L'affaire de Hanaa « Moulate lkhimar » ou « La fille de Tétouan » aura des suites. Après avoir purgé sa peine : Un mois de prison, Hanaa revient à la charge pour réclamer justice. Epaulée par le Collectif 490, la jeune femme a déposé plainte auprès de la police hollandaise contre son ex-amant qui est à l'origine de la diffusion sur le net de leur sextape. D'après le collectif, un avis de recherche contre l'accusé M. C.C est déjà lancé par la police hollandaise et Interpol. Victime/coupable Rappelons que quelques mois après la diffusion de sa sextape, Hanaa a écope, en appel, d'un mois de prison ferme et 500 dhs comme amende. L'affaire de « Moulate lkhimar » a éclaté en janvier 2021, après la diffusion d'une vidéo relatant des ébats sexuels entre la jeune femme et son compagnon. Aussitôt identifiée par la police judiciaire, cette dernière a été arrêtée et soumise aux interrogatoires tandis qu'un avis de recherche a été lancé pour arrêter son partenaire. Ce dernier était en effet suspecté d'être derrière la diffusion de la vidéo. Et ce qui a commencé par de la compassion envers Hanna a finalement pris la forme d'une pétition populaire réclamant sa libération. Pourtant elle a été présentée devant le tribunal de première instance et a été condamnée à un mois de prison ferme. Une peine confirmée quelques mois plus tard par la cours de cassation de Tétouan. Ce jugement a provoqué des réactions mitigées auprès des activistes des libertés individuelles et à leur tête ceux du Collectif « Hors la loi ». « Hanaa ne retournera pas en prison, ce qui est en soi une délivrance », commente le collectif dans un communiqué rendu public, quelques heures après la prononciation du jugement, par la cour de cassation à Tétouan. Une libération qui a pourtant laissé un arrière gout amer pour les défenseurs des libertés individuelles car n'osant pas une jurisprudence audacieuse. « Pour espérer un changement, il faut qu'un juge aie le courage de prononcer un jugement audacieux qui pourra acquitter Hanaa qui reste une victime dans cette affaire », soutient Karima Nadir, activiste du collectif quelques heures avant la prononciation du jugement. La riposte Une victime qui réclame aujourd'hui justice encouragée par le message positif envoyé par la justice dans son affaire. « Le procureur du roi a décidé d'étendre le mandat de recherche de l'auteur de la vidéo et de sa diffusion au niveau international alors qu'il était jusque là juste national », se réjouit-on au collectif suite au procès. Une mauvaise nouvelle pour l'accusé « qui sera poursuivi essentiellement selon la loi 103-13 pour violation de la vie privée d'autrui et pour diffamation. Ceci sans oublier l'article 490 sanctionnant les relations sexuelles hors mariage », nous explique Réda Mesanoui, avocat à Casablanca. De lourdes charges qui pèsent sur l'auteur de la vidéo ayant trahi la confiance de sa compagne. « L'accusé peut écoper d'une peine de prison allant d'un mois à un an selon les termes de l'article 490 », détaille l'avocat. Quant à la violation de la vie privée, fini le temps de l'impunité. Avec la loi 103.13 luttant contre la violence à l'égard des femmes, des sanctions pour violation de la vie privée sont prévues par le Code pénal. « Publier les photos ou des vidéos d'autrui ou leurs déclarations sans leur consentement dans le but de les diffamer expose l'auteur à des peines de prison et à des amendes pouvant atteindre 5 millions de centimes », nous apprend l'avocat. Violation de vie privée « La loi 103-13, et spécialement l'article 447, est une véritable avancée susceptible de protéger les droits des citoyens touchés par ces agissements et par les vidéos les relatant. Mais pour la mettre à profit, il faut avant tout sensibiliser les citoyens à leurs droits et aux possibilités offertes par cette nouvelle loi anti violence contre les femmes mais aussi contre les hommes victimes de diffamation et de violence », commente Bouchra Abdou, directrice de l'association Tahadi pour l'égalité et la citoyenneté. « Une plainte auprès de la police peut déclencher une procédure susceptible de neutraliser « l'agresseur numérique » et de le mettre derrière les barreaux pendant une période allant d'un à 5 ans », explique Youssef Rabhi, Titulaire d'un doctorat axé sur les crimes électroniques à caractère sexuel. Pourtant, d'après le juriste, la plupart des victimes ignorent que la loi les protège et ne savent pas que le harcèlement et la violence électronique constituent un délit puni par la loi. D'après les chiffres d'une enquête menée par le Haut Commissariat au Plan concernant la cyber-violence, elles seront près de 1,5 million, les femmes victimes de violence numérique au moyen de courriels électroniques, d'appels téléphoniques, de SMS ou d'images... avec une prévalence de 14%. Ceci tout en prenant en considération le grand nombre de victimes qui n'arrivent pas ou renoncent à leur droit de dénoncer ce type d'agressions. «Seule une femme sur dix dépose plainte quand il s'agit de violence numérique », nous affirme auparavant la directrice de Tahadi. Par « violence numérique » on indique toute violence ou agression ou harcèlement via les réseaux sociaux, à travers les outils technologiques que ça soit par des appels, des SMS, des messages, des photos... Bouleversant, la vie des victimes, elle affecte leur sécurité psychique, morale, sociale, économique et sexuelle. Notons que les acteurs de la société civile multiplient les efforts de sensibilisation et d'accompagnement pour «mettre à profit», la loi 103-13 relative à la violence contre les femmes fraichement mise en application.