La députée italienne Deborah Serracchiani dévoile à « L'Opinion » les coulisses de son amendement relatif à un Corridor vert entre le Maroc et l'Italie, pour l'approvisionnement de son pays en hydrogène vert « made in Morocco ». Interview. * Le gouvernement italien a récemment approuvé l'étude de faisabilité d'un Corridor de l'hydrogène vert depuis le Maroc. Quels sont les dessous du choix du Royaume ? - Il y a un chemin de coopération qui est maintenant long, consolidé et projeté dans l'avenir. Il est le fruit du travail de l'autorité portuaire de Trieste et de l'initiative des acteurs industriels et commerciaux de la région autonome du Frioul-Vénétie Julienne. Depuis des années, le port de Trieste joue le rôle d'éclaireur des réalités stratégiques de l'Europe du Nord à la Méditerranée. Il convient de rappeler que l'oléoduc qui approvisionne de vastes régions d'Europe centrale part de Trieste et que la vallée de l'hydrogène du Nord de l'Adriatique, un projet transfrontalier né de l'accord entre le Frioul-Vénétie Julienne, la Croatie et la Slovénie, est sur le point de démarrer. Ma proposition est cohérente avec ces intérêts.
* Quant à l'étude de faisabilité du Corridor, dernièrement, l'Iran a menacé de mener des attaques au détroit de Gibraltar pour dupliquer la crise en mer Rouge, selon vous cela pourrait-il avoir un impact sur ce chantier ? - Les menaces de l'Iran dans ce cas ressemblent plus à de la propagande et à des messages lancés pour s'accréditer auprès de groupes en quête de patronage. Le contrôle du détroit de Gibraltar n'est pas en question et nos peuples ne doivent pas être soumis au chantage de qui que ce soit. Commençons à travailler avec plus de détermination et je ne doute pas que nous irons de l'avant et que nous atteindrons un objectif important.
* Qui devra financer le projet, l'Italie ou l'Union Européenne ? - Ma proposition autorise le gouvernement italien à dépenser 250.000 euros pour l'année 2024 en faveur de l'Autorité du système portuaire de l'Adriatique orientale pour le financement d'une étude de faisabilité sur le Corridor vert, qui analysera l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement en hydrogène, y compris par l'identification éventuelle de parties prenantes publiques et privées. Malheureusement, lors du débat au Parlement, le vice-ministre de l'Energie a rejeté ma proposition, que je continuerai à soutenir parce que je sais que tout le gouvernement n'est pas de son côté et qu'il est possible de parvenir à un consensus. Il peut s'agir d'une première étape, et d'autres investissements nationaux et européens doivent suivre.
* Ces dernières années, l'Italie exprime son souhait de coopérer avec le Maroc dans le secteur des énergies renouvelables. Peut-on voir des investissements italiens dans ce secteur au Maroc ? - Enel et Eni, deux groupes italiens, sont présents depuis longtemps dans le Royaume, avec des investissements. Des programmes intégrés pour l'énergie solaire, hydroélectrique et éolienne font du Maroc un partenaire clé pour le "Green Deal" européen et les objectifs de décarbonation. La stratégie nationale du Maroc pour le développement de l'énergie constitue un grand intérêt.
* Plusieurs pays européens qui coopèrent avec le Maroc dans le secteur des énergies renouvelables ont adopté une position favorable à l'égard du Dossier du Sahara marocain, tout comme l'Allemagne, les USA, l'Espagne, les Pays-Bas par exemple, l'Italie pourra-t-elle emboîter le pas auxdits pays ? - Ce moment historique et les déséquilibres qui persistent depuis un certain temps, en particulier par les événements de la guerre, exigent une grande prudence et un grand pragmatisme. La priorité actuelle est le retour de la paix et la construction de la stabilité dans la zone du Proche-Orient et je voudrais également mentionner la guerre en Europe. Je réitère que le Royaume du Maroc est un partenaire de premier plan pour l'Italie.
