Côté cour, le classement récent du palace «La Mamounia» en tête des meilleurs hôtels du monde, tout comme l'ouverture imminente d'un luxueux complexe hôtelier dont le tour de table inclut le célébrissime footballeur portugais Cristiano Ronaldo, ravive l'espoir d'une reprise rapide du tourisme à Marrakech. Côté jardin, la ville ocre, qui vit depuis deux années en situation d'apnée économique, est en proie à une crise aussi longue qu'inédite dont la facture sociale se traduit par l'explosion du chômage, ainsi que par la paupérisation galopante des gens consécutive au sevrage touristique de cette ville dont la population vit et survit au rythme de l'activité touristique. Les allées désormais désertes des bazars de l'ancienne médina contrastent avec les rues et les avenues de la nouvelle ville assiégées par des nuées de mendiants et de gardiens autoproclamés de voitures. La criminalité, autrefois discrète et anecdotique, s'exprime maintenant en plein jour avec la multiplication des agressions et des vols à l'arraché. A Marrakech donc, il y a urgence. Bien plus qu'à Agadir, l'autre destination touristique phare du Sud marocain qui, elle, jouit d'un tissu économique plus diversifié et moins centré sur le tourisme que ne l'est celui de la ville ocre. Cette urgence impose la prise de décisions rapides et courageuses, à la hauteur de la situation catastrophique dans laquelle cette ville orientée vers le tourisme local et surtout international est plongée en raison des restrictions sanitaires et de la rupture des flux des arrivées touristiques, suite notamment aux suspensions répétitives des dessertes aériennes. L'imposition récente du «pass sanitaire» sur l'ensemble du territoire marocain, conjuguée à l'atteinte d'un taux d'environ 70% de vaccination de la population cible, ouvre l'opportunité d'une levée totale des restrictions qui pèsent plus lourdement à Marrakech qu'ailleurs. Il s'agit notamment du couvre-feu fixé à 23 heures et qui a suffisamment ravagé les revenus des restaurateurs et des hôteliers. L'incertitude sur les liaisons aériennes devrait également être levée, tout comme cette manie des décisions hâtives et brutales à l'apparition du moindre nouveau variant (dont le dernier en date a un degré de contagiosité à peine supérieur de 10%) devrait être proscrite ou du moins tempérée. En parallèle, une réflexion devrait être entamée d'urgence sur le devenir économique de ces pôles touristiques livrés, comme l'est notre agriculture par rapport aux aléas climatiques, à la merci des variations de conjonctures économiques, sécuritaires et aujourd'hui sanitaires. Car au Maroc, gouverner c'est aussi recevoir. Majd EL ATOUABI