Le général Lansana Conté s'est accroché un quart de siècle au pouvoir. Il a régné 24 ans, quand Sékou Touré avait tenu 26 ans. Le progrès existe mais il est lent. Seuls le diabète et la leucémie auront fait lâcher prise au président guinéen. Rien ne le décourageait : ni l'exemple désastreux laissé par son prédécesseur, ni les calamités endurées par ses concitoyens. Il y a deux ans déjà, l'Union africaine l'avait conjuré de préparer sa succession. En vain. Lansana Conté aura raté sa sortie comme le reste. A l'annonce de sa mort, des militaires ont imaginé de barrer la route aux caciques du régime. Des putchistes incapables de se mettre d'accord sur un chef ! Evidement, l'Onu, l'Union Africaine, l'Union européenne, Washington, Paris ont exigé en chur le respect de l'ordre constitutionnel. La Guinée n'a pas besoin d'une guerre civile : elle est déjà à reconstruire. Au 160e rang (sur 177) de l'indice de développement... Scandale politique, la Guinée est aussi un scandale géologique. La richesse de son sous-sol est un miracle. Il est farci de bauxite, fer, or, diamant. En prime, c'est le château d'eau de toute la région. Mais tous ces atouts servent surtout à entretenir la kleptocratie locale. De même que les mines de Coltan du Kivu éclairent la guerre qui saigne le Kivu, la richesse de la Guinée explique largement la misère des Guinéens. Il n'y a que le Zimbabwe qui soit descendu plus vite aux enfers du sous-développement. Trente ans seulement quand la Guinée en a mis cinquante. On a entendu cette semaine Robert Mugabe répondre à tous ceux qui exigent son abdication : «Le Zimbabwe est à moi !». Quel aveu ! Il a scandalisé. Mais Lansana Conté devait penser ainsi, prêt à entrainer son pays dans sa tombe.