Le 24 avril prochain, le duel s'annonce serré entre le président sortant Emmanuel Macron et Marine Le Pen, leader de l'extrême droite française, qui n'a jamais été aussi près du pouvoir. Emmanuel Macron est sorti en tête des urnes du premier tour de l'élection présidentielle française, devançant de quelques points la dirigeante d'extrême droite Marine Le Pen, qu'il affrontera le 24 avril dans un duel qui s'annonce serré. Selon les estimations, le président sortant arrive en tête avec 27,6 % des voix, à l'issue d'une campagne fortement perturbée par la pandémie et la guerre en Ukraine. Marine Le Pen arrive deuxième, avec 23 % des voix, talonnée de près par le meneur de la gauche radicale le tangérois, Jean-Luc Mélenchon, qui obtient 22,2 % des suffrages selon l'estimation Ipsos-Sopra Sterias. L'abstention est particulièrement forte, aux alentours de 26 %, marquant le dédain croissant des Français vis-à-vis de leur classe politique. C'est plus que les 22,2 % de 2017, alors que le record est de 28,4 % en 2002. Cette fois serait-elle la bonne pour Marine Le Pen, qui avait été défaite par Emmanuel Macron en 2017 ? La fille de l'ancien et sulfureux tribun Jean-Marie Le Pen, qui avait été le premier à conduire l'extrême droite au deuxième tour en 2002, n'a jamais semblé aussi proche de la victoire selon les sondages réalisés avant l'élection, qui la donnent perdante de très peu, dans la marge d'erreur. Mais elle semble avoir une relativement faible réserve de voix pour le second tour aux vues des estimations de score de l'autre candidat de l'extrême droite Eric Zemmour (7,2 %). Une éventuelle élection doublement inédite Une victoire de Marine Le Pen pourrait avoir d'importantes conséquences internationales, étant donné ses positions hostiles à l'intégration européenne et sa volonté, notamment, de sortir du commandement intégré de l'OTAN. Son élection créerait une double première: première accession au pouvoir par les urnes de l'extrême droite et première femme présidente. Elle a appelé les Français à un « vote de civilisation » pour le second tour. Un moment clé des deux semaines de la nouvelle campagne qui commence sera le 20 avril, lors du traditionnel débat télévisé de l'entre-deux-tours. En 2017, le phénomène Emmanuel Macron dynamitant la gauche et la droite par le centre avait nettement dominé Marine Le Pen. Mais cette fois, la Marine semble nettement mieux préparée pour damer le pion à son adversaire pour le second tour. Elle a conduit une campagne de terrain axée sur le pouvoir d'achat, principale préoccupation des électeurs, tandis qu'Emmanuel Macron, accaparé par la guerre en Ukraine et peut-être trop mis en confiance par les sondages, s'est peu impliqué dans ce premier tour. La campagne électorale a été inédite, car complètement perturbée par la pandémie de covid-19 et par la guerre. Déboussolés ou lassés, de très nombreux Français se sont abstenus ou ont hésité jusqu'au dernier moment avant de choisir leur candidat parmi les douze prétendants. Mélenchon appelle pour un moindre mal
Le chef de file de la France Insoumise, réuni face à des centaines de militants, au cirque d'hiver à Paris, a fait état de sa « violente déception » dimanche après avoir récolté 20,20% des suffrages. Il a estimé que le pays était désormais confronté à un « état d'urgence politique » en devant choisir « entre deux maux ». « Nous avons devant nous d'autres élections. (...) Les jeunes me diront : on n'y est pas encore arrivé. Alors je vous dis : faites mieux », a-t-il déclaré. Arrivé troisième au premier tour du scrutin, Mélenchon, s'il n'a pas donné de consigne de vote au second tour pour Emmanuel Macron, a toutefois appelé à ne pas « donner une seule voix à Marine Le Pen ». « Maintenant c'est à vous de faire. Nous savons pour qui nous ne voterons jamais. Et pour le reste, les Français sont capables de savoir quoi faire, ils sont capables de décider ce qu'il faut faire. Vous ne devez pas donner une voix à Mme Le Pen », a répété le candidat LFI. « Maintenant, on va ouvrir la page et les personnes qui m'ont soutenu vont décider quoi faire », ajoute-t-il. Néanmoins, il a également annoncé que ses « 310 mille soutiens » seraient sollicités pour définir la consigne de vote à donner. Royal fustige "l'ego" des candidats de la gauche
Dans les dernières heures de la campagne, plusieurs personnalités avaient annoncé que leur choix se porterait sur le tribun pour le premier tour. L'ancienne garde des Sceaux Christiane Taubira, avait annoncé dans un communiqué vendredi qu'elle voterait pour Jean-Luc Mélenchon afin de "barrer la route" à l'extrême droite, dont l'arrivée au pouvoir "devient plausible", écrivait-elle. A l'opposé, le parti Génération.s, mouvement fondé par Benoît Hamon, avait annoncé suspendre des adhérents qui avaient signé un appel à voter Jean-Luc Mélenchon. "Il y a la loyauté, c'est important. Il peut même y avoir des conflits de loyauté mais à 3 jours du scrutin quand je vois des candidats de gauche tout faire pour qu'un candidat de gauche ne soit pas au second tour, alors que l'extrême droite est aux portes, j'enrage!", avait écrit jeudi la députée communiste Elsa Faucillon sur Twitter. Plus tôt dans la campagne, mi-février, c'est Ségolène Royal qui avait affirmé que "le vote utile à gauche, (c'était) Mélenchon", conseillant à Anne Hidalgo d'arrêter. L'ancienne candidate à la présidentielle, finaliste en 2007, a tancé sur BFMTV "l'ego" d'Anne Hidalgo, Fabien Roussel et Yannick Jadot, qui n'ont "pas eu le sens de leur devoir. (...) Aujourd'hui, ils se seraient retirés, on aurait Jean-Luc Mélenchon au second tour", a-t-elle critiqué, amère. Si la semaine dernière, Anne Hidalgo et Yannick Jadot se dressaient contre l'existence d'un vote utile en faveur de Jean-Luc Mélenchon, force est de constater que le candidat insoumis s'est incontestablement imposé en tête à gauche.