* Quels sont les points à développer en vue de consolider les relations maroco-italiennes ? - Les années 2019 et 2023 ont vu deux actes importants de la part de deux gouvernements italiens d'orientations politiques différentes, confirmant l'existence d'une direction stable de rapprochement et de volonté de collaboration. La signature du Partenariat stratégique multidimensionnel entre le Maroc et l'Italie et la signature ultérieure du Plan d'action donnent un nouvel élan au dialogue politique dans toutes ses dimensions. Les aspects pertinents sont le processus d'intégration avec l'Union Européenne et la sécurité, également à la lumière des événements dramatiques actuels. Diplomatie : Akhannouch reçu par le Président italien Le Chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, a été reçu, dimanche soir à Rome, par le Président italien, Sergio Matarella, aux côtés des chefs d'Etat et de gouvernement participant au Sommet ''Italie-Afrique : Un pont pour une croissance commune'', qui se tient les 28 et 29 janvier. M. Matarella a été accompagné lors de cette réception par la che e du gouvernement italien, Giorgia Meloni. A cette occasion, le Président italien a o ert un dîner en l'honneur des chefs d'Etat et de gouvernement participant à ce sommet, qui fait partie d'un parcours entamé par le gouvernement italien depuis sa prise de fonction, à travers de nombreuses rencontres bilatérales, dont le moment central a été la Conférence sur le Développement et la Migration, qui a eu lieu à Rome en juillet dernier et qui a lancé le «Processus de Rome». Maroc - Italie : Deux pays économiquement les plus dynamiques du bassin méditerranéen Un rapport de Moroccan Institute for Policy Analysis (MIPA), publié le mercredi 24 janvier 2024 et rédigé par le professeur Michaël Tanchum, chercheur non-résident au sein du programme d'économie et d'énergie du Middle East Institute, précise que depuis dix ans, l'Italie et le Maroc sont deux des pays économiquement les plus dynamiques du bassin méditerranéen. L'émergence du Maroc en tant que centre de fabrication et de distribution pour les entreprises cherchant à implanter des opérations à proximité des marchés naux européens matures, ainsi que des marchés naux africains émergents, a créé de nouvelles synergies potentielles pour un partenariat commercial Italie-Maroc plus approfondi. Consciente du potentiel, Rome a signé le 1er novembre 2019 une déclaration de coopération stratégique avec Rabat, qui incluait l'objectif explicite de consolider les relations économiques, commerciales et nancières entre les deux pays. Axée sur les secteurs de l'énergie, de la fabrication industrielle, du développement des infrastructures et du maritime, la déclaration a fait d'une plus grande intégration de la chaîne de valeur Italie-Maroc une priorité diplomatique. En conséquence, la coopération commerciale italo-marocaine constitue désormais l'un des piliers clés de la chaîne de valeur de l'industrie automobile du Royaume. S'appuyant sur la coopération industrielle déjà existante, Rome et Rabat envisagent désormais une coopération dans le domaine des énergies vertes. Alors que l'Italie va au-delà du gaz naturel, Rome a l'opportunité de rééquilibrer sa diplomatie énergétique axée sur les hydrocarbures et d'engager Rabat dans les secteurs des énergies renouvelables et de l'hydrogène vert. Forts de leur expérience dans le secteur automobile, l'Italie et le Maroc peuvent utiliser leurs synergies commerciales pour développer des chaînes de valeur d'énergie verte. Italie-Afrique : Un pont pour une croissance commune Le Sommet «Italie-Afrique : Un pont pour une croissance commune» s'est ouvert lundi à Rome, avec la participation du Chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, qui représente SM le Roi Mohammed VI. Dans une allocution prononcée à l'ouverture de ce sommet, la présidente du Conseil des ministres italien, Giorgia Meloni, a mis en exergue le grand potentiel et la richesse du continent africain, notamment en matière de ressources naturelles et humaines, estimant que "le monde ne peut pas scruter l'avenir sans tourner ses regards vers l'Afrique". Mme Melon a affirmé que l'Italie fonde sa vision de la coopération avec le continent africain sur le "Plan Mattei", qui constitue, selon elle, une plateforme efficace et concrète de coopération avec les pays africains sur la base du principe de l'égalité. A travers ce plan, Rome ambitionne également de mettre en place les conditions favorables pour que les jeunes africains puissent envisager leur avenir dans leurs pays sans avoir besoin d'émigrer, et ainsi "mettre fin à la traite des êtres humains", a-t-elle assuré. De son côté, le ministre italien des Affaires étrangères et de la coopération internationale, Antonio Tajani, a souligné que l'Afrique constitue une priorité pour la politique étrangère italienne, qui vise à mettre en place un partenariat ''efficace et gagnant-gagnant''. Rome souhaite voir l'Afrique devenir un acteur principal sur l'échiquier international, a-t-il dit, ajoutant que la logique de la diplomatie économique rend ''indispensable'' de se focaliser sur le continent africain. Selon le chef de la diplomatie italienne, des secteurs comme l'agriculture, les énergies renouvelables, les infrastructures et le numérique et les nouvelles technologies font partie des principaux domaines sur lesquels il faut s'atteler avec les pays africains, relevant que "la stabilité et la prospérité de l'Afrique signifie la stabilité et la prospérité de l'Italie".