Les députés de la majorité ont déposé un ensemble d'amendements au PLF 2023. Les principales modifications soumises ont pour but de taxer les produits nocifs pour la santé, notamment tous types de tabac et assimilés, ainsi que le sucre. Alors que le Projet de Loi de Finances (PLF) entre dans la première phase de discussions à la première Chambre, les membres de la majorité gouvernementale ont déposé une série d'amendements au texte. Le vote de ces amendements ainsi que la première partie du PLF font l'objet d'une réunion de la Commission des finances et du développement économique, ce 9 novembre. Parmi les points importants des modifications proposées par les parlementaires de la majorité gouvernementale, figurent les droits d'importations. En effet, la majorité gouvernementale propose un réaménagement des droits d'importation sur les véhicules utilitaires. Ce type de véhicules était soumis jusqu'à présent à des droits d'importation de 40% pour les modèles pesant moins de 2,2 tonnes. Les parlementaires de la majorité veulent limiter à 10% les droits d'importation applicables aux véhicules utilitaires dont le poids maximal en charge est inférieur ou égal à 3,5 tonnes, « même lorsque ces véhicules utilitaires sont tout-terrain, à quatre roues motrices ou ne sont pas complètement montées », peut-on lire dans le document des amendements. Selon les auteurs de cet amendement, la proposition vise à réaliser l'équité douanière entre différents types de véhicules de poids différents mais ayant les mêmes utilisations. « Par cet amendement, nous visons à permettre au consommateur marocain d'acquérir des véhicules pour transporter des marchandises à des prix acceptables, et donc de réduire l'utilisation des tricycles, devenus un réel danger sur les routes marocaines », justifient-ils. Les députés veulent aussi faire bénéficier les propriétaires de véhicules dont l'âge dépasse les 10 ans, d'une exonération de la vignette et d'une annulation des majorations de retard, s'ils conviennent de les retirer. Le but étant d'encourager ces propriétaires à mettre hors circuit ces véhicules. Le narguilé dans le viseur Les groupes de la majorité veulent aussi exclure des droits d'importation les batteries de véhicules produites à partir de batteries recyclées d'occasion, et ce, pour encourager le secteur du recyclage de batteries pour véhicules. Un autre produit visé par ces amendements est la « chicha » ou le narguilé. L'amendement vise à imposer un impôt à hauteur de 675 dirhams le kilogramme, soit le même que les produits de tabac. Le but est d'élargir l'assiette fiscale pour inclure la mélasse sans tabac, au même titre que les cigarettes électroniques. « Cette mesure vise à préserver la santé des consommateurs, notamment des adolescents, et la protection contre les effets négatifs de la consommation et de la dépendance à ces produits », explique le document. Les membres de la majorité notent d'ailleurs que les importations de mélasse pour narguilé sans tabac ne sont soumises à aucune taxe intérieure sur la consommation, alors que les deux types (avec ou sans tabac) ont le même usage ainsi que les mêmes effets sur la santé. Les importations de mélasse étaient jusqu'alors soumises à des analyses en laboratoire pour s'assurer qu'elles ne contiennent pas de tabac. D'ailleurs, l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) considère que les produits à base de mélange de fruits et d'herbes sans tabac, utilisés dans le narguilé, présentent des risques similaires pour la santé aux produits de tabac. L'Organisation recommande d'appliquer les mêmes restrictions et taxes que pour le tabac. Pour rester en cohérence avec les recommandations de l'OMS, les députés de la majorité veulent augmenter les droits d'importations des cigarettes électroniques de 2,5% à 40%. Selon les rapports de l'Organisation internationale, l'usage de ce type de cigarettes augmente le risque de maladies cardiaques et pulmonaires. Et puisque le marché des cigarettes électroniques est en pleine expansion au Maroc, les députés réclament plus de taxes pour en limiter l'usage. Taxer le sucre Un autre amendement propose d'introduire une nouvelle catégorie de taxe intérieure de consommation (TIC) sur les produits contenant du sucre. Pour les liquides contenant au minimum 12% de jus de fruits ou de concentrés de jus, si la quantité de sucre dépasse 9 grammes pour 100 millilitres, l'amendement propose une TIC de 12,5 dirhams. En 2024, cette TIC passera à 25 dirhams pour les 7 grammes par 100 millilitres, et 37,5 dirhams pour les 5 grammes par 100 millilitres l'année suivante. Cette modification vise, selon ses auteurs, à assurer l'équité fiscale entre tous les produits qui contiennent du sucre. L'introduction du secteur des jus dans les catégories soumises à la TIC sur le sucre, vise à inciter le secteur à réduire la teneur en sucre de ces produits. De plus, ce type de jus est consommé en grande majorité par des enfants, et imposer cette taxe contribuerait à la sauvegarde de leur santé et à leur éviter certaines maladies. Eviter l'évasion fiscale Pour ce qui est de l'IS, le PLF avait introduit un taux d'imposition de 35% pour toute entreprise réalisant des bénéfices dépassant les 100 millions de dirhams. La majorité propose de n'appliquer le taux inférieur de 20% que si les entreprises font un résultat de mois de 100 millions de dirhams pour trois années successives. Cet amendement vise à éviter l'évasion fiscale pour les grandes entreprises qui, par un jeu d'écriture comptable, seraient tentées de baisser artificiellement leurs bénéfices pour ne payer que 20% d'IS. Autre amendement important proposé par la majorité, celui sur la retenue à la source pour les OPCI (Organismes de placement collectif en immobilier). Jusqu'à aujourd'hui, ces organismes bénéficiaient d'un abattement de 60% sur les bénéfices versés aux personnes morales soumises à l'IS. Selon la proposition de la majorité, cet abattement devrait passer de 60 à 40%. Ne bénéficieront de cet abattement que les OPCI dont le capital est ouvert à plus de 40% à des actionnaires externes. Soufiane CHAHID Gain de cause pour les avocats
Suite à la levée de bouclier des avocats contre les dispositions du PLF 2023, la majorité a décidé de trouver un compromis. Dans les amendements de la majorité, les députés proposent la suppression pure et simple de l'article 20 sur l'instauration d'une déclaration du revenu global pour cette profession. Il sera remplacé par le versement d'un montant de 300 dirhams pour chaque affaire, et qui englobera toutes les étapes du contentieux. Deux versements seront effectués par voie électronique avant l'expiration du mois suivant le sixième et le douzième mois de l'exercice comptable. Ces amendements proposent également l'exclusion des affaires exonérées des frais de justice. Dans ce cas, le paiement ne se fera qu'au moment de l'exécution du jugement.