Dans un contexte troublé par l'inflation, le gouvernement entend poursuivre la politique de relance de la demande. Encore faut-il veiller aux équilibres. Les économistes istiqlaliens donnent des pistes de réflexion. Détails Cette année, la rentrée politique est d'autant plus particulière qu'elle intervient dans une conjoncture difficile. Sécheresse, crise économique, marasme de la croissance, inflation galopante. Les défis s'accumulent et le gouvernement tente de les gérer sans que cela entrave le chantier de construction de l'Etat social. L'Exécutif se trouve ainsi confronté à cette équation difficile en élaborant le nouveau projet de Loi de Finances 2023, qui ne manquerait pas d'accaparer l'agenda de la rentrée parlementaire. Stabilité et résilience sont les mots d'ordre du gouvernement pour aborder la nouvelle année, c'est ce qu'a expliqué le Secrétaire Général du Parti de l'Istiqlal, Nizar Baraka, lors d'une rencontre organisée, mercredi à Casablanca, par l'Alliance des Economistes Istiqlaliens (AEI). Une rencontre dédiée à l'examen de la situation actuelle et de la politique générale du pays, qui s'est déroulée en présence de l'eurodéputé espagnol Antonio López-Istúriz White, invité à cette rencontre. C'est une occasion de faire le point sur le bilan de l'action du gouvernement qui vient de boucler une année à la tête de l'Exécutif, tout en se projetant sur les réformes prévues pour la nouvelle année budgétaire. Une année qui s'annonce pleine de défis tant sur le plan économique que politique. Inflation et relance : le grand défi ! "En arrivant au gouvernement, nous avons été confrontés à un certain nombre de chocs dont ceux de la crise sanitaire, la pire sécheresse que nous ayons connue et les effets de la guerre en Ukraine", a rappelé Nizar Baraka, qui s'est montré préoccupé du ralentissement de la croissance de l'économie nationale. Cette année, celle-ci est estimée à un niveau quasi nul (0,8%). D'où l'importance de poursuivre l'effort de relance mené par l'Exécutif qui a adopté un budget d'investissement public record en 2022 (245 MMDH). Toutefois, l'inflation demeure tellement grande qu'elle risque d'amoindrir les efforts du gouvernement qui veut accélérer l'activité et le rythme de création de richesses tout en poursuivant la mise en œuvre des réformes sociales. L'inflation a pris des proportions telles que Bank Al-Maghrib a jugé nécessaire de relever le taux directeur à 2%, s'inscrivant ainsi dans la tendance internationale. Même si cette mesure ne devrait pas avoir un impact considérable sur la croissance, la situation, telle qu'elle est aujourd'hui, interpelle.
Confronté à des dépenses de compensation de la hausse des prix, le gouvernement cherche à préserver les équilibres sans toucher à l'investissement, jugé seul capable de relancer l'activité pour une raison très simple : l'Etat demeure le principal investisseur du pays. Alors que le PLF 2023 est en cours de préparation, plusieurs questions se posent sur l'attitude de l'Exécutif. Sur ce point, Nizar Baraka a expliqué que l'inflation aurait pu être beaucoup plus importante qu'elle ne l'est aujourd'hui, elle aurait même été à deux chiffres, selon lui, si le gouvernement n'avait pas veillé à subventionner les produits de base. Ici, il est question de la hausse du budget de compensation des prix du gaz, du blé, le soutien aux agriculteurs ainsi que l'indemnité exceptionnelle versée jusqu'à maintenant aux professionnels du transport routier. "Nous avons fait en sorte de casser la transmission des effets inflationnistes", a insisté le leader de l'Istiqlal, qui a tenu à rappeler que l'inflation est importée sur fond de la hausse des prix de l'énergie sur le marché international. Faut-il continuer à dépenser autant qu'en 2022 ? Une question qui s'est imposée durant la conférence. "Il faut dépenser intelligemment et savoir combien nous rapporte chaque dirham dépensé", a plaidé Mohamed Kettani, membre de l'Alliance, ajoutant que le bon comportement de la fiscalité grâce aux rentrées fiscales a permis d'éviter une loi des Finances rectificative. Ceci dit, l'amélioration des recettes fiscales donne une marge de manœuvre au gouvernement pour assurer un équilibre subtil entre les dépenses imprévues et celles d'investissement. À entendre l'exposé du SG de l'Istiqlal, on comprend que le gouvernement veut continuer la politique de la demande avec des mesures de soutien à l'investissement et au pouvoir d'achat. Bref, l'Etat-Providence est toujours debout. En 2022, l'Exécutif a pu réussir à financer les dépenses imprévues (compensation) sans creuser le déficit budgétaire qui devrait être, selon Nizar Baraka, moins élevé que ce qui a été prévu dans les hypothèses. Le Trésor, rappelons-le, devrait clôturer l'année budgétaire courante avec un déficit inférieur à 5,9%. Plusieurs facteurs expliquent le maintien des équilibres, à savoir la hausse des recettes fiscales (impôt sur les sociétés et la TVA importée). Pour continuer dans cet élan, le gouvernement mise sur l'allégement de la pression fiscale sur les classes moyennes par la baisse de l'IR, ainsi que sur l'emploi pour booster la croissance, prévue à 3,4% en 2023, selon les prévisions de rapport d'exécution budgétaire et de cadrage macroéconomique triennal 2023-2025. L'Exécutif mise sur les programmes Awrach et Forsa pour stimuler l'emploi et l'initiative privée tout en pariant sur la commande publique. Sur ce point, Nizar Baraka a affirmé que le gouvernement veille à accélérer le rythme d'exécution des dépenses de l'Etat dans le cadre des chantiers publics, dont les infrastructures. Heureusement que l'Industrie se porte bien ! Dans un contexte marqué par les incertitudes et une reprise troublée de l'économie mondiale, l'industrie se porte bien, sachant que tous les emplois perdus durant la pandémie ont été récupérés. 105% des emplois concernés sont récupérés, a précisé Kenza Alaoui, Directrice de l'industrie au ministère de l'Industrie, du Commerce et de l'Economie Verte et Numérique, qui a pris part au panel d'experts. Elle a ajouté que les exportations industrielles du Royaume ont enregistré de très bons résultats de janvier à juillet 2022, avec une hausse de 43% par rapport à la même période l'année précédente. Selon la responsable, le Maroc a su tirer profit de la crise actuelle en récupérant des milliers d'emplois du fait de la situation en Ukraine. "Nous avons été en mesure de récupérer ce qui se produisait en Ukraine", s'est-elle félicitée, tout en se réjouissant de la performance de l'industrie automobile et de l'industrie aéronautique qui suscitent l'intérêt des investisseurs internationaux. "Le Maroc commence à biper dans les radars, et commence à être vu par les industriels allemands, a-t-elle confié.