L'IA inquiète les Marocains et représente une source d'angoisse pour eux. Dans un contexte marqué par un taux de chômage record de plus de 21% (Chiffre du HCP tiré du dernier recensement), 70% des Marocains s'inquiètent pour leur avenir professionnel et estiment que l'IA causera des pertes d'emplois. C'est ce que nous apprend une récente enquête menée par Ipsos, le spécialiste français des études de marché. Menée auprès de Marocaines et Marocains de différents âges et issus de différentes classes sociales, cette étude révèle une perception de l'IA plutôt influencée par le genre. Et pour cause, les hommes seraient plus angoissés face à la révolution numérique avec un taux de 73%. Ils y voient une menace directe pour leur emploi. Les femmes restent, quant à elles, moins craintives et plus ouvertes au changement avec un taux de 66%. Lueur d'espoir Pour 67% des jeunes l'IA est à craindre lorsqu'il s'agit de leurs postes contre 71% des séniors. Fait surprenant ! Les différences des classes sociales n'influencent guère la perception de l'IA. Cadres ou employés aux petits salaires, ils se méfient tous et presque de la même manière de l'impact de l'IA sur leur avenir professionnel (respectivement de 73% et 72%). Inquiets mais nullement désespérés, les Marocains interrogés par Ipsos, restent optimistes quant à l'avenir. Ainsi 64% des interviewés, restent confiants. Ils voient dans l'IA une belle opportunité professionnelle qui pourrait leur ouvrir d'autres voies dans marché de l'emploi. «A mon avis, au Maroc, cette question n'est pas d'actualité. Il est encore tôt pour avoir de telles inquiétudes par rapport à la concurrence vis-à-vis de l'IA. Actuellement, on reste un « petit » marché qui n'est pas assez développé en termes numériques pour craindre que l'IA prenne la place des employés humains », explique à L'Observateur du Maroc et d'Afrique Hassan, Kherjouj, expert en marketing numérique et développement informatique. Il est encore tôt... Qualifiant ces inquiétudes de « prématurées », Kherjouj estime qu'on doit attendre 20 à 30 ans pour en reparler. Explication ? « Sur le tas, le Maroc n'est pas un pays industriel qui développe de la technologie, on reste plutôt des consommateurs. Si l'on parle de numérisation, le pourcentage des institutions qui ont numérisé leurs services ne dépasse pas 1%, même pas une dizaine d'institutions (Privé et public) et ça concerne de simples mesures et procédures. L'IA peut constituer une menace pour les employés dans les pays hautement industrialisés où la technologie et la numérisation sont très avancées tels la Chine et les Etats Unis », détaille l'expert. D'après ce dernier, le Maroc accuse un énorme retard en matière de data. « En l'absence de data et de serveurs pour conserver et collecter les données, ça serait difficile de produire une IA « efficace ». Cette dernière se nourrit essentiellement de ces bases de données dans les différents secteurs pour générer des solutions et pour pouvoir se substituer à l'élément humain », analyse Hassan Kherjouj. Ce dernier note toutefois que ces inquiétudes pourraient être légitimes à partir de l'an 2030 qui marquera un véritable cap pour le Maroc mais aussi pour le monde entier. Une voie de salut : la spécialisation « Les prévisions des futurologues laissent croire à une véritable révolution numérique après 2030 où l'IA sera prédominante et prendra des proportions inimaginables. Cette dernière peut alors représenter un danger pour les professions dont les employés ne développent pas leur potentiel et leurs aptitudes », note l'expert. Ce dernier insiste sur l'importance de la spécialisation pour couper le chemin à l'IA et « l'empêcher de prendre sa place ». Les médias, les métiers du journalisme et de la santé et même l'avocature sont autant de secteurs à haut risque comme le soutient l'expert. « Le Washington post a développé un robot qui produit jusqu'à 200 articles par jour, des interventions chirurgicales pointues sont opérées à distance, les logiciels IA peuvent faire un diagnostique percutant d'un cas médical compliqué et indiquer le protocole à suivre. L'IA peut même te proposer ton plan de défense dans une affaire judiciaire... tout ça pour dire que la spécialisation reste la solution et l'arme dans cette concurrence rude avec l'IA », conclut Kherjouj. Des propos confirmés par un récent rapport du Fonds monétaire international affirmant que près de 40% des emplois dans le monde sont menacés par l'IA, spécialement ceux fondés sur l'automatisation, la technologie et les tâches répétitives. Capable de substituer aux humains occupant les postes hautement qualifiés, l'IA menace plutôt la main d'œuvre des pays développés.