Le Conseil de Sécurité a pris acte des victoires diplomatiques du Maroc dans le dossier du Sahara et du développement que connaît la région, par le biais du rapport d'Antonio Guterres. La relance du processus politique demeure s'annonce après la rupture entre Alger et le Maroc.Détails. À quelques jours de l'expiration du mandat de la MINURSO, le prolongement de la Mission qui veille au respect du cessez-le feu de 1991 sera discuté durant ce mois d'octobre, lors de l'examen de la question du Sahara. Il est fort probable que ce mandat soit prolongé comme de coutume d'un an supplémentaire, renouvelable. Avant de trancher, les membres du Conseil de Sécurité ont dû prendre en compte l'évolution de la situation au Sahara sur la base du rapport du Secrétaire Général des Nations Unies, Antonio Guterres. Le Maroc engrange les victoires diplomatiques Les membres du Conseil ont été informés de l'évolution de la situation au Sahara après une année pleine de bouleversements géopolitiques. En effet, le dernier rapport d'Antonio Guterres s'est distingué de ses précédents par les nouveautés qu'a connues l'affaire du Sahara depuis le mois de septembre 2020. Le Secrétaire Général de l'ONU a souligné les acquis diplomatiques du Royaume au Sahara marocain, citant les multiples inaugurations de Consulats généraux de 16 pays africains, arabes, des Caraïbes et autres dans les villes de Laâyoune et de Dakhla. Celles-ci comptent désormais 26 représentations consulaires, ce qui dénote d'une adhésion internationale à la thèse de la marocanité du Sahara. Irréfutable de par l'Histoire. Antonio Guterres n'a pas manqué de souligner la reconnaissance américaine de la marocanité du Sahara, décidée par l'ancien président Donald Trump, et maintenue par son successeur à la Maison Blanche, Joe Biden. Cependant, les Etats-Unis poussent en même temps vers un règlement politique du différend régional, tout en soutenant le Plan d'autonomie proposé par le Maroc comme seule base d'une solution juste et durable à ce conflit. La reconnaissance des Etats-Unis, pays clé dans le dossier du Sahara et qui est chargé de la rédaction des rapports du Conseil de Sécurité, a brouillé les cartes et a donné un nouvel élan vers la résolution du conflit. Développement incontestable du Sahara Dans son rapport, Antonio Guterres a reconnu le développement qu'a connu le Sahara marocain durant ces dernières années et qui s'est accéléré avec les grands chantiers d'infrastructures, notamment ceux du port atlantique de Dakhla et de la route expresse Dakhla-Tiznit, dont la construction est en cours. Le rapport a mis également en avant les investissements marocains dans le Sahara qui ne cessent de s'accroître au fil du temps. En effet, comme en atteste le Secrétaire Général dans son rapport, « des délégations diplomatiques de Jordanie, d'Oman, d'Arabie Saoudite et du Yémen » se sont rendues, les 24 et 26 juin 2021, à Dakhla et à Laâyoune pour « explorer les opportunités d'investissement au Sahara ». C'est la 4ème année consécutive et la 6ème fois que ceci fait l'objet du rapport annuel. Relance difficile du processus politique En effet, la remise du rapport d'Antonio Guterres intervient à un moment où le doute plane sur l'avenir du processus politique, compte tenu de la tension ambiante au Maghreb. Le Secrétaire Général de l'ONU en est lui-même fort préoccupé puisqu'il qualifie la situation politique au Sahara de « fortement dégradée ». Ceci est évident compte tenu de la rupture des relations diplomatiques entre le Maroc et l'Algérie, décidée unilatéralement par Alger et qui n'est pas de nature à faciliter la reprise du dialogue. Cela dit, la reprise du processus des tables rondes, suspendu en 2019 après la démission de Horst Köhler, semble difficile, d'autant que le Maroc conditionne tout dialogue ave le polisario par la présence de l'Algérie, qui est, en vérité, la principale partie du conflit artificiel. Réunir toutes les parties est le grand défi du prochain émissaire onusien Staffan De Mistura, dont la nomination ne sera actée qu'après l'aval du Conseil de Sécurité, malgré l'accord des parties au conflit.
Anass MACHLOUKH
3 questions à Tajeddine El Houssaini « La présence de l'Algérie aux tables rondes est indispensable »
Mohamed Tajeddine El Houssaini, politologue et expert en relations internationales, a répondu à nos questions sur le dernier rapport du Secrétaire Général de Nations Unies sur le Sahara et l'avenir du processus politique.
- Antonio Guterres a livré son rapport au Conseil de Sécurité où il reconnaît les acquis diplomatiques du Maroc et le développement du Sahara, est-ce une victoire en soi pour le Royaume ? - En toute objectivité, je peux vous dire que j'ai trouvé le rapport susmentionné «équilibré» et en phase avec la réalité sur le terrain. Ce qui est intéressant dans l'exposé d'Antonio Guterres est qu'il a pris en considération les avancées du Maroc dans le dossier du Sahara, après l'ouverture de 26 consulats à Laâyoune et à Dakhla, ce qui montre que l'adhésion internationale à la marocanité du Sahara est incontestable. Le rapport a également reconnu le développement des provinces du Sud, dont bénéficie visiblement la population sahraouie, et c'est en soi un signe positif pour le Maroc.
- Le Secrétaire Général de l'ONU a toutefois signalé une dégradation de la situation vu la tension que connaît le Maghreb ? - Si la situation s'est détériorée sur le plan sécuritaire, c'est à cause des agissements du polisario qui a violé l'accord de cessez-le feu, en bloquant le passage d'El Guerguerat, au risque de déstabiliser toute la région, et ce, au vu et au su de la MINURSO qui en a pris acte. Bien qu'Antonio Guterres n'en ait pas fait allusion dans son rapport, il a souligné implicitement la persistance des «agissements agressifs», ce qui est une reconnaissance tacite de l'obstruction par le polisario du processus politique. - Tant qu'on parle du processus politique, peut-on croire encore à la survie des tables rondes après la rupture diplomatique entre l'Algérie et le Maroc? - Avant de répondre à votre question, permettez-moi d'attirer l'attention sur la prolongation de la mission de la MINURSO pour un an, recommandée par Guterres, au lieu de six mois. C'est très important pour permettre au nouvel Envoyé spécial d'accomplir son travail et relancer le dialogue entre les parties concernées. En ce qui concerne l'avenir des tables rondes, il est impératif que l'Algérie y soit présente, d'autant plus qu'elle est la principale partie au conflit, manipulant le polisario au gré de ses propres intérêts. La présence de toutes les parties est l'essence même du processus des tables rondes, sans quoi la mission du nouvel Envoyé spécial serait vouée à l'échec.