue de réclamer l'indépendance et la réunification du pays sous la conduite de la couronne alaouite et de renoncer, dans la zone califienne aussi, à la politique du coup par coup et de ne pas se laisser berner par les réformettes promises par les colonisateurs (…) A son retour à Tétouan, le Leader A. Torrès prononça un discours dans lequel il affirma notamment: «Le Parti de la Réforme au Nord et celui de l'Istiqlal au Sud sont déterminés et ont fait vœu devant Allah et la Patrie d'œuvrer à la concrétisation de cet objectif et n'accepteront rien moins que l'indépendance et l'unité du pays». Et Torrès d'ajouter: «De même qu'il ne saurait y avoir de différence entre le Nord et le Sud du Maroc, ni entre SM le Roi et SA son calife, de même les partis de la Réforme et de l'Istiqlal doivent unir leurs orientations et efforts ».
Face à une aussi étroite coordination entre les deux partis, les autorités espagnoles ont essayé d'appâter les nationalistes au Nord en créant de nouveaux ministères dont ils étaient appelés à en diriger quelques uns, dans le cadre des nouvelles réformes, mais le Parti de la Réforme, guidé par A. Torrès, rejeta cette offre.
Le Leader Allal El Fassi note encore dans son ouvrage: «Le Parti de la Réforme a publié un communiqué dans lequel il affirme que les réformistes ne sont nullement disposés à entrer au gouvernement, que l'époque de la séduction par les ministères est révolue et que les Marocains sont persuadés que les réformes entreprises par le colonisateur ne peuvent qu'être estropiées (…) Le Parti de l'Istiqlal publia, en même temps, un communiqué abondant dans ce sens et affirmant que les revendications des nationalistes au Nord et au Sud se rejoignent aussi bien en ce qui concerne leurs objectifs que pour ce qui est des moyens d'y parvenir».
Cette étape constitua un tournant décisif dans le bras de fer avec l'occupant et insuffla un nouvel élan à la coordination entre les deux composantes du Mouvement de libération alors soutenue par SM le Roi feu Mohammed V dont la visite à Tanger en 1947 fut un événement national historique qui illustra la symbiose entre le Trône et le peuple et donna le départ au démantèlement des frontières factices entre les parties d'un seul et même pays. Un pays attaché aux liens d'allégeance au Trône unificateur ainsi que l'a exprimé A. Torrès dans son discours, au nom du Parti de la Réforme, en présence de SM le Roi et des notables de la région califienne.
Le Leader Allal El Fass écrit encore: «M. A. Torrès a parlé devant une foule nombreuse scandant des vivats à la gloire du Maroc en disant: «Au protecteur de la foi et de la nation et au nom de cette génération qui tient fermement à votre Royaume béni, nous présentons avec déférence notre allégeance à Amir Al Mouminine, espérant que notre seigneur, qu'Allah le guide et le glorifie, daigne accepter ce modeste présent comme gage de notre amour et de notre fidélité au Trône de Vos ancêtres. Ô notre seigneur, c'est vous notre guide et notre modèle». «Le cadeau ainsi fait, poursuit le Leader Allal El Fassi, avait une portée et une signification grandioses puisque consistant en une carte du Maroc unifié dessinée sur une plaque d'argent pur et en un coffret en or contenant des morceaux de terre glanés dans toutes les plaines et hauteurs de la région et sur lequel on avait gravé cette inscription: «A l'occasion de la visite du Roi à Tanger, les habitants de Tétouan offrent cette terre arrosée par le sang des valeureux martyrs en guise de symbole de l'unité du Maroc sous (l'égide) du glorieux trône alaouite».
Une telle prise de position patriotique amena les autorités espagnoles à lui interdire de retourner à Tétouan provoquant, du coup, une vague de protestations populaires et de manifestations en témoignage de solidarité avec le leader et réclamant son retour au berceau de son activité politique.
Les harcèlements de l'occupant ne firent d'ailleurs que renforcer sa foi et son attachement à ses principes et l'encouragèrent à élargir la sphère de son combat à l'intérieur du pays comme à l'étranger, contribuant ainsi activement à mettre sur pied le Bureau du Maghreb arabe au Caire tout en se distinguant par son combat en faveur de la cause palestinienne. Il fut de même parmi les premiers à appeler au soulèvement populaire lorsque le colonisateur osa déporter SM le Roi Mohammed V et sa noble famille le 20 août 1953 et poursuivit ses efforts de soutien à la résistance et à l'armée de libération dont il coordonna les actions dans la région califienne jusqu'à ce que pointe l'aube de l'indépendance et que SM Mohammed V annonce le recouvrement de la souveraineté de la majeure partie du royaume le 7 avril 1956, donnant ainsi le point de départ au processus de développement et de parachèvement de l'intégrité territoriale.
