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Réforme de la Procédure pénale : Beaucoup d'ambitions, mais peu de moyens ! [INTEGRAL]
Publié dans L'opinion le 18 - 03 - 2025

En pleine discussion de la réforme de la Procédure pénale au Parlement, la question des moyens du système judiciaire semble reléguée au second plan au moment où les garanties du droit de la défense dominent le débat. Décryptage.
Les débats s'enchaînent sur la réforme procédure pénale qui fait l'objet d'échanges passionnés à la Chambre des Représentants. Ce mardi, le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, est attendu à la Commission de justice, de la législation, des droits de l'Homme et des libertés pour poursuivre la discussion détaillée du projet de loi N°03.23. Comme prévu, le texte a suscité des controverses juridico-politiques. Dès le début des discussions en commission, le ministre qui, souvent, dit ce qu'il pense, défend ardemment son texte que certains jugent trop libéral et d'autres pas assez rassurant sur le procès équitable. Les débats ont aussitôt pris une tournure politique. Ouahbi n'a pas manqué de critiquer la politisation du débat sur un texte qui doit, selon lui, être lu sous un prisme purement juridique.
Pour leur part, avocats, juristes, experts, tous les acteurs concernés se succèdent à l'hémicycle pour faire valoir leur vues sur un texte censé, en principe, assouplir la procédure pénale de sorte à humaniser le système judiciaire. La réforme portée par Ouahbi vise essentiellement à protéger davantage la présomption d'innocence des individus contre les abus de l'accusation publique en leur donnant plus de garanties dans le chemin vers le procès. La réforme entend mettre fin au réflexe des juges à la détention qui a longtemps prévalu dans le système judiciaire pour des raisons juridiques et culturelles. Le ministre n'a eu de cesse de répéter dans ses déclarations publiques qu'il voulait "protéger les gens contre l'arbitraire", et que la présomption d'innocence demeure le fil conducteur de son texte. A l'aide des peines alternatives, on espère éviter autant que possible les possibilités de recours à la détention de l'entrée au commissariat au procès.


Les avocats dévoilent leurs doléances


Pourtant, le texte ne trouve pas totalement grâce aux yeux des robes noires bien qu'il affermit manifestement le droit de la défense face à l'accusation publique. L'Association des Barreaux du Maroc (ABAM) a ouvertement plaidé pour plus de garanties contre la détention arbitraire.
Par la voix de son président, Hocine Ziani, qui est intervenu au Parlement lors d'une journée d'étude, l'Association a appelé à ce que la détention préventive et la garde à vue soient plus minutieusement encadrées tout en plaidant pour que les inculpés soient indemnisés en cas de détention arbitraire. Les robes noires ne sont pas tout à fait d'accord avec le nouveau régime de la garde à vue dont elles veulent plafonner la durée à 24 heures renouvelable sur décision motivée du juge. Le texte de la réforme, rappelons-le, n'a pas changé la durée initiale fixée à 48 heures qui peut être prolongée de 24 heures sauf pour les crimes d'atteintes à la sûreté de l'Etat (72 heures).
Les avocats réclament aussi qu'ils soient obligatoirement présents dès le début de la garde à vue et également quand le suspect est déféré devant le Procureur du Roi. Concernant les interrogatoires de police auxquels les avocats peuvent désormais assister, les robes noires exigent que l'enregistrement audio soit élargi sur l'ensemble de l'enquête préliminaire et pas seulement pendant la lecture des propos du suspect et la signature du procès-verbal. Aux yeux des avocats, le droit de garder le silence n'est pas assez garanti. Pour cela, ils réclament qu'il soit protégé tout au long de l'enquête et de l'instruction judiciaire. En gros, les avocats jugent que le texte n'a pas tout à fait équilibré le rapport de force entre la défense et le parquet. Ce dernier, selon eux, garde encore des pouvoirs excessifs. Là, la liste des doléances de l'ABAM est longue. Ils veulent abolir le monopole du Ministère public dans la qualification des crimes et des infractions. Pour minimiser le risque des condamnations infondées, il est recommandé d'attacher plus d'importance aux preuves matérielles qu'aux aveux qui, du point du vue des avocats, peuvent souvent être forcés.
Jusqu'à présent, il n'est pas certain que toutes les doléances des robes noires puissent être retenues par le ministre de tutelle qui estime que son texte est suffisamment avancé en matière de protection de la présomption d'innocence et de promotion du droit de la défense. Reste à savoir à quel point les acquis de la défense seront renforcés dans les amendements des députés.
La réforme a pour vocation essentielle de limiter le recours systématique à l'emprisonnement qui condamne les établissements carcéraux à une surpopulation chronique. D'où l'élargissement du champ de la médiation pénale et la volonté de verrouiller plus le recours à la détention préventive considérée désormais comme une mesure exceptionnelle. Celle-ci ne peut être prolongée que deux fois en cas de crimes au lieu de cinq et une seule fois en cas de délit. Les peines alternatives sont introduites pour donner des marges de manœuvre aux juges même si leur efficacité reste à prouver.

