"L'interdiction de la burqa et du niqab ne libérerait pas les femmes opprimées mais pourrait, au contraire, aggraver leur exclusion dans les sociétés européennes", estime le commissaire aux Droits de l'homme du Conseil de l'Europe. Ce serait "une mesure bien mal inspirée, portant atteinte à la vie privée", ajoute Thomas Hammarberg dans un "point de vue" publié dimanche à Strasbourg, à la veille de la Journée internationale de la Femme. Cette prise de position intervient alors que la France s'achemine vers l'adoption, au printemps, d'une loi interdisant le port du voile intégral dans l'espace public où au sein de certains services publics. Une interdiction générale serait, selon le commissaire suédois, susceptible de se heurter à la Convention européenne des droits de l'homme sous l'angle du droit au respect de la vie privée et du droit de manifester sa religion ou sa conviction. Ces droits, rappelle-t-il, ne peuvent être restreints que pour des motifs liés à la sécurité publique, à la protection de l'ordre, de la santé ou de la morale publiques, ainsi qu'à la protection des droits et libertés d'autrui. Personne n'a pu démontrer, selon lui, que le port du voile intégral portait atteinte à l'un ou l'autre de ces principes. Une interdiction concernant seulement certains établissements publics tels qu'hôpitaux ou administrations, solution préconisée par la mission d'information de l'Assemblée nationale sur le voile intégral, "peut avoir pour seul résultat de dissuader ces femmes de s'y rendre", ajoute-t-il. Reconnaissant que "le statut de la femme dans certains groupes religieux est un problème grave qu'il ne faut pas éluder", Thomas Hammarberg estime que "ce n'est pas en interdisant les vêtements, qui ne sont qu'un symptôme, qu'on y parviendra". "De manière générale, par principe, l'Etat devrait éviter de légiférer sur la façon dont les gens s'habillent", affirme-t-il. "L'interdiction de la burqa et du niqab serait une aussi mauvaise chose que l'aurait été la condamnation des caricaturistes danois", conclut le commissaire en référence à la publication de caricatures de Mahomet qui avaient suscité la colère d'une partie du monde musulman. "En d'autres termes, il n'y a pas de tolérance sans réciprocité", ajoute-t-il.