Bien qu'elles soient identifiées à un secteur pourvoyeur de richesse, les agences opérant dans le secteur de la publicité numérique affrontent des réalités contraignantes, ayant trait à l'insuffisance de certains profils, voire la pénurie de certaines compétences spécifiques, d'où la nécessité de penser un modèle de développement complet qui prenne en compte le volet emploi et formation. Détails. Le développement numérique, avec tout ce qu'il comporte en technologies de pointe, a eu et continue d'avoir un impact majeur sur plusieurs secteurs dont celui de la publicité. Chose qui transforme carrément la relation-client entre les marques et les consommateurs. Résultat : des métiers anciens se transforment et de nouveaux autres plus pointus apparaissent ou s'étoffent pour épouser cette tendance que ce soit au sein des agences, chez les annonceurs, dans les médias, les régies ou autres acteurs du Web.
Ainsi, en plus du métier de « trafic Manager » ou de « média trader » qui consistait à gérer les campagnes publicitaires en ligne -profil commun entre les agences de communication et les annonceurs-, on parle, désormais, du « data analyst » qui consiste à analyser les données générées des campagnes publicitaires sur internet, mais également du « gros traqueur » chargé d'accompagner une marque à travers des techniques adaptées et d'autres instruments, de plus en plus au cœur de toutes les actions en matière de publicité digitale. Il s'agit d'effectuer une cartographie exhaustive de métiers porteurs d'enjeux pour les agences de marketing, d'où leur quête de nouvelles compétences.
Etat des lieux du marché au Maroc
A l'heure où le Maroc connaît une évolution remarquable des techniques de publicité, boostée bien évidemment par la démocratisation des Smartphones et l'accès à internet ou encore par l'appétence des Marocains pour les réseaux sociaux, la publicité numérique devient, de facto, un secteur porteur d'opportunités de business, et par conséquent, pourvoyeuse de richesse et d'emploi. « Que ce soit dans les agences ou chez les annonceurs, le besoin en digital et en maîtrise de techniques de publicité digitale persiste. C'est une réelle opportunité pour les Marocaines », indique le directeur général de l'agence média MediaMatic, HamzaFqih Berrada, qui se dit très fier des compétences dont dispose le Maroc et sur lesquels il pourra miser pour former les prochaines générations de professionnels de la publicité numérique.
Toutefois, le marché de la publicité au niveau national affiche, comme c'est le cas pour pas mal d'autres secteurs, plusieurs disparités en matière de besoin de compétences, en raison du manque d'investissement dans certaines villes. Ainsi, la majorité des besoins sont, selon notre interlocuteur spécialiste de la communication digitale, forcément concentrés sur l'axe Rabat-Casablanca, d'où la nécessité d'encourager l'investissement dans le reste des régions du Royaume, dit-il, relevant que « les entreprises ont tout à gagner à s'implanter dans de petites villes, que ce soit en termes de taille ou de pression de business».
On voit apparaître cependant de nouvelles startups chaque jour dans des régions lointaines, créant ainsi une réelle opportunité pour les jeunes. Une de ces startups, est la « Mastic Agency » née en 2022 dans la région de Guelmim-Oued Noun par la volonté de trois jeunes auto-entrepreneurs dans les secteurs du développement web, du marketing digital ou du design,désireux d'accompagner la demande en matière de marketing et de publicité digitale dans la région.
Spécialisée dans la publicité et le marketing digital, leur agence emploie un nombre important de jeunes de la région dans le cadre de projets.
La formation est-elle un frein ?
Bien que les plateformes numériques, en l'occurrence celles de Meta, Tiktok ou l'écosystème de Google, offrent de réelles opportunités d'autoformation certifiantes pour les débutants ou pour les professionnels du secteur, les spécialistes pointent du doigt « l'insuffisance » de la formation structurée en la matière, du fait de l'absence d'un cursus spécifique au média digital qui puisse couvrir toute l'étendue du domaine et donc l'ensemble des métiers qui en découlent.
