À l'occasion de la Journée mondiale de la sensibilisation à l'autisme, la société civile demande plus d'efforts étatiques pour aider les personnes autistes et leurs familles à relever les défis qu'elles affrontent au quotidien. Une perception différente du monde et une façon complètement altérée d'interagir avec les autres. Ainsi se profile la difficulté dont souffrent les personnes autistes, qui font face à des défis quotidiens pour vivre et exprimer leurs besoins. La Journée mondiale de sensibilisation à l'autisme, célébrée le 2 avril de chaque année, se présente, à cet égard, comme une opportunité de mettre en lumière les souffrances et conditions de vie de cette frange non-négligeable de la société. Au Maroc, les associations spécialisées évoquent le nombre de 400.000 personnes autistes, dont plus de 216.000 enfants qui sont nées avec ce trouble cognitif. L'association Vaincre l'Autisme affirme pour sa part que 34 enfants autistes naissent chaque jour au Maroc pour un total de 12.800 naissances chaque année. L'autisme n'est malheureusement pas un mal curable puisqu'il n'existe pas de traitement pour « guérir » ce trouble et que la totalité des personnes autistes n'ont d'autres choix que d'apprendre à vivre avec leur condition jusqu'à la fin de leurs vies.
Des besoins d'accompagnement
« J'ai senti que quelque chose n'allait pas avec ma fille en l'observant jouer. Ses gestes répétitifs et la façon avec laquelle elle s'isolait m'avaient interpellé. Comme son comportement était très différent de celui qu'avait son frère aîné à son âge, j'avais décidé de consulter un médecin pour découvrir ensuite qu'elle était autiste », raconte Mme Siham Besri, présidente de l'association Attahadi pour le développement des capacités des enfants autistes. À l'image des centaines de milliers d'autres parents marocains qui ont vécu le même drame, Mme Besri a vu sa vie bouleversée. « Très vite, j'avais compris que mon enfant avait besoin d'un accompagnement spécifique dans sa vie quotidienne afin de lui permettre d'évoluer correctement. J'ai donc commencé à chercher des possibilités pour me former aux méthodes et approches comportementales dédiées à l'accompagnement et à l'éducation des enfants autistes. C'était une expérience difficile, car, en l'absence de formateurs spécialisés au Maroc, j'ai dû régulièrement voyager à l'étranger, et dépenser des sommes importantes pour bénéficier de formations accélérées auprès de spécialistes étrangers », confie Mme Besri.
Un parcours parsemé de défis
L'expérience vécue par la présidente de l'association Attahadi illustre le parcours d'un grand nombre de parents marocains qui, malgré leurs efforts pour comprendre et s'auto-former, ont découvert que chaque jour allait constituer un nouveau défi à surmonter. « J'ai eu la possibilité d'investir pour apprendre à encadrer ma fille de façon à encourager son évolution. Ce n'est malheureusement pas le cas de la majorité des parents des enfants autistes. En plus de leurs vies et préoccupations personnelles et professionnelles, les parents doivent trouver des moyens, du temps et des solutions pour faire accompagner leurs enfants au quotidien par des personnes qualifiées. Comme les profils de ce genre sont très rares au Maroc, ils se retrouvent à devoir embaucher une accompagnatrice dont ils doivent en plus prendre en charge la formation », explique la même source. Dans ce contexte très difficile, un grand nombre de familles démunies n'arrivent pas à assurer les conditions adéquates pour améliorer leur quotidien et celui de leur enfant. « Beaucoup de couples n'arrivent pas à survivre à cette situation et finissent par divorcer », constate la présidente de « Attadadi Autisme ».
Insuffisance des efforts étatiques
Pour appuyer les familles, l'Etat a commencé en 2015 à octroyer une aide de 900 dirhams par mois qui est cependant réservée aux inscrits au programme RAMED. « Cette somme, qui ne bénéficie pas à toutes les familles, est largement en deçà des dépenses que les parents doivent engager chaque mois pour leurs enfants autistes. En plus de payer des accompagnateurs, de prendre en charge leur formation, les familles doivent également acquérir du matériel pédagogique adapté qu'il faut constamment renouveler », souligne Mme Besri qui estime les frais mensuels engagés pour un enfant autiste à une moyenne de 5.000 dirhams. S'il existe actuellement au Maroc plusieurs associations dédiées à ce trouble cognitif, force est de constater que les familles qui, chaque jour, découvrent que leurs enfants sont autistes, doivent, en plus du bouleversement qu'elles subissent, se lancer dans un long et épineux parcours du combattant où chaque étape cache un nouveau défi. Si les enfants autistes ne "guérissent" pas, leurs parents tiennent à rappeler en cette Journée mondiale qu'un minimum d'effort peut les aider à apprendre à s'intégrer et à apporter leur contribution à la société. Encore faut-il que celle-ci se soucie de les aider afin qu'ils puissent un jour y arriver.