Selon toute vraisemblance, la rédaction du texte de la nouvelle constitution est finie. Le souverain devrait annoncer la date du référendum dans le courant de la semaine prochaine, ouvrant la voie à un débat contradictoire. Débat contradictoire, parce que l'on sait que des courants politiques ont rejeté la démarche de la commission. Ces courants ont exprimé, par des voies détournées, leur remise en cause de l'institution monarchique. Il est donc logique et cohérent de les voir rejeter le texte de constitution proposé, soit en appelant au boycott, soit au vote par non. D'autres pourraient trouver les avancées insuffisantes et vouloir l'exprimer par un vote négatif. Par respect pour la démocratie, il faut que tous les avis s'expriment et puissent accéder aux médias sans ostracisme, car l'enjeu n'est pas un plébiscite pour l'institution monarchique. Celle-ci n'a besoin d'aucune opération de re-légitimation, par voie référendaire. L'enjeu c'est de jeter les bases d'un nouveau contrat social sur la base d'un approfondissement démocratique. Cela passe par une grande mobilisation populaire, par le débat contradictoire et non par la propagande moyenâgeuse. La nouvelle constitution, pour être légitime, a juste besoin de recueillir la majorité des voix exprimées. En aucun cas, elle n'a besoin des chiffres à l'ancienne, qui frôlent l'unanimité. Une majorité large serait la bienvenue, mais dans un exercice démocratique ouvert, respectueux des divergences, du droit à l'expression et du vote de tout un chacun. Pour sécuriser le processus, il faut absolument faire abstraction de toute frilosité. C'est une nécessité. Toute tentation plébiscitaire serait une erreur tragique devant l'histoire. Le discours du 9 Mars a ouvert la voie à une loi fondamentale posant le principe de la souveraineté populaire comme source du pouvoir et aussi comme sanction de l'exercice de l'autorité. Cette avancée historique pour le Maroc place sa démocratie parmi les constructions ayant atteint la maturité. Or, il faut accepter qu'en démocratie, le consensus général est impossible à obtenir, tout simplement parce que des sensibilités divergentes traversent la société. Une fois le texte adopté, un marathon électoral sera lancé, débutant avec des législatives anticipées. Le renouvellement des institutions ne coïncidera avec leur recrédibilisation que si la participation populaire est massive. C'est pour cela que le processus référendaire est décisif. De la manière avec laquelle il sera géré, de la richesse des débats, de la crédibilité des résultats dépendra la mobilisation des électeurs pour la suite des opérations votatives. C'est donc la première marche, la plus importante, sur un parcours du combattant qui doit changer la face du Maroc. Nous n'avons pas le droit de la rater.