rendez-vous de Charm-el-Cheikh (6-18 novembre 2022) devrait se concentrer sur l'adaptation au changement climatique et la justice climatique avec un financement adéquat puisque les pays du Sud auront besoin de plus de 2.000 milliards de dollars par an d'ici 2030 pour financer leur action climatique, d'où les pays émetteurs de gaz à effets de serre sont appelés à contribuer, en tête les pays développés. Les participants à la grand- messe sur le changement climatique sont entrés dans le vif du sujet, mardi, concernant les mécanismes de financement pour contrer les conséquences de la dégradation de notre environnement. La COP27, puisque c'est d'elle qu'il s'agit, a entamé ses travaux dimanche 6 novembre, qui prendront fin le 18 courant en Egypte. Au programme : réduction des émissions de CO2 et financement des dégâts irréversibles du changement climatique. L'événement, auquel participe activement le Maroc, intervient dans un contexte géopolitique tendu à cause de la guerre en Ukraine, alors que les réseaux d'approvisionnement en énergie se redessinent et la sécurité alimentaire est menacée. Au même moment les catastrophes climatiques, elles, se succèdent avec pour conséquence une vague de chaleur et les feux de brousse en Europe, une canicule record en Inde, des inondations dévastatrices au Pakistan, au Nigeria, sans oublier les sécheresses dans l'Est de l'Afrique ou encore l'ouragan aux Etats-Unis... C'est, sans doute, en raison de ce tableau sombre que le rendez-vous de Charm-El-Cheikh est considéré par beaucoup d'analystes comme celui de la concrétisation des engagements pris. Car après une COP26 focalisée sur l'atténuation (la réduction des émissions de gaz à effet de serre), il est temps que ce nouveau conclave se concentre sur l'adaptation au changement climatique, ainsi que sur la justice climatique par un financement adéquat. Chaque Etat est appelé à jouer sa participation, à commencer par les pays émetteurs de gaz à effets de serre, en tête les pays développés. Déjà le rapport du climat sur l'Afrique fait ressortir que le changement climatique affecte 250 millions de personnes sur le continent et devra affecter 700 millions de personnes en 2050. En outre, la sécheresse a provoqué des pertes économiques s'élevant à 70 milliards de dollars dans la région, sans oublier que les inondations ont fait des milliers de victimes en Afrique, alors que leurs effets devraient atteindre 50 milliards de dollars en 2050. Promesses non tenues L'enjeu est de taille pour le continent qui n'émet que 4% de gaz à effet de serre. Son combat pour une justice climatique avec des promesses non tenues, comme en témoignent les chiffres, est tout à fait justifier. Et le présent rapport d'experts commandé par la présidence égyptienne de la COP27 et la présidence britannique de la précédente COP, publié mardi, enfonce le clou. Puisque les pays du Sud auront besoin de plus de 2.000 milliards de dollars par an d'ici 2030 pour financer leur action climatique, dont près de la moitié venant d'investisseurs extérieurs. Ces investissements, dans les marchés émergents et les pays en développement - hors Chine -, doivent servir à «réduire les émissions, renforcer la résilience, faire face aux pertes et dommages causés par le changement climatique et restaurer les terres et la nature». Le même document indique que la somme totale nécessaire pour ces objectifs doit atteindre quelque 2.400 milliards de dollars annuels d'ici 2030. Sur ce total, 1.000 milliards doivent provenir de financements extérieurs grâce à des investisseurs, aux pays développés et aux institutions multilatérales. Le reste viendrait de financements intérieurs à ces pays, privés ou publics. Comment y arriver alors que les engagements déjà pris n'ont jamais vu le jour ? Ce qui fait dire au président sénégalais, Macky Sall, président en exercice de l'Union Africaine, que la COP de Charm el-Cheikh ne doit pas être un constat de plus du péril climatique, mais une action de plus en faveur du climat, dans l'intérêt des générations actuelles et futures. A ce sujet, fait-il remarquer, le continent souscrit dans le cadre d'une transition énergétique concertée, juste et équitable, en lieu et place de décisions unilatérales qui portent préjudice à son processus de développement, y compris l'accès universel à l'électricité dont 600 millions d'africains restent encore privés. Certes, les initiatives ne manquent pas tel le Fonds vert pour le climat (FEV). Certes, il est devenu pleinement opérationnel en 2015. Il est le principal mécanisme financier pour aider les Etats à atteindre les objectifs d'atténuation. Il a pour ambition de soutenir les pays les moins avancés dans cette «lutte». Cependant, ce mécanisme est jugé lent, trop lourd, trop complexe. Et une étude récente, qui analyse les financements de 2015-2021, montre concrètement les limites du système. Engagements du Maroc En 5 ans, moins de la moitié des projets proposés par les pays les moins avancés ont été approuvés par exemple. C'est dire comment le chemin est tortueux. Bien qu'en octobre 2021, le FVC a accrédité un total de 113 entités de mise en oeuvre en tant que partenaires pour réaliser des projets (avec dix projets supplémentaires depuis 2020) et a approuvé 10 milliards US$ pour 190 projets. Et le Maroc dans cela ? Il faut dire que le pays a vite pris à bras le corps la question climatique. Puisque depuis qu'il a ratifié la Convention-cadre des Nations Unies sur les Changements climatiques en 1995, le Royaume a effectivement et efficacement participé à la Conférence annuelle des Parties avec une délégation représentant divers secteurs gouvernementaux et acteurs directement concernés par les questions du changement climatique. Résultat : le Maroc est considéré, aujourd'hui, comme un pionnier dans le domaine de la transition énergétique et possède environ 50 projets d'énergie renouvelable, d'une capacité d'environ 4000 mégawatts, alors qu'il existe plus de 60 autres projets en cours de développement ou de mise en oeuvre. Enfin, rappelons que la présidence de la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP27) a lancé l'Agenda de Charm el-Cheikh pour l'adaptation et le renforcement de la résilience de 4 milliards de personnes vivant dans les communautés les plus vulnérables aux changements climatiques d'ici 2030 (lire l'encadré). C'est dire que la COP27 promet. Wolondouka SIDIBE Bon à savoir
L'Agenda de Charm el-Cheikh identifie 30 objectifs pour renforcer la résilience, et envisage d'accélérer les actions de transformation par les pays, les régions, les villes, les entreprises, les investisseurs et la société civile pour s'adapter aux risques climatiques graves auxquels sont confrontées les communautés vulnérables. Il est le premier Plan mondial complet visant à rallier les acteurs étatiques et non étatiques derrière un ensemble commun d'actions d'adaptation requises d'ici la fin de cette décennie. Le plan d'adaptation s'articule notamment autour de la transition vers une agriculture durable et résistante au climat qui peut augmenter les rendements de 17% et réduire les émissions de gaz à effet de serre de 21%, sans élargir les frontières agricoles, tout en améliorant les moyens de subsistance des agriculteurs. Il comprend également la protection et la restauration d'environ 400 millions d'hectares de zones forestières (écosystèmes terrestres et d'eau douce) pour soutenir les communautés autochtones et locales en utilisant des solutions naturelles pour améliorer la sécurité de l'eau et les moyens de subsistance et transformer 2 milliards d'hectares de terres en adoptant un mode de gestion durable.