Il sied de rappeler à ce propos que le leader Torrès avait des relations étroites avec les gens du Mouvement national dans les provinces sahariennes depuis 1935. Il entretint ainsi une correspondance et des contacts directs avec le combattant et grand alem qu'était Cheikh Mrabbih Rabbo, fils de Cheikh Maë El Aynine, démontrant, ce faisant, l'unité de l'action patriotique des deux flancs, nord et sud, du mouvement national et confirmant l'indivisibilité du peuple et de la patrie, alors qu'il souffrait, lui et ses compagnons de route, de la division qu'ils considéraient comme un aléa passager qui devait prendre fin avec l'indépendance et la réunification du pays. Réunification pour laquelle le leader A. Torrès n'a cessé de militer sur plus d'un front et à divers niveaux et qu'il illustra de très belle manière en décidant, avec ses frères militants du Parti de la Réforme, de rejoindre les rangs de l'Istiqlal et en donnant, ce faisant, le plus bel exemple de ce que doivent être l'amour de la Patrie, le dépassement de soi et le rejet des calculs mesquins et de courte vue. Des qualités qu'il résuma dans son allocution de bienvenue en recevant la délégation du Parti de l'Istiqlal à son domicile à Tétouan, en ces termes: «Nous vivons, probablement, un de ces moments dont la vie ne nous fait que rarement cadeau, car Allah a exaucé ce à quoi nous aspirions en réunissant le Nord et le Sud et réalisé l'union tant souhaitée. Vous-vous demandez, peut-être, ce que je réclame au titre des futures organisation et gestion et je réponds d'emblée que suis un des vôtres car notre parti c'est le Parti de l'Istiqlal et s'il exista, naguère, d'autres organisations rendues nécessaires par les conditions créées artificiellement par le protectorat, ces conditions ont disparu. Aussi, je déclare devant vous que moi et le Parti de la Réforme, toutes sections et structures confondues, nous nous considérons comme intégrés, sans condition préalable, au Parti de l'Istiqlal, car il n'y a plus de raison pour qu'existe ici un Parti de la Réforme et là un autre de l'Istiqlal. C'est, au contraire un seul et même parti en l'occurrence le Parti de l'Istiqlal. Marchons donc ensemble, avec la bénédiction d'Allah et comme guide et stimulant (le souci de) servir notre pays et de réaliser les aspirations de nos compatriotes».
Par cette prise de position historique, le leader A. Torrès aura administré une sublime leçon d'abnégation et de sacrifice de soi. Il importe de souligner ici que le leader de l'Unité a voulu, à travers cette initiative de fusion et d'union, transmettre un message aux générations montantes. Comme en témoigne, à ce sujet, le message qu'il adressa au congrès de la Jeunesse istiqlalienne à Fès où il attira l'attention sur l'importance de l'événement (la fusion entre les deux partis) et la nécessité d'en tirer les enseignements à l'avenir de la manière qui serve le mieux les intérêts de la Patrie. Il écrivit ceci: «Il m'est agréable que ce message à la jeunesse réunie dans la capitale spirituelle, soit l'une de mes premières adresses au peuple marocain après qu'ait été réalisée l'union totale entre les partis de l'Istiqlal et de la Réforme, afin que les hommes et les responsables de demain tirent les conclusions et enseignements de notre démarche qui, nous l'espérons, sera hautement bénéfique pour notre pays en cette phase de la vie (nationale). Et d'ajouter: «La signification de ce que nous venons de faire consiste en le rejet de toute forme d'égoïsme et l'élévation au service de l'intérêt général au point que toutes les considérations personnelles s'estompent au profit de la fidélité à la coopération qui nous a unis dès les premiers jours du nationalisme et jusqu'à ce moment… Si donc vous avez bien assimilé tout cela, ô jeunesse de l'Istiqlal, vous-vous apercevrez qu'au Maroc il existe des hommes pour qui tout devient facile dès qu'il s'agit de l'intérêt supérieur de la nation et de la patrie».
