L'élégante dynamique de développement insufflée et soutenue au Royaume Chérifien suite à l'Accession au Trône de Sa Majesté le Roi Mohammed VI est susceptible de trouver son point d'orgue dans l'intégration du nucléaire au sein du mix énergétique national. Alors que les études économétriques montrent une forte corrélation entre la consommation d'énergie et la croissance économique (1), le Maroc jouit de l'opportunité de parachever son entrée dans le 21e siècle comme puissance régionale, tout en sublimant avec une belle consistance la transition énergétique amorcée. De fait, le Maroc est le Royaume où règnent aussi Soleil et vents, lui permettant des progrès éminents en termes d'énergies renouvelables (2). Ces sources sont toutefois notoirement intermittentes et nécessitent d'être complétées par d'autres sources aisément pilotables afin de garantir un approvisionnement continu en électricité, indépendamment des conditions météorologiques. Si l'Allemagne a fait le choix funeste de l'aveuglement idéologique en balançant son parc d'énergie renouvelable par une utilisation massive du charbon (3), le Maroc a la possibilité de se hisser à la hauteur d'une lucidité historique en adoptant, au nom du pragmatisme le plus éloquent, le chemin inverse. Ainsi, le développement, étape par étape, de l'énergie nucléaire au sein du Royaume permettra-t-il d'achever une transition énergétique ambitieuse et cohérente, en respectant les objectifs climatiques qui sont les siens, et, surtout, en renforçant substantiellement une souveraineté énergétique encore trop vulnérable. En effet, 90% de l'énergie primaire consommée au Maroc provient toujours de sources fossiles importées et 20% est utilisée pour produire de l'électricité (4). Cette dernière part augmentera sensiblement dans les prochaines décennies à mesure que notre société et, notamment, nos modes de transport s'électrifient. C'est pourquoi la transition vers une énergie électrique d'origine nucléaire, qui, nous le rappelons, n'émet aucun autre gaz à effet de serre que de la vapeur d'eau, et dont la gestion des déchets est aujourd'hui à notre portée (5), est indispensable d'un point de vue stratégique.
Et c'est précisément ce que le Maroc entend amorcer, selon les mots prononcés par Rafael Mariano Grossi (6), Directeur général de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), où le Royaume Chérifien s'établit et se consolide continûment depuis les années 50 (7) (8). Il y a deux éléments à considérer en particulier lorsque nous regardons cela de plus près :
1. L'accès aux technologies les plus récentes et performantes sans les coûts d'opportunité et les coûts irrécupérables des économies ayant déjà investi un capital considérable dans des centrales nucléaires de génération surannée. Le Maroc, n'ayant pas réalisé, à l'instar d'autres pays, d'investissements massifs dans le nucléaire, n'est pas prisonnier de ces coûts d'opportunité qui représentent la valeur de l'alternative à laquelle un pays renonce lorsqu'il choisit une autre voie. Il existe donc l'avantage d'une flexibilité technologique qui permet de s'orienter notamment vers les réacteurs nucléaires modulaires (SMR) (9) qui présentent l'intérêt d'une sûreté accrue, d'un coût fixe moindre et surtout d'une adaptabilité particulièrement propice aux enjeux de dessalement de l'eau ou de décentralisation de la production électrique au service de régions reculées. Cette rente "markovienne" permettra d'accéder à la production d'une électricité décarbonée à un coût compétitif, renforçant davantage l'attractivité du territoire pour la filière industrielle nationale et internationale. L'amélioration attendue de la compétitivité du tissu productif a en outre l'avantage de s'inscrire harmonieusement dans le cadre du Nouveau Modèle de Développement (NMD) publié en 2021, notamment en ce qui concerne la transformation structurelle de l'économie marocaine (10). Cette technologie SMR, aujourd'hui déployée par Energie de France (EDF), permettra également d'accompagner la prospérité des relations franco-marocaines (11). Elle sera une opportunité de poursuivre les efforts diplomatiques en faveur d'un meilleur rééquilibrage des rapports de force entre les deux nations, tout en favorisant le transfert de compétence au service des techniciens et ingénieurs marocains dont les aptitudes sont une ressource précieuse au développement du Royaume.
2. Le Maroc dispose dans ses sols de l'une des plus grandes réserves mondiales d'uranium (12), dont l'exploitation est de nouveau financièrement viable suite à la récente et spectaculaire augmentation du cours du minerai sur les marchés internationaux (13) (14). Ainsi, en amorçant cette transition, le Royaume contribuera significativement à une souveraineté énergétique qui est aujourd'hui une force incontestable lorsqu'il s'agit de relations internationales et de stabilité économique (15). Les autorités compétentes jouiront par ailleurs d'une certaine marge de manœuvre vis à vis des coûts d'exploitation de cette ressource, et donc de production de l'électricité, permettant une politique crédible de stabilité financière et d'attractivité industrielle. De cette perspective, la transition vers l'énergie nucléaire n'est plus seulement d'ordre énergétique mais économique : il s'agit de s'inscrire dans une démarche plus large de développement global.
Que celui qui trouve sa jouissance dans la prospérité du Maroc en profite pour prendre une profonde inspiration et se réjouir, car nous avons là assurément le signal d'un avenir radieux et actif.