réunion des partis de la majorité tenue la semaine dernière était marquée, pour la première fois, par la présence de Hamid Chabat. En effet, le nouveau secrétaire général de l'Istiqlal avait raté celle tenue il y a un mois. Le compte rendu fait devant le comité exécutif est peu flatteur pour les deux hommes (Chabat et Benkirane) qui ont eu des échanges vifs, personnels, avant de se calmer et de continuer la réunion. Malheureusement, le caractère des deux dirigeants, leur impulsivité, leur langage coloré, fait que leur différend surmédiatisé, apparaît comme une aversion entre eux deux. Or, cela correspond peu à la réalité. Hamid Chabat réclame une plus grande implication des partis de la majorité dans l'action gouvernementale. Il veut que les grands dossiers soient tranchés par les instances des partis de la coalition, avant leur prise en charge par l'exécutif. Benkirane rétorque que c'est le cas, puisque les réunions de la majorité sont régulières. L'Istiqlal veut plus, un pilotage en commun en quelque sorte, ce que le PJD n'est pas prêt à accepter. Quand Chabat propose un remaniement, il a bien évidemment des arrière-pensées partisanes. Ses lieutenants ont tous été éliminés par Abbas EL Fassi et il veut procéder à leur nomination. Mais il enveloppe cette revendication dans une critique plus globale de l'action du gouvernement « trop lente et incohérente ». Ce sont ces critiques publiques aussi virulentes que celles de l'opposition, qui suscitent l'ire de Benkirane qui en appelle à la loyauté de ses alliés. Le secrétaire général de l'Istiqlal conteste aussi plusieurs décisions de l'exécutif. Ainsi, il est pour le recrutement des diplômés chômeurs sans concours, respectant l'accord signé par Abbas EL Fassi sous la contrainte du Printemps Arabe, au nom de la continuité de l'Etat. Le chef du gouvernement met en avant l'inconstitutionnalité de cet accord discriminatoire. Chabat attaque aussi Nizar Baraka parce qu'il a déclaré qu'il n'y aura aucune augmentation pour les fonctionnaires. Il est dans son rôle de syndicaliste en défendant les troupes qui l'ont mené à la tête de l'Istiqlal. Le chef du PJD avance, lui, l'état des comptes de la Nation et l'esprit de responsabilité qui doit prévaloir. Le fond de la querelle est donc très politique et non pas personnel comme on le présente. Ces divergences fragilisent réellement la coalition. Le PPS et le MP appellent au calme et au respect des engagements moraux. Ils mettent en avant le fait qu'ils ont pu intervenir sur des dossiers relevant de départements gérés par des islamistes. Les deux hommes doivent donc se hisser au niveau de leurs responsabilités et oublier les petites phrases dont raffolent les médias. Une vraie négociation politique est nécessaire pour replâtrer, voir renforcer, la coalition gouvernementale. La gestion de la crise économique nécessitera des mesures impopulaires, le processus de décompensation fort complexe fera naître des contestations. Dans cet environnement, une coalition effritée est une catastrophe, parce qu'à la crise sociale s'ajoutera une crise politique. Le premier pas c'est de se recentrer sur les divergences réelles et dépersonnaliser la querelle.