A écouter Benjamin Netanyahu défendre l'intervention de ses commandos contre la flottille de la paix, on pourrait croire qu'Israël a remporté une bataille navale. A entendre les clameurs qui montent du monde entier, on pensait plutôt à un naufrage politique, un Trafalgar médiatique. Mais le Premier ministre israélien balaie d'un mot le chœur des indignations : «hypocrisie !». Lever le blocus ferait illico de Gaza une rampe de lancement pour les missiles iraniens… Le chef du gouvernement ne remettra en cause ni la tactique menée au large, ni la stratégie poursuivie à terre pour briser le Hamas alors que les deux ont lamentablement échoué. Dans la tempête, le capitaine maintient le cap ! Seul face au monde, et fou à force d'avoir raison. A coup d'arguties pour prolonger l'occupation, de raisonnements biaisées par la logique de la guerre au terrorisme, à force de justifier l'injustifiable, les dirigeants israéliens se sont condamnés au déni permanent. On a vu pareillement le culot d'enfer du chef d'état-major de la marine israélienne. Vautré dans son fauteuil, désinvolte malgré la mort de 9 civils, il plaidait la légitime défense. Comme si les victimes avaient été des mutins. Comme s'il ignorait qu'un arraisonnement dans les eaux internationales relève de la piraterie. On connaît des amiraux débarqués pour moins que cela. Des ministres limogés après des opérations aussi mal montées ou aussi mal menées. Des gouvernements qui se sabordent sans avoir fait autant de dégâts. Jamais dans son histoire récente, Israël n'a été aussi isolé. Le divorce avec son seul allié dans la région est consommé. Sauf à imaginer un putsch improbable qui ramènerait les généraux au pouvoir, la Turquie retourne ses alliances irrémédiablement. L'Europe est à bout de patience. Les Etats-Unis de Barack Obama ne se résignent plus à l'impuissance. Evidemment, la flottille de la paix était affrétée par des amateurs d'eaux troubles. Mais elle a réussi à réveiller l'attention du monde sur le sort des habitants de Gaza. 1,8 million de civils condamnés à l'enfermement, à la prolétarisation… et à l'islamisme! «Désormais Gaza, c'est le Hamas. Et le Hamas, c'est Gaza !» résume le curé du lieu, un prêtre palestinien qui vient de passer 15 ans dans le territoire et a vu l'enrôlement de la jeunesse et la montée du fanatisme. Fatales erreurs de calcul des grands stratèges de Tel-Aviv qui auront voulu affaiblir l'Olp en misant sur les Frères musulmans, avant d'imaginer brimer les Gazaouites pour qu'ils se révoltent contre les élus du Hamas… Les batailles militaires remportées contre les civils, en haute mer ou dans les faubourgs misérables, sont autant de naufrages. Avec des victoires pareilles, pas besoin de défaites. Même plus besoin d'ennemis, pour être vaincu.