Biden maintient les sanctions, Zarif exclut de nouvelles discussions, et pour Khamenei, la levée des sanctions est une condition pour retourner aux négociations. Prié de dire si les Etats-Unis lèveraient en premier les sanctions américaines pour faire revenir l'Iran à la table des discussions, Joe Biden a répondu «non» dans une interview enregistrée vendredi. A la question de savoir si les iraniens devaient d'abord arrêter d'enrichir de l'uranium, le président américain a répondu par l'affirmative en faisant oui de la tête. L'Iran est autorisé à enrichir de l'uranium dans une certaine limite, selon l'accord de 2015 qui prévoit un encadrement des activités nucléaires iraniennes. Les Etats-Unis sont sortis de cet accord sous la présidence de Donald Trump, qui a rétabli en conséquence des sanctions contre l'Iran. A la suite de ce retrait, la République islamique s'est elle-même progressivement affranchie de l'accord conclu avec, outre les Etats-Unis, les quatre autres membres permanents du Conseil de sécurité de l'Onu, dont la France, et l'Allemagne. Le président américain Joe Biden a déclaré que, si l'Iran respectait à nouveau pleinement ses obligations, les Etats-Unis reviendraient à leur tour dans l'accord de 2015 et s'efforceraient de conclure un pacte plus global susceptible de porter également sur le programme de missiles balistiques et les activités régionales de l'Iran. Mais le guide suprême iranien Ali Khamenei a déclaré dimanche que les Etats-Unis devaient d'abord lever leurs sanctions contre l'Iran s'ils souhaitaient voir Téhéran revenir sur ses avancées en matière de programme nucléaire. Joe Biden a prévenu qu'il ne ferait pas le premier pas vers l'Iran en levant les sanctions américaines, comme l'ont encore réclamé dimanche les dirigeants iraniens, dans un duel à distance qui présage d'une reprise du dialogue très difficile. Interrogé par la chaîne CBS sur la possibilité de lever les sanctions pour convaincre Téhéran de revenir à la table des négociations afin de sauver l'accord sur le nucléaire iranien, le nouveau président des Etats-Unis a clairement répondu: «Non». Et à la journaliste qui lui demandait si les Iraniens devaient «d'abord cesser d'enrichir de l'uranium», il a répondu avec un hochement de tête, selon un extrait de cet entretien dont l'intégralité devait être diffusée dimanche après-midi. Les Etats-Unis et les autres grandes puissances (Chine, Russie, Allemagne, France et Royaume-Uni) ont conclu en 2015, après de longues et difficiles négociations, un accord avec l'Iran censé l'empêcher de se doter de la bombe atomique. Mais Donald Trump a retiré Washington de cet accord trois ans plus tard. L'ex-président a rétabli puis durci toutes les sanctions contre l'Iran qui avaient été levées en échange de ses engagements nucléaires, et Téhéran a en retour commencé à s'affranchir de ces restrictions. Joe Biden a promis de revenir dans l'accord de 2015, à la condition que l'Iran renoue d'abord avec ses engagements. « Dans la pratique et non sur le papier » Le président américain s'est montré intraitable sur la marche à suivre, et le guide suprême iranien Ali Khamenei a également campé sur ses positions. «S'ils veulent que l'Iran retourne à ses engagements (...) les EtatsUnis doivent entièrement lever les sanctions, dans la pratique et non sur le papier», a affirmé dimanche l'ayatollah dans un discours télévisé. «Nous vérifierons ensuite si dans les faits les sanctions ont été levées correctement», a-t-il prévenu, assurant qu'il s'agit-là de «la politique définitive de la République islamique». Pour l'instant, donc, les deux pays ennemis s'observent et font monter les enchères. Le nouveau gouvernement américain reste volontairement vague sur la manière dont il entend procéder. Manœuvres en coulisses En coulisses, et en attendant un premier contact direct entre Washington et Téhéran, les grandes manœuvres sont donc lancées pour sauver l'accord sur le nucléaire. Le secrétaire d'Etat Antony Blinken a, lui, parlé, vendredi, avec ses homologues allemand, français et britannique pour présenter un front commun avec les trois signataires européens qui ont toujours dénoncé le retrait unilatéral de Donald Trump. Et il a nommé un émissaire chargé de l'Iran, Rob Malley. Son homologue iranien Mohammad Javad Zarif a réaffirmé ces derniers jours que les Américains devaient d'abord «démontrer leur bonne foi». Suggérant aussi que les Européens pourraient «chorégraphier» les concessions des deux pays. Le 21 février prochain, l'Iran menace de restreindre l'accès des inspecteurs internationaux à ses sites, une ligne rouge qui risque de braquer les autres signataires. Zarif a tenté dimanche de relativiser ce risque, tout en s'en servant comme d'un levier pour faire pression sur Washington. Un émissaire onusien à Téhéran pour discuter du Yémen L'assistant principal du ministre iranien des Affaires étrangères chargé des affaires politiques spéciales, Ali-Asghar Khaji, et l'envoyé spécial des Nations Unies pour le Yémen, Martin Griffiths, se sont entretenus dimanche à Téhéran. Lors de la réunion, les deux responsables ont discuté de la crise au Yémen. Khaji a évoqué la situation difficile causée dans ce pays par la guerre et la pression économique imposée, et a appelé l'ONU ainsi que la communauté internationale à intervenir pour arrêter la guerre et éliminer la pression sur le peuple, tout en soulignant la volonté de l'Iran de fournir des aides humanitaires et médicales au Yémen pour sa lutte contre le nouveau coronavirus. Il a également appelé au règlement de la situation au Yémen par des moyens politiques, à la tenue de pourparlers entre les Yéménites et à la formation d'un gouvernement inclusif avec l'aide de tous les partis politiques. Martin Griffiths, pour sa part, a souligné le rôle de l'Iran pour aider à établir la paix dans la région, à cesser le feu, à supprimer la pression économique et à reprendre les pourparlers politiques.