« Les formations dispensées en la matière dans de grandes universités ou de grands instituts sont généralement des formations en marketing et numérique qui reste quand même assez vague et généraliste », déplore Hamza FqihBerrada, soulignant que cette même réalité laisse place parfois à la pénurie de certains profils pointus. « Les agences ont du mal à trouver des profils plutôt spécifiques et techniques qu'elles aillent chercher, forcément, auprès de cabinets internationaux ».
Le spécialiste souligne, à cet égard, que le contexte actuel exige le déploiement de programmes de formation spécifiques en mesure de permettre à la nouvelle génération des professionnels du numérique de disposer d'un niveau élevé d'expertise dans la partie digitale et sur la gestion publicitaire, et donc d'exporter les services offerts par les acteurs nationaux pour servir les besoins existants à l'échelle africaine et internationale.
Pénurie de certains profils de pointe
Dans un marché qui ne cesse de croitre, les agences de publicité affrontent une dure réalité, celle de l'insuffisance de profils expérimentés avec un degré de séniorité ou même la pénurie de certains d'autres. Résultat, elles se trouvent obligées d'aller les chercher ailleurs pour combler les besoins.
Notre interlocuteur cite, dans ce sens, les profils de grottes à cœur avec une expérience avérée dans certains domaines et industries et les profils créatifs notamment des concepteurs rédacteurs, des directeurs de stratégie entre autres.
D'ailleurs, ces profils existant au Maroc sont très convoités à l'étranger. Par envie d'internationaliser leurs équipes, les agences de publicité à travers le monde tentent d'embaucher des profils étrangers. Preuve à l'appui, 20 collaborateurs de l'Agence MediaMatic ont été déjà rapprochés, selon son directeur HamzaFqih Berrada, par des entreprises en Europe ou en Amérique.
Ainsi, le Maroc a tout à gagner en termes de richesse et donc d'emploi, en boostant l'investissement dans le secteur de la publicité numérique. Le travail qui reste à faire devrait se concentrer sur deux volets principaux, à savoir l'encouragement des investissements dans le reste des régions du Royaume ainsi que la formation et l'accompagnement des compétences aux métiers les plus rares du secteur.
Trois questions à Hamza Fqih Berrada, directeur général de MediaMatic « Le marché est à la quête constante de nouvelles compétences » Hamza Fqih Berrada, directeur général de MediaMatic a répondu à nos questions sur les métiers que la publicité numérique offre pour les jeunes.
* Les compétentes existant au Maroc dans le secteur de la publicité sont-elles suffisantes pour répondre aux besoins en la matière ? Il est à noter que ce secteur est un fort pourvoyeur d'emploi, du fait du panel de métiers qu'il offre. Sur le terrain, tous les intervenants sont, effectivement, en recherche constante de nouvelles compétences malgré qu'elles se trouvent confrontées, parfois, à une pénurie importante de certains profils, surtout ceux ayant un niveau de séniorité très recherché.
* Quel est, d'après vous, la clé pour libérer le potentiel des individus dans ce secteur ? Tout passe par la formation, que cela soit fait sur la base de l'auto-formation ou d'une formation plus académique. Dans ce sens, il est important que les jeunes tirent profit des avantages de formation qu'offrent les plateformes numériques, que ce soit META, Google ou autres. Pour leur part, les agences sont appelées à mettre en avant la partie innovation et créativité. Ceci dit, il s'agit de challenger les collaborateurs à travers de nouveaux projets plus pointus.
* Quelles actions sont entreprises par MediaMatic pour développer et intégrer de nouvelles compétences chez ses différents collaborateurs ? Au sein du groupe, nous accordons un grand intérêt à l'évaluation des compétences de nos collaborateurs au moins deux fois par an, mais aussi à leur formation continue. Ainsi, dans des cas où un projet nécessite l'intervention de plusieurs métiers différents parmi nos 200 collaborateurs, nous avons tendance à créer des squad, une espèce de collaboration pluridisciplinaire qui comprend une personne de chaque équipe, pour optimiser le partage et l'échange. En plus de la formation interne dispensée par les pairs, nous avons tendance à encourager nos collaborateurs à initier des projets en interne de manière à ce qu'ils cherchent de nouveaux outils en mesure de nous permettre d'améliorer la qualité de nos services.