En 2021, le Maroc a enregistré un record: 27.000 cas de divorce. Un chiffre jamais atteint depuis l'entrée en vigueur de la Moudawana. Cette année 2022 ne se présente pas non plus sous de meilleurs hospices. Passant de 26.914 cas en 2004 à 20.372 en 2020, ces chiffres vont enregistrer un véritable bond en 2021 avec 26.957 cas, soit +6.585 par rapport à l'année précédente. Une hausse jamais constatée depuis l'entrée en vigueur du nouveau code de la famille. Causes L'institution du mariage serait-elle ainsi en danger ? Pour Ali Chaâbani, chercheur en sociologie, le facteur législatif en aurait pour quelque chose dans cette hausse. « Le code de la famille a facilité les procédures du divorce. Ce qui a encouragé les couples à passer à l'acte en engendrant une telle hausse ». Le sociologue évoque également le facteur économique et l'incapacité de certains maris de subvenir aux besoins de leurs familles. « Mais le facteur économique n'est pas toujours la cause. Il y a également les problèmes sociaux liés au couple lui-même, à son entourage et à l'intrusion des familles dans la vie des jeunes couples », ajoute le Châabani. Déjà en janvier 2021, la love coach Maria Bichra, prévoyait ce boom de divorces. « Avec la pandémie Covid-19, nous parlons d'une même crise vécue par tous en même temps ; forcément on aura les mêmes résultats avec certaines variantes locales. Le couple marocain n'a pas été épargné et nous devrons nous attendre à un grand nombre de ruptures et de divorces au bout de cette période de crise », nous explique-t-elle auparavant. Confrontée quotidiennement aux turbulences secouant la vie conjugale de nombreux marocains, elle nous affirme que cette expérience est l'une des plus rudes épreuves imposées au couple actuel. Au bout de 11 ans d'exercice en tant que coach au chevet des couples, elle essaie d'identifier les sujets de discorde menaçant la stabilité des foyers marocains. Infidélité, conflits constants, incompatibilité, manque ou absence de communication, égocentrisme et manque d'intimité émotionnelle sont autant de causes qui minent l'entente conjugale, tout en transformant la vie au foyer en un véritable enfer. La coach n'oublie pas les abus physiques et verbaux, les addictions de toutes sortes qui constituent également des raisons principales de séparation. Un tas de causes qui mènent les couple, au final, aux tribunaux en explosant les chiffres du divorce. Solution La solution pour inverser la tendance ? D'après Abdellatif Ouahbi, ministre de la justice, la formation des couples avant le mariage serait un bon moyen pour limiter le nombre de ruptures précoces. S'exprimant lors d'une rencontre à Rabat, lundi dernier, le ministre préconise des formations qualifiantes en vie conjugale, en éducation sexuelle et reproductive. « Ciblant les jeunes couples s'apprêtant à convoler en justes noces, ces ateliers devraient les préparer à leur future vie, les aider à stabiliser leurs rapports tout conservant l'unité et la structure familiale », argumente le ministre. Une idée qui n'est pas tout à fait nouvelle au Maroc. Car déjà en février 2021, le concept a été testé à Casablanca avec la « Mariage Academy ». Une initiative lancée par la love coach Maria Bichra pour accompagner les couples désireux de « sécuriser » leur futur mariage. « L'absence d'éducation et de formation qualifiante au mariage et de culture de pactes avant l'union, représentent autant de facteurs favorisant la crise de confiance homme-femme. Cette «école» tente justement d'y remédier», explique l'initiatrice de Mariage Academy. Besoin « Il y a un réel besoin d'accompagnement et de coaching relationnel pour les couples marocains surtout avec le rétrécissement du rôle de la grande famille », nous assure-t-elle. Côtoyant au quotidien, des couples en crise et d'autres se préparant à s'unir mais en mal de repères, la coach détecte aussitôt ce besoin pressant. « Pour une personne qui veut s'engager dans une relation durable et épanouissante, l'accompagnement peut être d'une aide précieuse. Beaucoup de couple expriment d'ailleurs ce besoin ouvertement », note-t-elle. Manquant de repères, les jeunes couples sont perdus et profondément malmenés par « les préjugées empoisonnants », comme les qualifie Bichra. « Il suffit de bien les aiguiller et de leur proposer les bons outils via des formations et des ateliers pour qu'ils trouvent leur chemin », nous explique-t-elle la philosophie fondatrice de son académie maritale. Aider les couples à ressouder leur union et à travailler leurs aptitudes relationnelles pour augmenter ses chances de pérennité... C'est en effet le fondement de cette manœuvre. Un concept inédit dans notre pays où c'était souvent aux familles et aux parents de jouer les réconciliateurs. Les premières sessions de cette formation s'articulent autour de la thématique : « Les bases et les piliers d'une relation amoureuse pour bien préparer son projet de mariage ». Un thème qui a déjà séduit des centaines de participants dès le lancement.