Face à ce qu'ils considèrent comme un immobilisme persistant des autorités, les greffiers relancent leur mouvement de grève nationale, paralysant les tribunaux du 3 au 5 septembre. Ce nouvel épisode de protestations risque d'accentuer les retards déjà importants dans le traitement des affaires judiciaires, touchant directement les justiciables, notamment ceux en détention préventive. Alors que les revendications des greffiers, portant sur l'amélioration de leur statut, les augmentations salariales et la reconnaissance de leur rôle crucial dans le système judiciaire, restent sans réponse concrète depuis des années, la grogne s'intensifie. La colère des greffiers ne faiblit pas. Après plusieurs mois de silence de la part du gouvernement, le syndicat national de la Justice, affilié à la Confédération Démocratique du Travail (CDT), a annoncé une nouvelle vague de grèves. Les tribunaux du Royaume seront de nouveau paralysés du 3 au 5 septembre 2024, en réponse, selon les greffiers, à l'inaction des autorités face aux revendications concernant le statut des greffiers. Cette mobilisation s'inscrit dans la continuité d'un long mouvement de protestation entamé en avril 2024. Les grèves s'étaient enchaînées jusqu'à la pause estivale liée aux vacances judiciaires, mais à peine les tribunaux ont-ils repris leur activité que les audiences se voient à nouveau suspendues. L'absence des greffiers dans les salles d'audience entraîne inévitablement le report des affaires à des dates ultérieures, une situation qui affecte directement les justiciables, notamment ceux en détention préventive. Les reports successifs de procès exacerbent les tensions dans un système judiciaire déjà en difficulté. Malgré plusieurs mois de grèves et de multiples appels à la négociation, les greffiers se disent abandonnés. Ils rappellent qu'un accord avait été conclu en 2019 avec le gouvernement pour améliorer leur statut professionnel, mais celui-ci reste à ce jour lettre morte. Cette attente prolongée génère frustration et incompréhension au sein de la profession, d'autant plus que de nouveaux décrets, issus des engagements du dialogue social, ne répondent pas aux attentes des greffiers. Ces derniers dénoncent l'absence de concertation avec le ministre de la Justice avant l'introduction de ces décrets, lesquels ne couvrent pas les vides juridiques relatifs à leur profession. Les greffiers exigent la mise en œuvre rapide du statut fondamental qu'ils considèrent comme une réforme essentielle pour la modernisation de la Justice et la reconnaissance de leur rôle au sein du système judiciaire. Réforme de 2019 : Quelles avancées pour les greffiers ? La réforme de 2019, très attendue par les greffiers, a introduit plusieurs mesures destinées à améliorer leur situation professionnelle. Au-delà des simples augmentations salariales, l'un des points majeurs de cet accord est l'accélération du rythme des promotions, une demande clé pour une profession où une large majorité des agents étaient restés bloqués dans des échelles inférieures pendant plus de 30 ans. Selon les termes de cet accord, environ 40% des agents réunissant les conditions requises pourront être promus chaque année. Cette avancée se traduit notamment par un passage direct de l'échelle 6 à 8, supprimant ainsi l'échelle 7, jugée inutile. Le texte prévoit également que 18% des promotions se fassent par ordre d'ancienneté pour les agents comptant plus de 10 ans d'expérience, tandis que 18% supplémentaires seront réservés aux candidats ayant réussi l'examen de qualification professionnelle. Cela marque une nette différence avec l'ancien système, où seulement 11% des agents avaient accès à des promotions chaque année. En outre, le plafond des échelles de rémunération a été revu à la hausse. Désormais, un secrétaire greffier pourra atteindre l'échelle 10, alors qu'il était auparavant limité à l'échelle 8. Cette révision permet de mieux aligner la progression des carrières des greffiers avec leurs responsabilités croissantes dans le système judiciaire.
Un déséquilibre persistant dans la rémunération Les greffiers continuent de dénoncer une rémunération qu'ils jugent inéquitable, surtout en comparaison avec celle des magistrats. Les tâches effectuées par les greffiers, particulièrement lors de la phase cruciale de l'exécution des peines et des décisions, sont perçues comme extrêmement sensibles et « éprouvantes ». Pourtant, leurs salaires restent relativement bas, variant entre 5.500 et 15.000 dirhams pour les agents les plus anciens. Cette situation contraste fortement avec les rémunérations des magistrats, dont les salaires moyens ont été revalorisés, passant de 15.600 à 20.000 dirhams. Cet écart important alimente un sentiment d'injustice au sein de la profession, renforcé par le fait que les greffiers jouent un rôle central dans le bon fonctionnement du système judiciaire. Les syndicats de la Justice continuent de plaider pour une revalorisation des salaires des greffiers, estimant que leur rémunération actuelle ne reflète ni la complexité de leurs tâches ni leur contribution essentielle à l'application des décisions judiciaires. Si la réforme de 2019 a marqué un premier pas vers l'amélioration de leurs conditions, la question des écarts salariaux demeure une pierre d'achoppement dans les négociations avec le gouvernement.