Alors que la majorité de la presse des deux côtés de la Manche tombait sous le charme de Carla Bruni-Sarkozy en voyage officiel à Londres, son président de mari, sans tambour ni trompette, faisait prendre un virage atlantiste à la politique étrangère de la France. Un virage qui marque une rupture, dans deux domaines, avec la politique traditionnelle de Paris. Premier changement : les alliances européennes. Le président français a profité de son voyage officiel en Grande-Bretagne pour annoncer son intention d'en faire l'alliée privilégiée de la France au sein de l'UE. Si entre Paris et Londres les relations ne sont jamais réellement mauvaises, elles n'ont pas toujours été extrêmement cordiales. Ce temps doit être révolu pour Nicolas Sarkozy. Il ne cache pas qu'il se sent plus d'affinité avec Londres qu'avec n'importe quelle capitale en Europe. Et il veut surtout effacer le péché d'anti-américanisme accolée à la politique française. En creux, ce changement d'alliance marque la fin du tête à tête privilégié entre Paris et Berlin. S'il n'est pas question de traiter l'Allemagne comme la Slovénie ou le Danemark, le président français ne pense pas que l'Histoire et l'intérêt de la France passent par une communauté de vue et d'action exclusive avec le voisin allemand lorsqu'il s'agit de construire l'Europe. Cette conviction qui était celle de Gaulle, fut reprise par François Mitterrand ( il officialisa avec Elmut Khôl la réconciliation entre les deux pays) et poursuivie de façon plus chaotique par Jacques Chirac et Gerart Schr?der. Est-ce à dire que Paris devrait tourner le dos à l'Allemagne ? Certes non. Paris n'en a ni l'envie ni les moyens. Nicolas Sarkozy estime que les relations entre les deux pays ne reviendront jamais à ces périodes troublées qui les ont vu s'affronter dans trois terribles guerres. Et sa volte-face - excessive - sur l'Union méditerranéenne après le désaccord de la Chancelière Angela Merkel montre que le président français est conscient du poids de l'Allemagne devenu l'homme fort de l'Europe. D'ailleurs, c'est à Berlin qu'il est allé au lendemain de son élection. En se rapprochant de la Grande-Bretagne, Nicolas Sarkozy veut sonner la fin de l'anti-américanisme français et celle du rêve d'une Union européenne qui ne serait pas seulement une grande association politique à visée économique et guère plus. Une vision qui se rapproche étrangement de celle du voisin britannique. Le second virage sarkozyste est de la même eau : c'est la réintégration de la France au sein du commandement militaire de l'OTAN en 2009. De Gaulle l'avait fait sortir du traité de l'Alliance de l'Atlantique Nord en 1966 pour conserver l'indépendance française à laquelle il était farouchement attaché alors qu'il voyait dans l'OTAN une institution inféodée aux Américains. Ces dernières années, la France est revenue dans certaines institutions de l'organisation atlantique mais Nicolas Sarkozy veut lui faire réintégrer le saint des saints : le commandement militaire. Comme Jacques Chirac hier, Sarkozy demande que la France obtienne un des commandements militaires de l'Alliance et entend que parallèlement se mette en place une Europe indépendante de la Défense. Vu pieux ? Le problème reste entier : la France dans l'OTAN va-t-elle être obligée de s'aligner sur Washington ou pourra-t-elle peser davantage sur les décisions de l'organisation? Une certitude : en annonçant le jour même du sommet de l'OTAN qu'il envoyait 700 hommes supplémentaires dans l'Est de l'Afghanistan, Nicolas Sarkozy envoyait de fait un message de soutien à George Bush et se mettait à dos nombre de parlementaires français, ceux de l'opposition de gauche bien sûr, mais aussi nombre d'UMP inquiet de voir le nouveau président bafouer les mânes de Gaulle.