Intervenant hier lors de la réunion de la Commission des finances de la première chambre dans le cadre de la discussion générale du PLF 2021, le ministre de l'Economie et des Finances, Mohammed Benchaaboun, a fait des mains et des pieds pour défendre la «contribution sociale de solidarité», proposée par l'Exécutif. Néanmoins, ses arguments sont loin de convaincre l'opinion publique, surtout qu'une minorité seulement passera à la caisse, vu les faibles mesures d'incitation fiscale dont dispose le Royaume. Malgré moult critiques et remarques adressées par plusieurs experts à propos de la «contribution sociale de solidarité» prévue par le projet de Loi de finances 2021, l'argentier du Royaume ne lâche pas du lest. Devant les membres de la Commission des finances, Mohammed Benchaaboun a intensément défendu la très polémique mesure, jugée «inéquitable», par les principales forces politiques de l'opposition et à leur tête l'Istiqlal. Essayant de la justifier, il a indiqué que le Royaume fait «face à une conjoncture exceptionnelle qui a durement impacté nos ressources financières, et nous sommes en train de mettre en place un chantier de réforme tant attendu par les Marocains, à savoir celui de la généralisation de l'assurance maladie obligatoire ». A court d'arguments, Benchaaboune a rappelé que près de 22 millions marocains vont bénéficier de ce chantier, dont 10 millions en situation précaire, inscrits au RAMED, et qui pourront, aujourd'hui, bénéficier de cette assurance maladie obligatoire, à l'instar de leurs concitoyens opérant dans les secteurs public et privé ou exerçant une activité libérale. «Cette catégorie de Marocains ne mérite-elle pas que nous soyons solidaires avec elle pour qu'elle puisse accéder aux soins dans des conditions qui préservent sa dignité? Ne devrions-nous pas consolider les valeurs de solidarité auxquelles les Marocains se sont spontanément adhérés dans cette conjoncture exceptionnelle, et qui incarne les dispositions de l'article 40 de la Constitution?» s'est-il défendu. A sa décharge, les ménages marocains démunis ont effectivement aujourd'hui, plus que jamais, besoin de soutien. Une réalité à laquelle les députés ne se sont nullement opposés, ni renié. En revanche, ces derniers appellent la tutelle à résoudre la très compliquée équation de l'équité fiscale avant d'acter ces mesures. Il est de notoriété publique, qu'au niveau des personnes morales, seulement une poignée d'entreprises au Maroc sont transparentes, les autres peuvent facilement esquiver cette contribution en jouant sur les comptes. D'ailleurs le ministre lui même a indirectement corroboré cette réalité en déclarant que «99% des entreprises ne sont pas concernées par cette mesure, étant donné qu'elles déclarent un bénéfice inférieur à 5 millions de dirhams (MDH), ou un résultat déficitaire». Ainsi, le «1%» restant va payer cher le prix de la transparence. Les pays leaders dans le domaine de la protection sociale à l'échelle mondiale ont instauré ce type de contributions de solidarité pour financer leurs systèmes de protection sociale de manière permanente et non exceptionnelle, et à des taux plus élevés que ceux proposés dans le cadre du PLF2021, a plaidé Benchaaboun. Or, lesdits pays sont plus stricts et surtout plus structurés sur le plan fiscal. Par ailleurs, Benchaaboune a estimé que pas moins de 92% des salariés ne sont pas concernés par cette mesures, «vu que leur salaire net ne dépasse pas 10.000 dirhams». Là encore, la question de l'équité se pose du fait que ceux qui passeront à la caisse sont surtout les fonctionnaires et quelques employés du secteur privé. Seulement 6% de ces derniers touchent un salaire mensuel net supérieur à 10.000Dhs, certes, mais un pourcentage beaucoup plus important de salariés exclus du nouvel impôt dépasse largement cette somme par le jeu des primes non-soumises à l'impôt. In fine, le ministre des finances a affirmé que l'Exécutif est prêt à interagir avec les propositions des parlementaires, en ce qui concerne la contribution de solidarité pour les personnes physiques, néanmoins, concernant les entreprises, touchées de plein fouet par la crise, l'affaire semble être bouclée.