Ce qui se passe actuellement à Gaza rappelle les scènes surréalistes de ces blockbusters américains consacrés au phénomène des ouragans qui étaient très en vogue il y a quelques années. Dans ces films à gros budget, en plus des habituelles images de grandes destructions que les tornades laissent derrière elles, le spectateur était souvent marqué par ces plans mi-féériques, miapocalyptiques, qui sont censés le plonger à coup d'effets spéciaux au centre même de la tempête : ce que les météorologues appellent poétiquement l'œil du cyclone. Pendant ces scènes brèves mais intenses, la lumière angélique et le silence assourdissant qui interrompaient brusquement et temporairement le tumulte de la tempête, donnaient l'impression que le temps était suspendu, plongeant ainsi les acteurs du film, comme ses spectateurs, dans une envoûtante plénitude qu'ils savaient pourtant et malheureusement très éphémère. C'est exactement ce genre de sensations que génère aujourd'hui la pseudo-trêve décidée à Gaza depuis le vendredi 24 novembre, suite à une intermédiation du Qatar et de l'Egypte et qui vient d'être prolongée de 48heures. Pseudo-trêve parce que, dans le cas d'espèce, il s'agit plutôt d'une pause dans les bombardements qui étaient unilatéralement opérés par l'armée israélienne sur les populations civiles de Gaza, depuis plusieurs semaines, après l'anéantissement quasi-total des capacités de riposte du Hamas. Une trêve se décide, en effet, entre deux forces d'égale puissance et non pas entre l'une des plus puissantes armées du monde et la milice armée d'un mouvement de libération nationale dont on n'entend plus parler des roquettes depuis un certain temps et qui ne dispose plus que d'une seule et unique carte: les 180 captifs israéliens qu'elle continue à détenir et dont elle se sert aujourd'hui comme monnaie d'échange pour obtenir la libération de prisonniers palestiniens. En attendant, la bande de Gaza, qui a été bombardée pendant 50 jours avec des milliers de tonnes d'explosifs, est carrément un champ de ruines et un charnier où toute trace de civilisation a été complètement rasée par l'ouragan israélien. Elle compte et enterre ses morts qui atteignent les 14.000victimes, dont plus des deux tiers sont des femmes et des enfants. Les rescapés, eux, lorsqu'ils ne sont pas blessés dans leur chair, sont profondément traumatisés et terrorisés. La parenthèse de répit ouverte par l'arrêt temporaire des bombardements israéliens leur permettra, certes, de panser leurs plaies et de pleurer leurs morts. Mais à quoi bon lorsque l'on sait que ces mêmes bombardements risquent de reprendre incessamment si la communauté internationale ne sort pas de sa posture de complicité active pour certains et passive pour beaucoup d'autres, afin d'obliger Israël à mettre fin au massacre et à ouvrir la voie à de vraies négociations de paix. Trêve donc de cynisme !