Nicolas Sarkozy va très certainement réussir la conférence de lancement de l'Union pour la Méditerranée. Mais réussira-t-il, pour autant, à faire vivre ce projet qui semble lui tenir à cur et doit permettre aux deux rives de la Méditerranée de coopérer étroitement sur des projets communs en toute égalité ? Rien n'est moins sûr. Au regard du nombre des participants, le sommet du 13 juillet à Paris devrait être un succès. Tous les pays seront représentés, à l'exception de la Libye qui n'a pas encore donné son accord malgré l'envoi à Tripoli de Claude Guéant, le secrétaire général de l'Elysée la semaine passée. La plupart des Etats le seront au niveau des chefs d'Etat ou de gouvernement. Réserve encore leur accord : Abdelaziz Bouteflika et le Premier ministre turc. Mais l'Elysée avait bon espoir que le président algérien finisse par faire le voyage. Pourtant, d'ores et déjà, on sait qu'il ne devrait pas y avoir de déclaration politique, la présence d'Israël rendant l'accord sur un texte quasi impossible. Elle sera remplacée par un communiqué final. Si Hosni Moubarak doit être élu vice-président pour la rive sud, le poste de secrétaire général pour le sud va rester vacant faute d'une entente formelle entre Maghrébins. Aucune capitale ne sera formellement désignée à Paris le 13 juillet pour abriter ce secrétariat. C'est évidemment un mauvais départ pour un projet qui devait, selon Nicolas Sarkozy l'an passé, devenir l'Union méditerranéenne et suivre les pas de l'Union européenne. Il espérait qu'à l'image de la CECA (communauté du charbon et de l'acier) lancée dans les années 50 entre sept pays européens, les Etats du pourtour méditerranéen s'entendraient sur des projets communs dans quatre domaines (économie, environnement, sécurité, culture) afin de resserrer éventuellement leurs liens dans le futur. Paris ne cachait pas aussi que le dossier « sécurité et émigration » était capital à ses yeux. Dans l'idée initiale élyséenne, les projets étaient proposés, sur une base égalitaire, par l'un ou l'autre des pays et pouvaient regrouper de deux à dix ou plus Etats riverains. Nicolas Sarkozy fut maladroit dans la présentation de son projet. Lancé sans concertation avec ses partenaires européens ou ses alliés du sud, il avait sous-estimée l'opposition d'Angela Merkel. Et celle des Turcs qui estiment alors, pas à tort, qu'il s'agit de créer un forum qui se substituerait à leur entrée dans l'Europe. Cédant à la chancelière allemande lors d'un Conseil européen de mars, Nicolas Sarkozy a fait machine arrière. La France est membre de l'UE, elle n'a nullement les moyens financiers de se passer de l'UE pour un projet méditerranéen et si Nicolas Sarkozy avait tenté de le faire, il se serait heurté à l'opposition de la classe politique française et au désaccord des Espagnols et des Italiens, au minimum. L'Allemagne qui participe largement aux projets et à la coopération au sud de la Méditerranée, ne veut pas être oublié des futurs projets de développement économique où les entreprises françaises pourraient être avantagées. Les relations, mauvaises entre Sarkozy et Merkel n'arrangent rien. Sur la rive sud, c'est la déception. Nombre de pays n'y trouvent plus leur compte. A l'exception du Maroc, l'enfant gâté de l'UE, qui négocie un statut à mi-chemin entre l'association et la simple coopération. Les autres Maghrébins, en particulier l'Algérie et la Libye clament leur déception. « C'est un Barcelone bis » dit-on à Alger. Se retrouver face à Bruxelles et à sa bureaucratie ne les enthousiasme pas. Pas plus que nombre d'entre eux apprécient le fait qu'au sommet, ils seront minoritaires face aux 27 de l'UE. Comment se feront-ils entendre ? Et puis la rive nord n'entend-elle pas accélérer la création d'une zone de libre-échange dont elle sera la seule gagnante sous couvert d'UPM? Cette semaine, les ministres du Commerce de l'UE et les 13 pays de la Méditerranée se sont retrouvés à Marseille pour la septième conférence « EuroMed ». Le manque d'enthousiasme des pays du sud était flagrant devant la création d'une zone de libre-échange dés 2010 en particulier en matière d'agriculture et de services. La plupart d'entre eux ne se sentent pas prêt pour cette échéance. Ils craignent que UPM ne soit qu'un nouvel outil pour accélérer ce processus de libéralisation qu'ils jugent inégalitaire. Alors qu'ils rêvaient de créer une grande famille du pourtour méditerranéen.