Mesdames, messieurs,
Les circonstances ne permettent pas d'évoquer toutes les qualités et tout l'apport de ce valeureux leader eu égard à la diversité et la multiplicité des facettes de sa personnalité extraordinaire et à la variété de ses activités. Mais il importe de rappeler que ce fut un militant ferme, un journaliste émérite, un professeur accompli, un excellent administrateur, un diplomate avisé et un politicien expérimenté, en plus d'être l'un des meilleurs orateurs que le monde arabe ait connus au début du siècle dernier recueillant, de ce fait, l'admiration des plus grands penseurs et politiques pour ses qualités de tribun hors pair et l'aisance et la pertinence de son verbe. De même qu'il plut aux foules par sa capacité à développer et transmettre ses idées, son sens de la répartie, son argumentation et son analyse rigoureuses et la clarté de ses concepts. C'était en effet un orateur éloquent et courageux dans l'énoncé de ses idées. Toutes qualités qui attirèrent sur lui l'attention des observateurs de l'expérience parlementaire marocaine au début des années 60 où il fut président du groupe de l'Unité et l'Egalitarisme et où il excella dans toutes ses interventions et, en particulier, dans ses plaidoyers en faveur de la démocratie et la liberté ou pour dénoncer les diverses formes de fraude électorale lors de la discussion de la motion de censure dont cet extrait: «Nous comptons parmi les ennemis de la spoliation du pouvoir qu'elle soit le fait de ceux qui viennent d'au-delà des frontières ou de ceux qui brandissent pistolets et mitraillettes à partir des montagnes ou dans les rues, mais nous sommes aussi les ennemis de ceux qui s'arrogent le pouvoir par le biais de la fraude et le mensonge».
J'ai eu l'occasion de rappeler, lors de la commémoration du 50ème anniversaire de l'union en 2006, que les interventions et discours de Me Torrès au parlement, avaient en ce temps là donné une idée concrète de ce que doit être l'opposition constructive adossée à des valeurs et principes et proposant des alternatives qui traduisent les attentes des citoyens, loin des surenchères et des divagations politiciennes. Ses interventions ayant jeté les fondements de l'école de la démocratie véritable, celle qui fait pièce aux plans visant à avilir la démocratie, à déformer le principe même du pluralisme et à fausser la carte politique.
Mesdames, messieurs,
En commémorant aujourd'hui l'anniversaire de ce leader unioniste, épris de son peuple et de sa Patrie, nous avons également présents à l'esprit les principes et valeurs pour lesquels il lutta avec ses compagnons et précurseurs du combat national et, en premier lieu, ceux consistant à faire face à toutes les formes de déviation intellectuelle et de machination politique en vue d'attenter à l'unité de notre peuple et à son intégrité territoriale ou tendant à briser les liens spirituels, politiques et patriotiques qui unissent le Trône et le peuple. Le Leader et ses compagnons ont ainsi pu, grâce à leur foi sincère et à leur détermination, faire échec aux manœuvres colonialistes à la faveur de la symbiose de la nation et du Trône et de la révolution du Roi et du peuple.
Nous voudrions en cette occasion où prévaut la fidélité aux valeurs patriotiques et aux patriotes, réaffirmer notre conviction que toutes les tentatives désespérées visant à semer de nouveau les germes de la division et de la dissension à jamais extirpées de notre sol, sont vouées à l'échec et qu'elles ne trouveront point d'appui, sous quelque prétexte que ce soit, dans notre pays et parmi notre peuple unis et unifiés, ni ne trouveront de terreau propice au sein de notre société marocaine tant celle-ci demeure attachée aux valeurs islamiques de tolérance, loin de toute exagération et de tout extrémisme, jalouse de son unité nationale, territoriale et doctrinale et forte du consensus national autour d'Amir Al Mouminine, garant et défenseur de la nation et de la foi, SM le Roi Mohammed VI, symbole de la souveraineté et garant de l'unité nationale.
Mesdames, messieurs,
La commémoration de l'anniversaire du Leader de l'Unité et d'autres événements a une portée et une signification beaucoup plus grandes que le seul arrêt sur ce dont de telles sommités se sont distinguées, qu'il s'agisse de leur attachement aux valeurs ou de leurs nombreuses réalisations, car nous considérons que (ces commémorations) doivent constituer pour tous une occasion de raviver le souvenir et d'éveiller la mémoire nationale en vue de relier le glorieux passé, le présent en mouvement et l'avenir prometteur, d'aiguiser la volonté des générations montantes à travers le rappel de la signification et de la portée des valeurs patriotiques véritables de manière à garantir leur fidélité aux constantes religieuses, nationales et morales qui constituent le socle de l'identité marocaine et ont préservé notre personnalité et notre humanisme tout en nous prodiguant suffisamment de force et de volonté pour recouvrer notre souveraineté et notre liberté.
Notre attachement à cette orientation solidement ancrée en nous, nous dicte de rappeler que toutes les vaines tentatives visant à nous détourner de l'Histoire tant récente que lointaine de notre pays ou à la dénaturer, à porter atteinte à l'image de ses grands hommes ou à extraire certaines de ses étapes de leur contexte historique ne réussiront point à semer le doute dans l'esprit de personne parmi nous. Le peuple marocain est parfaitement conscient de ce que représentent ses valeurs civilisationnelles, attaché et fier de son Histoire et de l'apport de ses fils et soucieux de faire perdurer ces valeurs et de les faire ancrer dans l'esprit des générations.Nous pensons que cela est de la responsabilité de la famille, de l'école et de toutes les bonnes volontés politiques ou relevant de la société civile ainsi que de tous les acteurs attachés à notre religion, notre société et notre patrie.
