L'air semblait plus léger ces derniers jours au Caire. Les Egyptiens, à la veille de l'arrivée de Barack Obama dans leur capitale, le 4 juin, semblaient croire qu'un miracle pouvait s'y produire. Le président des Etats-Unis les avait choisis pour annoncer, dans un discours devant l'université du Caire, sa réconciliation avec le monde arabe et musulman. C'était la reconnaissance explicite de leur poids sur la scène proche-orientale. Et un tournant dans l'histoire des Etats-Unis. Malmenant ses partenaires arabes et musulmans, George Bush les avait convaincus que sa lutte contre le terrorisme se confondait avec la lutte contre leur religion. Barack Obama est donc venu panser les plaies de ce Proche-Orient si maltraité ces dernières années. L'avenir de la région, la paix en Irak, en Afghanistan, la reprise des relations avec l'Iran des mollahs et la résolution du conflit israélo-palestinien en dépendent, estime-t-il, convaincu que tous ces points de friction réagissent les uns sur les autres, et se renforcent. Il avait déjà amorcé cette réconciliation en avril, lors d'un discours à Ankara, en Turquie. Le moment est bien choisi, la semaine qui s'ouvre est celle de tous les espoirs - et de tous les dangers. Outre le discours du Caire le jeudi 4 juin, les Libanais vont élire leurs députés le 7, et pour la première fois les Syriens seront apparemment restés hors du coup. Les Iraniens voteront quatre jours plus tard pour élire leur nouveau président de la république et peut-être faire savoir à Mahmoud Ahmadinejad que son populisme et ses provocations ne sont plus de mise. Pour Barack Obama, les discours n'auront qu'un temps. La réconciliation des Etats-Unis avec le monde arabe et musulman ne se nourrira pas éternellement de paroles. Il lui faudra agir. Et c'est en Palestine qu'il devra le faire. D'où l'inquiétude israélienne devant la réconciliation de leur allié américain avec l'islam. Ils ont donc envoyé Ehoud Barak, le ministre de la Défense, à Washington, pour tenter de préserver leurs intérêts à la veille du voyage présidentiel en Orient. Les hostilités sont ouvertes entre Washington et Benyamin Netanyahou, le Premier ministre israélien. Reçu par Obama en tête à tête, il s'était entendu dire que les Etats-Unis exigeaient, dans un premier temps, l'arrêt de la colonisation. Il vient de s'entendre rappeler à l'ordre publiquement, cette fois, par Hillary Clinton. «Les Etats-Unis refusent la création de nouvelles colonies comme les extensions de colonies existantes», a-t-elle précisé. Jusqu'où Barack Obama est-il prêt à aller dans son bras de fer avec Israël ? Obama est convaincu qu'il doit obtenir la création de l'Etat palestinien. Il a des atouts : il jouit d'une grande popularité, s'est entouré de nombreux juifs dans son équipe de conseillers et a, en face de lui, un Premier ministre israélien qui n'est guère populaire dans son pays et encore moins dans la communauté juive américaine qui a voté en majorité démocrate. Aussi la Maison Blanche est-elle bien décidée à aborder avec les Israéliens les questions qui fâchent, comme le retrait des colons de Cisjordanie (ils sont 280.000). On pourrait leur proposer un troc de territoires sur une base égalitaire, solution déjà discutée à Taba entre Palestiniens et Israéliens en janvier 2001. Dans l'immédiat, l'équipe d'Obama veut du concret pour la Cisjordanie : suppression des points de contrôle de l'armée, disparition des petites colonies de peuplement. Politiquement, l'idée américaine est d'obtenir le soutien de l'ensemble des pays musulmans pour ouvrir la négociation sur tous les dossiers impliquant Israël, à savoir Palestine, Liban, Syrie. En contrepartie, les Etats arabes pourraient commencer à entretenir certaines relations avec Israël. On peut être sceptique sur ce point tant que les Israéliens n'auront rien donné de concret aux Palestiniens.