Votre café du matin, votre pain au chocolat, vos comptes twitter, facebook ou encore Instagram, votre série fétiche sur Netflix, votre smartphone ou vos achats compulsifs ... Ils sont tous des pourvoyeurs de première de dopamine. Pour votre cerveau, toutes ces activités aussi différentes que soient-elles, sont des stimulateurs. Le fait de les pratiquer l'incite en effet à libérer la dopamine qui chatouille vos neurones en vous procurant du plaisir... beaucoup de plaisir mais reste éphémère. La dopamine addiction Alléchés par cette agréable sensation, nous sommes ainsi attirés par tous ce qui est capable de nous procurer du plaisir à longueur de journée. Se shootant à la dopamine, notre corps s'offre des petites ou grandes doses... selon son degré d'addiction. « Ces activités provoquent des sensations différentes, parce qu'elles passent par des voies différentes. Vue, ouïe, goût... Mais si nous ne faisons pas le lien entre Netflix ou du sucre, le cerveau, lui, ne s'y trompe pas » explique le neuro-endocrinologue américain Robert Lustig. D'après ce professeur exerçant à l'Université de Californie, le cerveau humain interprète et comprend les deux pratiques de la même manière : Comme une récompense. Une récompense qui reste à effet ponctuel et surtout court d'où cette envie perpétuelle de renouveler les expériences de plaisir. Pire encore ! A force de recevoir des récompenses, ces dernières en perdent avec le temps et « l'usage » leur valeur. « A force d'être stimulés, les neurones du plaisir sont saturés. Ils sont inhibés. Pour retrouver les mêmes sensations, on en demande encore plus », explique Professeur Lustig. Une course au plaisir qui s'opère d'une manière hypnotisante. On est focalisé sur son propre plaisir, on délaisse le reste, on perd de sa concentration et sa perspicacité... Le cerveau étant dans un état second. Qu'est ce que le dopamine fasting ? En vogue actuellement chez l'élite de la Silicon Valley, ce jeûne particulier consiste en effet à se priver de dopamine. Un sevrage forcé et volontaire qui aide à se passer des stimulateurs « artificiels » du plaisir et de se concentrer sur l'essentiel. « Le fait de « se retirer » rend probablement la vie plus intéressante quand on y revient » argumente Cameron Sepah, professeur clinicien de psychiatrie à San Francisco dans un article publié sur LinkedIn. « En prenant une pause des comportements entraînant une forte libération de dopamine, en particulier de manière répétée, notre cerveau se rétablit », assure le spécialiste. Un argumentaire qui semble convaincre de plus en plus d'adeptes à travers le monde mais également au Maroc. « Je passais par une mauvaise passe et j'ai décidé de faire du dopamine fasting pendant 40 jours. Pas de réseaux sociaux, pas de télévision, aucune connexion internet. J'ai même arrêté le café et le sucre artificiel juste des fruits. Je vous assure que je me suis sentie comme régénérée. L'esprit plus vivace et le corps plus léger. J'étais comme libérée », raconte Hind Herrak, jeune employée de Casablanca. Effet libérateur Une sensation de liberté qu'elle partage avec un bon nombre de personnes ayant réussi à décrocher pour une durée qui peut être longue comme courte. « Pour moi c'était juste pour une quinzaine de jours. Je préparais mes examens de fin d'année et je n'arrivais pas à me concentrer. L'idée m'est venue alors de me retirer des réseaux sociaux. Et c'était comme une révélation. Beaucoup plus de temps disponible, une meilleure concentration et une efficacité améliorée », assure Réda Benâyach, étudiant en deuxième année d'internat en médecine dentaire. Depuis cette première expérience plutôt satisfaisante, le jeune étudiant assure renouveler son dopamine fasting régulièrement. « Une sorte de cures qui me permettent de reposer mon cerveau et de re-éprouver le plaisir de refaire ces pratiques par après », commente-t-il souriant. Moins triste Versant dans le même sens, une étude menée par le journal américain Niemann Lab auprès de 1.800 étudiants de l'Université A&M du Texas, a pu mesurer les effets d'une semaine sans Facebook. Au bout de cette abstinence ciblée, les étudiants se sont déclarés « sensiblement moins tristes ». Un effet plutôt positif pour ces jeûneurs volontaires mais qui n'est pas apprécié pour autant par tout le monde. « Mais pourquoi devrait-on se priver des seuls plaisirs accessibles ? Nous autres chômeurs, nous n'avons rien d'autres pour nous amuser à part les réseaux sociaux, internet ou la télévision », riposte Rajaa. M, sur un groupe facebook en réaction à un post prônant le jeûne de la dopamine. « Je n'ai pas de problème à devenir addict vu que j'ai tout le temps pour m'y consacrer », ironise-t-elle. Effet inverse ? Loin de toute ironie, les détracteurs du dopamine fasting évoquent un effet contraire à celui tant escompté. D'après Joydeep Bhattacharya qui dirige le groupe de recherche sur les neurosciences et cognitives à l'Université de Londres, la dopamine est produite lors de l'anticipation de la récompense et non pas lorsque cette dernière est ressentie. « Du coup durant la période de jeûne, l'abstinence pourrait stimuler l'imagination du jeûneur. Ce dernier anticipera ainsi la récompense future et son cerveau libérera automatiquement la dopamine », explique le scientifique. Un fait scientifique qui peut expliquer d'ailleurs la difficulté à décrocher et à zapper des gestes devenus automatiques. Même les plus fervents adeptes du fasting reconnaissent d'ailleurs que la tentation de jeter un coup d'œil est la pire épreuve à surmonter dans cette lutte anti-addiction. Croyez-vois pouvoir y arriver ?