Feu SM le Roi Hassan II disait, à l'occasion du 50ème anniversaire de la visite du regretté SM Mohammed V à Tanger: «Il nous faut rester fidèles à ces valeurs nationales et spirituelles, à l'Histoire nationale qui les incarne, et ce en abreuvant la mémoire des générations actuelles de leur signification et en éclairant leur âme de leur éclat car cette histoire, par ses grandes épopées, sa lutte acharnée et ses énormes sacrifices pourrait être minorée aujourd'hui et inciter à la vantardise si elle n'est pas placée dans son contexte réel et évoquée en fonction de sa texture générale et des circonstances spéciales, nationales et internationales, qui l'ont façonnée. Alors seront mises en évidence les positions des héros de la libération et à leur tête feu SM Mohammed V, dans toute leur dimension héroïque telle que vécue par le peuple marocain durant cette phase cruciale de notre Histoire».
Mesdames, messieurs,
Feu A. Torrès a vécu une vie pleine de don de soi, de sacrifices et de difficultés au service de la liberté et de l'indépendance, de l'édification du Maroc moderne sur des bases démocratiques et du développement économique et social propre à assurer le bonheur de toutes les couches sociales à travers toutes les provinces et régions du pays.
A cette occasion, nous prions pour que son âme repose en paix aux côtés du Leader Allal El Fassi et de leurs compagnons de lutte, les croyants sincères. Leurs frères et élèves du Parti de l'Istiqlal poursuivent leur marche avec abnégation et bonne foi, dans le cadre du combat de toutes les bonnes volontés de ce pays qui ont rejoint celle du Trône. Notre pays, grâce à cette symbiose, a pu engranger tant d'acquis et de réalisations, dont en premier lieu, le recouvrement de la plus grande partie de notre intégrité territoriale dans un élan de mobilisation totale, globale et permanente en vue de préserver nos acquis nationaux et en faisant preuve d'attitude à la fois positive et ferme envers les efforts internationaux tendant à mettre fin à la tension artificielle au sujet de notre Sahara, à la faveur de l'initiative marocaine d'autonomie à Saqia El Hamra et Oued Eddahab, dans le cadre de la souveraineté du Maroc. Sans oublier, l'aspiration de notre pays, sa détermination irréversible, sa compréhension et son appréciation responsable de la situation régionale et internationale, à récupérer les villes de Sebta et Melillia et les îlots avoisinants en les intégrant à la Patrie, tout en garantissant les droits de leurs habitants et en préservant les droits de nos voisins espagnols.
Notre pays a également fermement et sûrement poursuivi sa marche pour l'accumulation des mécanismes et exercices visant l'ancrage des institutions démocratiques qui ont connu un saut qualitatif sous le nouveau règne où notre pays connaît des mutations importantes dans le cadre des réformes globales ayant touché divers domaines et tendant à édifier un Maroc moderne, uni et solidaire, jaloux de son patrimoine civilisationnel, riche par sa diversité, sa cohésion et la cohabitation (de ses populations) et aspirant à une régionalisation avancée, complémentariste et équilibrée, dont la mise en œuvre commencera à la lumière des conclusions des travaux de la Commission nationale chargée d'en élaborer le projet, que SM le Roi entoure de sa sollicitude, veillant avec vigilance, fermeté et clairvoyance à consolider les fondements de la renaissance du Maroc moderne aux plans politique, économique et social en vue de gagner les paris du présent et de l'avenir et de garantir une vie digne à nos concitoyens et de conforter notre rang parmi les peuples.
Avant de conclure, je voudrais citer le témoignage de l'un des compagnons du Leader de l'Unité, le combattant Abou Bakr Kadiri qu'Allah lui prête longue vie et lui accorde bonne santé: «(Abdelkhaleq Torrès) rejette le colonialisme, la dépendance. Il aspire à un Maroc libre, souverain et préservant son identité, sa personnalité, sa religion, sa langue et ses traditions. Il ne veut pas d'un Maroc divisé et dépecé, estropié mais veut un Maroc dont toutes les parties et régions seraient unies. Il aspire à ce que ce Maroc joue pleinement son rôle dans la promotion des valeurs humanitaires, la coopération entre les hommes dans l'intérêt de tous les humains. Il rejette toute rivalité sociale et tout conflit ethnique ou racial ou doctrinal. Il veut un Maroc musulman, soumis à son créateur et maître, et fidèle à son Roi».
Puisse Allah avoir en Sa Sainte Miséricorde M. Abdelkhaleq Torrès, chantre de l'unité et de l'intégrité territoriale ainsi que tous les vaillants fils de ce pays qui ont sacrifié leur vie pour que nous soyons, tous, des citoyens libres dans un pays libre.


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