En quête de magistrats !

Là, plusieurs avocats réclament l'institution d'un juge de liberté et de détention. "Celui-ci serait chargé de statuer sur le placement en détention préventive et d'autoriser, à titre dérogatoire, certains actes d'enquête, en revanche, la mise en œuvre des peines alternatives relèverait exclusivement des prérogatives du juge d'application des peines", explique Rabii Chekkouri, avocat au Barreau de Rabat. Or, le corps de la magistrature est tellement en sous-effectifs que cela paraît improbable et interroge sur les moyens mobilisés pour garantir le succès de la réforme. Les chiffres du dernier rapport du Ministère public quant aux effectifs des juges interrogent. Le Maroc ne compte que 4190 magistrats, dont 1087 procureurs qui représentent 26% du corps de la magistrature. Cela dit, il y a 3 magistrats pour 100.000 habitants. Force est de constater que les effectifs n'ont pas évolué. Il n'y a eu depuis 2017 que 163 magistrats supplémentaires au moment où les affaires judiciaires en circulation dans les tribunaux augmentent. En 2023, elles ont augmenté de 6,44%. "Le sous-effectif des magistrats ne saurait être sans conséquence sur le bon fonctionnement de la justice", fait remarquer Me Chekkouri, estimant que la charge de travail qui peut résulter du sous-effectif est naturellement préjudiciable aux droits des justiciables. L'avocat insiste sur l'importance d'augmenter les effectifs des procureurs dont le nombre actuel demeure trop faible. Ce qui se répercute irrévocablement sur le suivi des plaintes et des procédures.

La question des moyens se pose dans l'administration pénitentiaire dont incombe également de participer à la mise en œuvre et au suivi des peines alternatives, tel que prévu par l'article 647-1 du Code de Procédure pénale. Le patron de la Délégation générale à l'administration pénitentiaire et à la réinsertion, Mohamed Salah Tamek, émet des réserves sur leur efficacité, lui qui n'a eu de cesse de réclamer plus de ressources financières et humaines pour les établissements carcéraux qui sont à bout de leur capacité. Selon lui, il faut 4000 fonctionnaires alors que la loi des finances de 2025 n'a alloué que 1000 postes budgétaires. Un chiffre qui en dit long sur les capacités de l'administration pénitentiaire à laquelle on demande une mission dont elle n'a pas les moyens.

Trois questions à Rabii Chekkouri : "L'effectif trop limité des magistrats de parquet ne permet pas d'assurer un suivi efficient des plaintes"
* Aujourd'hui, le nombre de juges ne dépasse pas 4190. A quel point est-ce pénalisant pour le système judiciaire ?

Le sous-effectif des magistrats ne saurait être sans conséquence sur le bon fonctionnement de la justice. Un juge du siège peut, en effet, se retrouver à traiter plusieurs milliers de dossiers par an. En matière pénale, où les enjeux sont d'autant plus graves qu'ils touchent à la privation de liberté, cette pénurie de magistrats dans les juridictions répressives compromet inévitablement la qualité des jugements.

Le juge, avant d'être une institution, demeure un être humain soumis au stress et à l'épuisement. Comment concevoir qu'après douze heures de débats, des délibérations puissent encore s'étaler sur plus de deux heures ? Il arrive que des décisions soient rendues à l'aube, après l'examen de dizaines d'affaires criminelles, dans des conditions qui interrogent sur la sérénité et la rigueur requises par l'acte de juger.
Concernant le parquet, garant de l'ordre public, il joue un rôle essentiel dans le contrôle et l'orientation des enquêtes. Ses magistrats assurent des permanences pour veiller au bon déroulement des investigations. De surcroît, leur effectif, encore trop limité, ne permet pas d'assurer un suivi efficient des plaintes qui se comptent par centaines de milliers par an.


* Qu'en est-il de la formation des magistrats ? Peut-on dire qu'elle demeure lacunaire par rapport aux évolutions du droit et du système judiciaire en général ?

La formation des magistrats et les conditions d'accès à la magistrature doivent, à mon sens, être réformées afin de s'adapter aux évolutions de la société. Le concours d'entrée devrait privilégier l'évaluation du raisonnement juridique plutôt qu'un simple contrôle des connaissances, étant donné que les textes sont en constante mutation.


* Les peines alternatives sont désormais entrées en vigueur, mais les moyens de leur application ne semblent pas assez mobilisés. Partagez-vous ce constat ?

Bien que publiée au Bulletin Officiel, la loi sur les peines alternatives n'est toujours pas en vigueur, son application restant subordonnée à l'adoption des lois organiques en cours d'examen parlementaire. Toutefois, la mise en œuvre effective de cette loi exige des moyens adéquats, indispensables à la réduction de la surpopulation carcérale. Le recrutement de juges d'application des peines et de fonctionnaires qualifiés au sein de l'administration pénitentiaire, chargés d'assurer l'exécution pertinente des peines alternatives, s'avère indispensable.


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